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Proche-Orient

Grève de la faim des détenus palestiniens

Les revendications de prisonniers portent sur l’amélioration de leur quotidien.  

		(Photo : AFP)
Les revendications de prisonniers portent sur l’amélioration de leur quotidien.
(Photo : AFP)
Le mouvement auquel près de 4 000 détenus doivent se rallier, vise à obtenir de meilleures conditions d’incarcération et notamment le rétablissement du droit de visite pour tous.

De notre correspondant dans les Territoires palestiniens

Allumer des barbecues sous les barreaux des prisonniers : c’est la parade imaginée par les autorités pénitentiaires israéliennes pour contrer un vaste mouvement de grève de la faim lancé dimanche par plusieurs milliers de détenus palestiniens qui protestent contre leurs conditions d’incarcération. Conscient que le fumet de la viande grillé ne suffirait pas forcément à faire fléchir les grévistes, les autorités ont aussi confisqué les postes de radio et de télévision dans les cellules, interrompu la vente de cigarette et la distribution des journaux et saisi des réserves de sel dissimulées par les prisonniers sous leur matelas pour s’alimenter en minéraux.

Le conflit, qui touche pour l’instant 1 500 Palestiniens répartis dans trois établissements doit s’étendre dans les prochains jours et rallier à terme, selon les organisateurs, la moitié des 8 000 prisonniers « de sécurité » détenus par Israël. Le conflit promet d’être dur car le gouvernement israélien a d’emblée écarté toute idée de concessions. « Pour ma part, ils peuvent faire la grève un jour, un mois et même mourir de faim, a déclaré le ministre de la Sécurité Intérieure, Tzahi Hanegbi. Ni moi-même, ni le Premier ministre, ni le gouvernement, ni l'administration pénitentiaire ne sont prêts au moindre compromis avec eux ».

Les grévistes réclament avant tout la levée de l’interdiction de visite qui frappe bon nombre d’entre eux, en violation de la Convention de Genève qui garantit ce droit. Selon le Comité international de la Croix-Rouge (CICR), les familles de la région de Naplouse par exemple, n’ont pas pu visiter leur proche emprisonné depuis des mois. « Raison sécuritaire », avance les autorités israéliennes. Fatheya Shallalda, une mère de Bethléem, n’a pas pu embrasser son fils depuis juin 2002, date de son incarcération pour des attaques contre les soldats. Elle a pu lui parler au téléphone et le voir, de loin, lors des audiences du tribunal militaire qui l’a jugé. Mais en deux ans et deux mois, elle n’a jamais obtenu de permis de visite. « A chaque fois que je dépose une demande, on me répond la même chose, dit-elle, les yeux baissés : Tu as élevé un terroriste, donc tu es une terroriste ».  

L’arrêt des fouilles au corps

Les revendications de prisonniers portent aussi sur l’amélioration de leur quotidien. Ils demandent l’arrêt des fouilles au corps, jugées « humiliantes », une nourriture de meilleure qualité, la suppression de la vitre de plexiglas qui les sépare de leur famille au parloir et la fin du mitard, la cellule d’isolement. A défaut de visite, ils plaident pour l’installation de téléphones publics dans les prisons. « Cette grève de la faim n’a pas un caractère politique, dit Hisham Abdel Razek, le ministre palestinien chargé du dossier des prisonniers. Il s’agit d’une lutte pour les droits fondamentaux ». Les gardiens israéliens ne partagent pas ce point de vue. « Ils ne réclament pas de téléphone pour dire bonjour à leur famille, affirme l’un d’eux, cité par le quotidien Haaretz. Ils en veulent pour ordonner des attaques terroristes ».

Les deux camps se préparent à un conflit de longue durée. Pour galvaniser l’opinion publique et remettre la cause des prisonniers au centre du débat politique palestinien, les organisateurs de la grève ont dressés des tentes de solidarité dans les grandes villes de Cisjordanie et de la bande de Gaza. Des manifestations sont également prévues et des familles de détenus pourraient joindre la grève à la fin du mois. Les autorités pénitentiaires de leur côté, ont déplacé les meneurs dans des prisons différentes, afin de désorganiser le mouvement. Des médecin sont aussi chargés d’évaluer la santé des grévistes et, au besoin, d’ordonner une alimentation de force. Au début des années 80, trois prisonniers avaient trouvé la mort des suites d’une grève de la faim. Selon le Comité international de la Croix-Rouge, le droit international interdit d’obliger un détenu qui ne le veut pas à se nourrir.

par Benjamin  Barthe

Article publié le 16/08/2004 Dernière mise à jour le 16/08/2004 à 12:45 TU