Rechercher

/ languages

Choisir langue
 

Arabie Saoudite

Les Saoudiens voteront à l’automne

Le Conseil consultatif, dont les membres sont à ce jour nommés par le roi. 

		(Photo: AFP)
Le Conseil consultatif, dont les membres sont à ce jour nommés par le roi.
(Photo: AFP)
Le gouvernement a confirmé la tenue d’élections municipales en septembre ou en octobre. Mais les détails sur les modalités du scrutin sont encore un mystère.

La confirmation est venue à temps pour lever les doutes: les Saoudiens voteront aux élections municipales à l’automne prochain. Le mois dernier, le roi Fahd, dans son adresse au Conseil consultatif (dont les membres sont tous nommés par le roi) avait confirmé la promesse faite en octobre 2003 de tenir prochainement des élections municipales, mais sans donner de date. Le caractère vague de cette promesse avait suscité un vif pessimisme chez les réformateurs saoudiens, d’autant qu’aucun préparatif visible ne venait étayer l’idée que le pouvoir s’apprêtait effectivement à tenir sa promesse.

Mais samedi dernier, le prince Moutaab ben Abdelaziz, ministre des Affaires municipales a publiquement confirmé que le scrutin se tiendrait bien comme prévu à l’automne, sans préciser davantage la date. Dans les treize provinces du royaume, les électeurs choisiront la moitié des membres des 178 conseils municipaux que compte le pays, l’autre moitié restant, pour le moment, composée de membres nommés par les autorités. À ce stade, rien n’est dit sur les conditions d’éligibilité ou d’électorat. En particulier, on ne sait toujours pas si les femmes seront autorisées à voter et à se porter candidates. Dans les monarchies voisines, le Koweït, où les pratiques électorales sont les mieux ancrées, refuse encore le droit de vote aux femmes. En revanche, le Bahreïn et le Qatar, où la pratique électorale est plus récente, ont ouvert le scrutin aux femmes, tant comme électrices que comme candidates. L’Arabie Saoudite est par ailleurs le seul pays de la région où les femmes n’ont pas le droit de conduire.

Les élections municipales qui doivent avoir lieu en septembre ou octobre prochain ont souvent été présentées comme les premières dans le royaume. Ce n’est pas tout-à-fait exact. Dans les années 20, alors qu’il venait de conquérir le Hedjaz (la province occidentale où se trouvent La Mecque et Médine), de tradition plus libérale que le centre de la Péninsule, le roi Abdelaziz Ibn Saoud avait autorisé la tenue d’élections municipales. La vérité oblige à dire que l’exemple n’a pas été renouvelé, ni dans le reste du pays, ni même dans le Hedjaz. D’autre part, il existe déjà une catégorie d’élections en Arabie : les élections aux chambres de commerce. Certes, cela ne concerne pas tous les citoyens, mais les chambres de commerce saoudiennes constituent depuis une vingtaine d’années un véritable contre-pouvoir institutionnel et ont déjà fait reculer le gouvernement sur de nombreuses réformes.

Le pouvoir s’engage dans les réformes à reculons

Mais en réalité, il s’agit bien du premier scrutin national de l’histoire du royaume. Cette annonce s’inscrit dans l’annonce de réformes faites par le prince héritier Abdallah et l’institution d’un Centre du dialogue national qui a déjà tenu trois sessions. Mais ces perspectives ont été assombries par l’arrestation au printemps dernier de réformateurs à l’initiative du ministre de l’Intérieur, le prince Nayef que l’on dit beaucoup moins favorable aux réformes que son demi-frère le prince héritier. Quant au dialogue national, il a été largement vidé de sa substance du fait que les religieux conservateurs y ont pratiquement monopolisé la parole, frustrant les modernistes de leurs espoirs.

La désillusion est telle que parmi les intellectuels saoudiens, le «Dialogue national» (al hiwar al watani, en arabe) a été surnommé par les persifleurs al khiwar al watani, ce qui peut se traduire par «le meuglement national» ! Les plus optimistes veulent croire qu’après l’élection au suffrage (universel) de la moitié des conseillers municipaux, la prochaine étape sera l’élection d’un tiers des membres du majlis ach choura, le Conseil consultatif, comme la presse saoudienne l’avait laissé entendre l’an passé. Mais depuis lors, à cause ou malgré les attentats terroristes, le pouvoir semble s’engager dans la réforme à reculons.



par Olivier  Da Lage

Article publié le 12/07/2004 Dernière mise à jour le 12/07/2004 à 14:47 TU