Géorgie
Conflit ouvert avec l’Ossétie du Sud
Carte : GéoAtlas/SB/RFI
De notre correspondante à Tbilissi
« Nous ne permettrons pas un nettoyage ethnique de la population géorgienne en Ossétie du Sud » a déclaré à la presse ce jeudi matin le président géorgien Mikhaïl Saakachvili avant une réunion du conseil de sécurité. Il a ajouté que le gouvernement géorgien ne laissera pas « reprendre la contrebande » sur le territoire ossète et ne « permettra pas à des forces extérieures d’entraîner la Géorgie dans un conflit militaire à grande échelle ».
De source géorgienne, les premiers coups de feu seraient partis ce jeudi matin à une heure depuis les villages ossètes de Prissi et Sarabouk vers quatre villages géorgiens situés en Ossétie, Tamarasheni, Achabeti, Kurta et Eredvi.
Les tirs de mortier, de bazookas et d’armes automatiques ne se sont apaisés qu’à l’aube, comme la veille. Irina Gagloéva, chef du Comité d’information de la République d’Ossétie fait état par téléphone de la destruction d’une centaine de bâtiments dans les villages ossètes de Dmenesi, Kokhati, Sarabouk, Kvarneti par des tirs de missiles et de mortiers depuis des villages géorgiens.
A Tskhinvali, deux jardins d’enfants et l’hôpital d’État auraient également été touchés. Par ailleurs cinquante-quatre civils auraient été blessés dont vingt deux grièvement qui ont été transportés à Vladikavkaz en Russie.
Le président Saakachvili a ajouté ce matin que « des bandes avaient tenté d'occuper un chemin conduisant vers les villages géorgiens des gorges de Didi Liakhvi, pour les occuper afin d'en chasser la population géorgienne ». « Il y avait sur place des soldats des troupes géorgiennes de maintien de la paix » dit-il, « qui ont résisté à cette attaque pendant plusieurs heures. Trois d'entre eux y ont trouvé une mort héroïque ».
Après s’être abstenu de réagir toute la journée de mercredi, les autorités géorgiennes se sont exprimées successivement ce jeudi, rappelant tour à tour leur intention de ne pas répondre « aux provocations des séparatistes ossètes ».
Le Premier ministre Zourab Jvania a insisté dans une conférence de presse sur la nécessité de rencontres politiques entre Tbilissi et Tskhinvali, mais aussi à Moscou, la Russie étant selon lui « intervenue directement dans les évènements de ce jeudi ». Il a également appelé à augmenter le nombre d’observateurs déployés par l’Organisation pour la Sécurité et la Coopération en Europe dans la zone de conflit.
« La Géorgie saura être assez sage », a ajouté Gogua Khaindrava, Ministre d’Etat en charge de la résolution des conflits, « pour résoudre le conflit par la voie de la négociation ». Là où la presse russe parle déjà de guerre ouverte, aucune des figures officielles géorgiennes n’emploie le mot.
Ces déclarations interviennent le lendemain d’une rencontre officielle à Moscou entre le Ministre de la défense géorgien Giorgi Baramidzé et son homologue russe Sergeï Ivanov. Les deux parties sont parvenues à un accord prévoyant notamment le retranchement des troupes russes basées en Ossétie du Sud vers Tbilissi. L’accord ne concerne pas les forces de maintien de la paix russes qui resteront elles postées dans la zone de conflit.
Guerre de l’information
Au cœur de la crise, une guerre de l’information entre les autorités de Moscou, de Tbilissi et de Tskhinvali, la capitale ossète. Communiqués contradictoires, dissimulation des faits, refus de s’adresser à la presse… la relation aux médias rappelle l’extrême duplicité de la position russe dans le conflit, et l’obligation pour les autorités géorgiennes de composer avec Moscou.
Mercredi, Géorgiens et Ossètes s’accusaient mutuellement d’avoir donné l’assaut. Ce jeudi 12 août, le représentant des services de presse des forces de maintien de la paix russes postées dans la zone du conflit, Nikolaï Baranov a déclaré que la partie ossète était bien l’initiatrice de l’altercation. Pourtant la veille encore, l’attaché de presse du ministère de la Défense géorgien Gouram Donadzé rapportait que ces dernières avaient défendu les positions ossètes durant la nuit en place de préserver la paix.
Côté géorgien, on répète sans le dire ouvertement que la résolution de ce conflit désormais ouvert dépendra de la position russe.par Claire Delessard
Article publié le 12/08/2004 Dernière mise à jour le 13/08/2004 à 09:47 TU