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Union européenne

Durão Barroso succède à Prodi

La nomination du Premier ministre portugais José Manuel Durão Barroso à la présidence de la Commission européenne, suggérée par  son homologue irlandais Bertie Ahern, devrait être confirmée mardi 29 juin 2004. 

		(Photo: AFP)
La nomination du Premier ministre portugais José Manuel Durão Barroso à la présidence de la Commission européenne, suggérée par son homologue irlandais Bertie Ahern, devrait être confirmée mardi 29 juin 2004.
(Photo: AFP)
Le Premier ministre irlandais Bertie Ahern va proposer mardi aux 25 d’entériner la nomination de son collègue portugais José Manuel Durão Barroso à la tête de la Commission européenne pour les cinq années à venir.

Sauf incident de dernière minute, Bertie Ahern aura tenu son pari: faire adopter avant la fin de la présidence irlandaise de l’Union qui prend fin mercredi soir la Constitution européenne et le choix du successeur de Romano Prodi. Ce faisant, il a aussi effacé le souvenir de la calamiteuse présidence italienne du semestre précédent.

Pour la constitution européenne, le savoir-faire du Taoiseach (appellation gaélique du chef du gouvernement irlandais) avait permis aux 25 d’accoucher d’un compromis lors du sommet de Bruxelles le 18 juin dernier, mais ce même sommet avait vu l’affrontement des positions apparemment irréconciliables du Royaume Uni d’un côté, de la France et de l’Allemagne de l’autre. Londres avait ainsi mis son veto au candidat franco-allemand, le Belge Guy Verhofstadt tandis que Paris écartait le favori de Londres, le Britannique Chris Patten.

A cette occasion, Jacques Chirac avait rappelé les critères éliminatoires de la France pour le futur chef de l’exécutif européen: il doit appartenir à un pays qui est engagé dans les projets d’intégration les plus aboutis de l’Union européenne, à savoir les accords de Schengen et l’euro, ce qui élimine le Royaume Uni, le Danemark et l’Irlande, par exemple. En outre, le futur président de la Commission doit être francophone. Si Jack Straw a fulminé publiquement contre ces «lignes rouges», nul candidat à la présidence de la Commission ne peut sérieusement envisager d’accomplir sa tâche contre l’un des principaux pays de l’Union, ce qu’a parfaitement exprimé un autre candidat possible, l’Irlandais Peter Sutherland qui a fait savoir qu’il n’accepterait le poste que si son nom faisait consensus.

De leur côté, les «petits pays» de l’Union étaient très méfiants à l’idée que la Commission soit présidée par un «grand». En outre, le nouveau président doit obtenir la confiance du parlement européen, où le groupe conservateur du Parti populaire européen est le plus important. Il fallait donc qu’il soit acceptable par la droite, ce qui excluait le socialiste portugais Vitorino, dont le nom a également été cité.

Au final, c’est bien un Portugais, de droite cette fois, qui est sélectionné et qui, semble-t-il, fait enfin l’unanimité après que la France et l’Espagne ont retiré leurs objections: José Manuel Durão Barroso semble être le seul à avoir passé le crible de ce tamis aux innombrables critères qui fait la particularité de cette sélection européenne.

L’envers de la médaille est que le successeur de Romano Prodi semble n’avoir été choisi que parce qu’il est celui qui suscitait le moins d’opposition, qu’il était, en quelque sorte, le plus petit commun dénominateur des Vingt-Cinq. Est-ce le profil qui convient le mieux au poste, à un moment où la fonction de président de l’Union européenne requiert une véritable autorité dont Romano Prodi a parfois manqué ?

La colère des socialistes européens

D’autorité, Durão Barroso n’en manque certes pas. Il passe même pour autoritaire dans son pays, ce qui ne veut pas dire qu’il soit toujours arrivé à se faire obéir de son remuant ministre de la Défense et rival, Paulo Portas, chef du PPE. Ce jeune (48 ans) chef de gouvernement conservateur a pourtant commencé sa vie politique à l’extrême gauche. En 1974, lors de la Révolution des Œillets, il était l’un des dirigeants du MRPP, un mouvement maoïste. Mais en 1980, il adhère au Parti social démocrate (PSD, centre droit) qu’il préside depuis 1999. Depuis deux ans, à la tête du gouvernement portugais, il a mené une politique libérale «dure» à l’intérieur, et atlantiste à l’extérieur. C’est lui qui, à la veille de la guerre d’Irak, avait accueilli aux Açores George Bush, José Maria Aznar et Tony Blair.

Un an plus tard, la France et l’Allemagne ne lui en tiennent pas rigueur et ont avalisé sa candidature. Celle-ci, pourtant, ne va pas sans remous. Le consensus des 25 gouvernements de l’Union ne s’étend pas aux socialistes européens qui contestent vivement l’idée même de consensus. Le PPE est certes le groupe le plus important au Parlement européen, mais il n’a pas la majorité et il est à prévoir que les socialistes mèneront la vie dure à Durão Barroso. Cela commence d’ailleurs à Lisbonne où le président de la République, le socialiste Jorge Sampaio a clairement fait comprendre que le remplacement du Premier ministre actuel par son dauphin, le maire de Lisbonne Pedro Santana Lopes était loin d’être une formalité et qu’il avait, lui aussi, son mot à dire. Or, lors des élections européennes du 13 juin dernier, les socialistes ont obtenu 44,5 % des voix contre 33,2 % seulement à la coalition gouvernementale.

Mais la grogne des socialistes européens, et notamment portugais, ne devrait pas remettre en cause le choix de José Manuel Durão Barroso ce mardi par le sommet extraordinaire convoqué par la présidence irlandaise, quelques heures seulement avant qu’elle passe le flambeau aux Pays-Bas pour les six mois à venir.

par Olivier  Da Lage

Article publié le 28/06/2004 Dernière mise à jour le 28/06/2004 à 09:53 TU