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Irak

L’ONU réconciliée

Le siège de l'ONU à New York. 

		( Photo : AFP )
Le siège de l'ONU à New York.
( Photo : AFP )
Les demandes de la France, l’Allemagne et la Russie ont été prises en compte. Reste à savoir si la résolution aura des conséquences bénéfiques sur la situation sécuritaire.

De notre correspondant à New York (Nations unies)

Le Conseil de sécurité a célébré dans l’allégresse mardi soir son unité retrouvée, en votant à l’unanimité une résolution encadrant le transfert de souveraineté aux Irakiens. Comme il est d’usage dans les couloirs feutrés de l’ONU, les derniers jours de la négociation ont été marqués par des péripéties qui font le sel de la vie diplomatique. Lundi soir, la quatrième version du projet américain ignorait superbement les revendications françaises. Mais le tir a bien vite été corrigé. Et de l’avis de la plupart des diplomates, la résolution finale est «un bon texte», qui préserve la souveraineté retrouvée des Irakiens.

Le Conseil de sécurité endosse ainsi le gouvernement intérimaire irakien, qui à partir du 30 juin remplacera l’administration civile américaine. Ceci marque pour l’ONU la fin de l’occupation, même si les troupes américaines sont autorisées à rester en Irak. Détail important : le nouveau gouvernement pourra demander le départ des troupes d’occupation si il le souhaite –ce qui est peu probable. En tout état de cause, le mandat de la force multinationale expirera à la fin 2005, lorsqu’un gouvernement irakien définitif sera nommé. Grâce à l’insistance de la France, le texte final prévoit que les Irakiens exercent le contrôle de leur police et de leur armée. Ils auront aussi leur mot à dire avant que les troupes américaines ne lancent des offensives jugées délicates, du type de celle de Falloujah. Mais ils n’auront pas un droit de veto sur ces opérations, comme le voulait Paris.

Le nouveau texte accorde également un rôle important à l’ONU, dont le retour en Irak est toutefois conditionné à l’amélioration des conditions sécuritaires et à la mise en place d’une force chargée de sa protection. Une force pour laquelle plusieurs pays se seraient déjà portés candidats. Le mandat confié aux Nations unies est essentiellement politique. Elles devront aider à former un Conseil consultatif chargé de conseiller le gouvernement transitoire, faciliter l’organisation des élections, aider le pays à accoucher d’une constitution, coordonner l’aide à la reconstruction…

Élections en janvier 2005

Le calendrier politique américain est également approuvé. Des élections démocratiques au suffrage direct devront avoir lieu avant le 31 janvier 2005, pour élire une assemblée nationale de transition qui nommera un nouveau gouvernement et rédigera une constitution permanente, en vertu de laquelle un gouvernement définitif sera élu, avant la fin 2005. Pour satisfaire une demande russe, la possibilité d’une réunion internationale qui faciliterait ce processus est soulevée.

Par cette résolution, les États-Unis tentent de sortir de l’ornière en obtenant le soutien de la communauté internationale. Le Conseil de sécurité «prie les États Membres et les organisations internationales et régionales d’apporter une assistance à la force multinationale, notamment sous forme de forces militaires». Il demande aussi «à nouveau aux États membres, aux institutions financières internationales et aux autres organisations de renforcer leurs efforts afin d’aider le peuple irakien à reconstruire et à développer l’économie du pays, y compris en fournissant des services d’experts internationaux». L’embargo sur les armes est partiellement levé, mais uniquement pour les besoins de la coalition et des forces de sécurité irakiennes. Les Irakiens récupèrent aussi le contrôle de l’argent de leur pétrole, mais sous l’œil vigilant d’un Conseil international consultatif et de contrôle.

Pour la première fois depuis longtemps, la négociation fut fructueuse. Fait inhabituel, les États-Unis ont intégré les demandes de nombreux pays, comme la France, l’Allemagne et la Russie, sinon dans leur intégralité, au moins dans leur esprit. A la détermination de Paris, Washington a répondu par la persuasion, plus que par la pression. Ce changement d’attitude est à mettre au compte des difficultés rencontrées en Irak. L’Amérique a besoin d’aide et elle la réclame plus humblement. Reste à savoir si les retrouvailles diplomatiques vont déboucher sur une amélioration de la situation. Voter pour une résolution est une chose, envoyer des troupes en est une autre. La France, qui refuse d’envoyer des hommes, en est le parfait exemple. Or, plus que des symboles de la souveraineté, c’est de sécurité dont les Irakiens ont aujourd’hui besoin.



par Philippe  Bolopion

Article publié le 09/06/2004 Dernière mise à jour le 11/06/2004 à 12:59 TU

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Georges Corm

Ancien ministre des finances libanais de 1998 à 2000, écrivain et universitaire

«La résolution est positive. Le ton américain est maintenant modeste... Le projet de grand/moyen Orient américain n'a aucune crédibilité.»

[09/06/2004]

Lakhdar Brahimi

Emissaire spécial de l'ONU en Irak

«Forcer la main absolument pas, mais c'était un exercice difficile... Forcer la main non, essayer d'influencer oui.»

[11/06/2004]

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