Rechercher

/ languages

Choisir langue
 

Algérie

Le général-major abandonne la politique

Le général, Mohamed Lamari, chef d'état major de l 'armée nationale populaire. 

		(Photo : AFP)
Le général, Mohamed Lamari, chef d'état major de l 'armée nationale populaire.
(Photo : AFP)
L’absence du général Mohamed Lamari du terrain militaire correspond, pour de nombreux observateurs, à un vrai départ de la scène politique. Par ailleurs, ce fait est considéré comme une évolution notable de la vie politique en Algérie.

Le général Mohamed Lamari a attaché son nom à l’exercice du pouvoir politique en Algérie. Il fait partie d’un cercle de généraux qui détiennent ce pouvoir et se convainquent de la légitimité de leurs action et choix pour le bien être de leur pays. L’armée en Algérie a toujours fait et défait le pouvoir. Son chef, en l’occurrence le général Mohamed Lamari, chef d’état-major de l’armée nationale populaire (ANP) a assumé ces prérogatives en devenant l’incontournable de la vie politique algérienne.  

Cette tradition de l’armée dépositaire du pouvoir politique en Algérie est née avec la guerre de libération nationale et a rapidement été éprouvée avec le premier coup d’Etat militaire en juin 1965 par lequel le colonel Houari Boumédienne, ministre de la Défense, avec le soutien de l’armée, prend le pouvoir. Mais avant cela, il y avait la mise à l’écart dès 1961 par les militaires du gouvernement provisoire de la République algérienne (GPRA), pour conduire le pays à l’indépendance. A la mort du président Boumédienne en décembre 1978, c’est un autre militaire qui se retrouve propulsé à la tête de l’Etat, le colonel Chadli Benjedid.

Une profonde crise politique en 1992 devait marquer le début de la carrière politique du général Mohamed Lamari. Lors d’un séminaire d’officiers débattant de l’avenir politique de l’Algérie on prête à cet officier supérieur d’avoir exigé du président Chadli Benjedid de démissionner. Il faisait partie du groupe restreint de généraux qui ont «pris leurs responsabilités» en annulant les élections législatives de décembre 1991, théoriquement remportées par les partis islamistes. Cet événement a plongé l’Algérie dans une longue période d’actes de terrorisme durement réprimés par l’armée. Le rôle politique de l’armée avec le chef d’état-major, le général Lamari s’est alors accru avec la lutte acharnée que l’Etat a livré contre le terrorisme.

Depuis 1993, Mohamed Lamari est considéré comme le grand patron de l’armée. Général de corps d’armée, le seul haut gradé à avoir les quatre étoiles, c’est encore lui qui œuvre pour l’installation d’un autre militaire, le général Liamine Zeroual, dans le fauteuil présidentiel. Ce  dernier a voulu se défaire du contrôle de l’armée pour exercer réellement son pouvoir de président de la République, mais la machine militaire sous la houlette du désormais tout puissant chef d’état-major écarte le président Zeroual du pouvoir. Le général Lamari, qui n’a jamais voulu exercer directement et personnellement le pouvoir a contribué à l’élection du civil Abdelaziz Bouteflika.

Le droit à la retraite

Avec ce dernier président, fin tacticien, diplomate et ancien ministre des Affaires étrangères du président Boumédienne, l’ANP commence par perdre du champ. Abdelaziz Bouteflika, fort des prérogatives que lui confère la constitution comme chef suprême des armées n’entend pas qu’on lui indique la ligne à ne pas dépasser. Le président Bouteflika se prévaut du suffrage de ses concitoyens pour réclamer l’exercice entier de son pouvoir. Méthodiquement, il a su exploiter les erreurs des uns et des autres pour provoquer quelques fissures dans l’édifice militaire. Au sein de l’armée des voix discordantes commencent par reprocher au général Lamari une certaine liberté de ton qui éloigne l’institution de son rôle fondamental.

Le général a perdu la bataille sur le terrain de l’intelligence politique, lorsqu’il a choisi de soutenir Ali Benflis, ancien Premier ministre, contre le président Bouteflika à l’élection présidentielle de mars 2004. Son autorité est depuis régulièrement ébranlée par le pouvoir dès qu’une occasion se présente. Il n’a pas été associé à la promotion de nombreux généraux et chefs de région militaire, mais il a surtout mal vécu le fait d’avoir été éloigné de la préparation de la visite, à la mi-juillet à Alger, de la ministre française de la Défense, Michèle Alliot-Marie. Officiellement, le général Lamari était en vacances. A 65 ans, son absence de la scène politique algérienne marque certainement ses intentions de faire valoir ses droits à la retraite.



par Didier  Samson

Article publié le 29/07/2004 Dernière mise à jour le 29/07/2004 à 16:15 TU