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Politique française

UMP : la guerre des chefs aura bien lieu

Alain Juppé (à gauche), Nicolas Sarkozy (au centre) et Jean-Pierre Raffarin lors du Conseil national de l’UMP. 

		(Photo : AFP)
Alain Juppé (à gauche), Nicolas Sarkozy (au centre) et Jean-Pierre Raffarin lors du Conseil national de l’UMP.
(Photo : AFP)
Tous les participants au Conseil national de l’Union pour un mouvement populaire (UMP), réuni dans la région parisienne les 26 et 27 juin, sont apparus souriants et détendus. Cela n’a pourtant pas empêché des échanges assez vifs entre les leaders du parti à propos du sujet le plus sensible du moment : la candidature de Nicolas Sarkozy à la présidence de l’UMP, après le départ d’Alain Juppé. Malgré l’entente de façade, le combat est engagé entre ceux qui estiment qu’il peut cumuler le ministère de l’Economie et la direction du parti, et ceux pour lesquels Nicolas Sarkozy doit choisir.

Jacques Chirac n’était pas là. Mais ses lieutenants ont fait en sorte que le point de vue présidentiel soit largement entendu. Jean-Pierre Raffarin en tête, les fidèles du président de la République ont donc profité de la réunion du Conseil national de l’Union pour un mouvement populaire (UMP) à Coudray-Montceaux, pour dire et redire qu’«aucun gouvernement ne peut exister avec deux autorités, celle du parti et celle de l’exécutif». En version traduite, ce message destiné directement à Nicolas Sarkozy signifie que, s’il entend briguer la présidence de l’UMP, il devra quitter le ministère de l’Economie. Car comme l’a expliqué Alain Juppé : «Il est difficile d’être chef du parti et numéro 2, ou 3, ou 4 du gouvernement». Ajoutant : «Je ne vois pas quel pourrait être le Premier ministre qui pourrait accepter ?».

Nicolas Sarkozy a peut-être, pour sa part, une petite idée sur cette question. Lui qui ne voit pas pourquoi il lui faudrait absolument scier l’une des branches sur lesquelles il est assis. Sans attaquer quiconque de front, le ministre de l’Economie a donc joué la bonne foi et la candeur en s’adressant aux cadres du parti pour leur dire qu’il entendait respecter les règles «à condition qu’elles soient connues en début de partie et qu’elles soient les mêmes pour tous». Il lui souvient peut-être, qu’en leur temps, Jacques Chirac et Alain Juppé ont cumulé parti et gouvernement sans que personne n’y trouve à redire. Il est vrai qu’ils occupaient alors le poste de Premier ministre et non celui de simple ministre de l’Economie.

Les «purs-sangs» et les autres

Vu de l’Elysée, cette précision change tout. Par la lorgnette Sarkozy, cela revient à chipoter. Car comme le ministre de l’Economie l’a rappelé sans précaution de langage devant le Conseil national de l’UMP, le parti manque de «purs-sangs». A chacun de savoir où se situe Jean-Pierre Raffarin et Nicolas Sarkozy. Les partisans du ministre de l’Economie ont donné de ce point de vue l’explication de texte. Le député européen Brice Hortefeux a ainsi estimé que celui-ci est «aujourd’hui aux yeux de l’immense majorité des militants, des cadres et des parlementaires, qui sont la colonne vertébrale de l’UMP, comme une bouée de sauvetage et comme l’oxygène dont l’UMP a besoin». Yves Jégo, député UMP de Seine-et-Marne, a lui affirmé : «Nicolas Sarkozy sera utile au gouvernement et, s’il le décide, conjointement et en même temps à la présidence de l’UMP». Quant à Eric Raoult, député de Seine-Saint-Denis, il pense que Nicolas Sarkozy a «les qualités, le talent et la compétence pour pouvoir, comme beaucoup d’autres avant lui, comme Alain Juppé ou le président de la République, assumer plusieurs responsabilités… Ce n’est pas un tabou».

Le débat sur les conditions de sa candidature n’a pas empêché Nicolas Sarkozy de présenter son programme et ses ambitions pour redonner du souffle à l’UMP. Il a affirmé vouloir se placer en position de «conquête permanente» pour casser avec une tradition «de gestion du patrimoine électoral» qui a montré ses limites aux régionales et aux européennes. Un pavé dans le jardin d’Alain Juppé qui a, pour sa part, mis ces défaites sur le compte des réformes, comme celle des retraites, qui ont laissé «un goût amer».

Conflit d’ambitions, conflit de personnalités, conflit d’analyses, tous les ingrédients sont décidément réunis pour que la guerre des chefs puisse s’engager. Le Conseil de l’UMP n’aura de ce point de vue convaincu personne qu’en disant, à l’invitation d’Alain Juppé, «ce qu’ils avaient sur la patate», les cadres du parti ont apaisé les conflits. Tout au plus auront-ils posé les bases du rapport de force à venir pour la course à la présidentielle. Une perspective dans laquelle Nicolas Sarkozy se place sans état d’âme, lui qui a rappelé, pour que personne n’oublie qu’il est toujours le plus populaire des hommes politiques de droite, que «la France se donne à ceux qui la désirent le plus».



par Valérie  Gas

Article publié le 27/06/2004 Dernière mise à jour le 27/06/2004 à 17:14 TU