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Inde

Manmohan Singh a prêté serment

Manmohan Singh, candidat du parti du Congrès, a annoncé le 19 mai 2004 qu'il avait été chargé de former le nouveau gouvernement indien par le président Abdul Kalam. 

		(Photo: AFP)
Manmohan Singh, candidat du parti du Congrès, a annoncé le 19 mai 2004 qu'il avait été chargé de former le nouveau gouvernement indien par le président Abdul Kalam.
(Photo: AFP)
Manmohan Singh, qui a été désigné par son parti pour accéder au poste de Premier ministre de la fédération, après l’abandon de Sonia Gandhi, soumise à une très violente campagne de la part de ses adversaires nationalistes sur ses origines étrangères, a prêté serment lors d'une cérémonie officielle organisée au Palais présidentiel de New Delhi, le 22 mai. Il était accompagné des 67 membres de son gouvernement. Sonia Gandhi qui a définitivement abandonné l’idée d’accéder au poste de Premier ministre, en dépit des manifestations de ses alliés qui ont tenté de la faire revenir sur sa décision, a assisté à la cérémonie.

C’est peut-être l’un des épisodes politiques parmi les plus denses et les plus révélateurs de l’histoire moderne de la fédération indienne qui s'achève avec l’investiture de Manmohan Singh au poste de Premier ministre. Cette désignation est la conséquence d’un bras de fer politique qui a mobilisé l’opinion publique indienne et suscité de nombreux commentaires, autour de la personne de la présidente du parti du Congrès, Sonia Gandhi, qui s’est retirée de la course aux plus hautes fonctions, auxquelles elle était désignée en vertu de sa position, à l’issue d’une campagne inédite.

Mercredi, la presse indienne rendait hommage au «grand acte de renoncement» de l’héritière de la dynastie Nehru-Gandhi, le qualifiant de «sacrifice». Et a contrario, les journaux évoquaient les «esprits étriqués» d’une droite nationaliste «arrogante». En effet, malgré la pression de ses amis, malgré sa légitimité politique incontestable et les manifestations organisées par ses partisans jusque devant sa résidence, Sonia Gandhi, née italienne voici 57 ans, a rejoint l’avis de ses proches. Ses enfants, ses amis, l’ont apparemment convaincue des risques énormes qu’elle encourait face à la colère irrationnelle de cette fraction de l’opinion publique acquise aux thèses les plus chauvines du parti nationaliste sortant, le BJP (Bharatiya Janata Party).

Sonia Gandhi est certainement une femme courageuse, mais elle sait mieux que quiconque que son pays (elle a acquis la nationalité indienne en 1984), loin des clichés spiritualistes, est également une terre de violences extrêmes. Son mari, Rajiv, a succombé à un attentat en 1991, tandis que sa belle-mère, Indira Gandhi, avait été assassinée, en 1984. Et depuis quelques années, sous l’influence du BJP, le climat entre les communautés religieuses au sein de la «plus grande démocratie du monde» s’est considérablement dégradé, alors que l’hermétisme des castes demeurent plus contraignant que jamais. Outre les menaces qui pèseraient sur sa vie, Mme Gandhi a certainement mesuré aussi le poids d’une telle campagne sur sa politique, les risques de paralysie de son action et d’instabilité gouvernementale. Ce dont son pays n’a certainement pas besoin face aux immenses défis qu’il doit affronter, à l’intérieur comme à l’extérieur.

Premier chef du gouvernement indien d’origine sikh

Une fois la décision prise, restait au parti du Congrès, vainqueur des élections législatives, à trouver une personnalité à la hauteur de la charge. Tous les regards se sont notamment portés vers Manmohan Singh pour occuper ce poste de Premier ministre. Membre du parti du Congrès, ancien ministre des Finances et réputé «libérateur»de l’économie indienne, ancien gouverneur de la Banque centrale indienne, il est considéré comme l’artisan des premières réformes économiques engagées en 1991 par ce pays marqué par une forte tradition socialiste et une longue coopération avec Moscou. Au cours de ces deux derniers jours, Sonia Gandhi a donc mené d’intenses consultations parmi ses alliés de la classe politique indienne pour qu’ils reportent sur M. Singh, âgé de 71 ans, la confiance qu’ils lui avait accordée afin de constituer une coalition capable de résister à l’usure des épreuves. M. Singh sera le premier chef du gouvernement indien d’origine sikh.

C’est donc en compagnie de Manmohan Singh, présenté comme son lieutenant, que Sonia Gandhi est allé à la rencontre du président Abdul Kalam. Avant de donner son feu vert, ce dernier s’est assuré que la candidature de M. Singh offrait les mêmes garanties que celle de Mme Gandhi, en termes de consensus au sein de la coalition qu’il devra conduire. Car les partisans les plus fidèles de Mme Gandhi continuaient mercredi de ressentir son retrait comme une trahison et sa «sagesse» se heurtait toujours à l’incompréhension d’une partie de son propre camp. Mercredi matin, la secrétaire générale du parti du Congrès annonçait la démission des responsables de la formation dirigée par Mme Gandhi pour tenter de la convaincre de revenir sur son refus. «Nous ne retirerons pas notre démission aussi longtemps que Mme Gandhi ne changera pas d’avis», a déclaré Mme Ambika Soni, traduisant l’influence que Sonia Gandhi continuera néanmoins d’exercer sur la vie politique de son pays.



par Georges  Abou

Article publié le 19/05/2004 Dernière mise à jour le 22/05/2004 à 15:50 TU

Audio

Pierre Prakash

Correspondant de RFI en Inde

«Sonia Gandhi souhaite un gouvernement stable et fort pour l'Inde.»

[19/05/2004]

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