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France-Chine

Paris cherche à séduire les étudiants chinois

Semaine de l'enseignement supérieur en Chine du 23 au 31 octobre 2004.
Semaine de l'enseignement supérieur en Chine du 23 au 31 octobre 2004.
Quelques pays riches se disputent la formation des étudiants étrangers. L’idée est de retenir ensuite les meilleurs d’entre eux pour la recherche. Du 23 au 31 octobre, la France va en Chine « vendre » son système universitaire aux jeunes chinois dans le cadre d’un salon international. L’éducation est aussi en train de devenir un marché.

La France n’est pas la seule à participer à cette manifestation en Chine pour y vanter les mérites de son système universitaire. Depuis plusieurs années, les Etats-Unis, l’Allemagne, la Grande-Bretagne et la France sont en compétition pour attirer sur leur sol les étudiants étrangers. Tous ces pays sont en Chine pour ce salon de l’éducation.

Durant la décennie 90, le nombre de jeunes étrangers venant étudier dans les universités et les grandes écoles françaises a baissé. La France a réagi en créant, en 1998, l’agence EduFrance, réseau d’institutions publiques et privées qui dispose aussi de bureaux de promotion à l’étranger. L’agence a donc pour mission de faire connaître à travers le monde le système éducatif français. Depuis, grâce à ces opérations de communication, les statistiques ont remonté. En 2002, les universités françaises ont accueilli 25 000 jeunes qui commençaient leurs études, des jeunes qui s’ajoutaient aux 220 000 étrangers déjà en cours de formation en France. Un quart des doctorants en France sont des étrangers. La moitié des étudiants étrangers en France viennent d’Afrique, l’autre moitié, du reste du monde, avec une poussée de l’Asie, notamment de la Chine.

La France au troisième rang dans la compétition internationale

L’économie et les sciences sont les domaines qui attirent le plus ces jeunes étrangers qui viennent en France. C’est justement ce que souhaite l’Etat français pour pallier le déficit, essentiellement dans les filières scientifiques.Dans cette concurrence mondiale pour former les jeunes des pays émergents, l’Allemagne et la France se trouvent derrière les Etats-Unis et la Grande-Bretagne. Pour ces deux pays, la langue anglaise est dès le départ un atout. Pourtant, la chute est aujourd’hui vertigineuse pour les USA qui ont fermé leurs portes aux étudiants étrangers après les attentats de 2001. Pour des commodités de langue, ces jeunes se sont alors tournés vers le Royaume-Uni, l’Australie, et la Nouvelle-Zélande, qui commence à se positionner dans le secteur de l’éducation. Le Japon arrive lui aussi sur ce marché de la formation post-baccalauréat.

A eux seuls, les 5 grands, (Etats-Unis, Royaume-Uni, France, Allemagne, Australie) se partagent 80 % des étudiants étrangers. Tous ont pour objectif de garder les meilleurs puisque, dans tous les pays riches, la tendance est la même : le déficit de chercheurs, surtout dans les sciences. Les Etats-Unis ont d’ailleurs dans leurs laboratoires, à peu près 50% de chercheurs étrangers et la France en compte environ 10%. La plupart de ces chercheurs expatriés sont partis d’Inde ou de Chine. La majorité d’entre eux retourne tout de même au pays après la fin de leurs études. Mais après avoir passé plusieurs années dans un pays occidental, ils collaborent quasiment systématiquement avec les équipes scientifiques qu’ils ont rencontrées pendant leur formation.

Le prestige du diplôme occidental

Selon les dernières statistiques publiées par EduFrance, le taux de réussite des étudiants étrangers est généralement inférieur à celui des étudiants français, particulièrement dans les disciplines qui exigent une maitrise parfaite de la langue française. Cet obstacle est partiellement levé avec des formations dispensées en anglais. Un guide EduFrance fait le point, en anglais, sur ces filières. Il en existe 300, essentiellement dans le domaine du commerce. La sélection des étudiants étrangers se fait d’ailleurs en anglais. Pour les candidats sélectionnés, il y a ensuite une mise à niveau en français pendant un an avant de commencer les études.

Qu’il soit anglais, allemand ou français, le diplôme occidental a toujours plus de prestige auprès des jeunes étrangers, notamment les Chinois. Leur demande vis-à-vis de la France explose. Alors pour ce salon en Chine, la France envoie une importante délégation. Un site Internet a été créé spécialement, en français et en chinois (www.edufrance-china.com). Les entreprises françaises installées en Chine ont également leur stand pour montrer aux jeunes les possibilités de carrière quand ils rentreront au pays.

Pendant longtemps, les autorités chinoises ont empêché les jeunes de partir. Aujourd’hui elles y voient leur intérêt économique, au retour. L’immense majorité de ces jeunes Chinois part sans bourse. Ils appartiennent à la bourgeoisie naissante. D’autres, plus modestes, qui consentent à cet effort pour que leurs enfants réussissent. Des collectes sont parfois faites au sein de la famille ou dans le village pour payer les études du candidat au départ. C’est une sorte de soutien social informel, qui ne néglige pas non plus de faire appel à la diaspora. Un intermédiaire, un recruteur, qui coûte un peu d’argent à l’étudiant, permet à l’Etat de garder un œil sur ces échanges.

Mais il n’y a pas que la Chine. De la publicité va être faite durant l’année scolaire dans les lycées français de l’étranger. Près de 10 000 jeunes sont en classe de « terminale » dans tous ces lycées. Une brochure leur indique les démarches à faire pour venir en France et quelles sont les filières de formation.

Des universités gérées comme des entreprises

Si beaucoup de jeunes étrangers viennent étudier en France, la tendance actuelle est aussi à la création d‘unités universitaires hors de France. En général ces créations commencent par des contacts privilégiés entre universités. C’est le cas par exemple de la Rochelle et Marseille avec Kuala-Lumpur, en Malaisie. Une licence et un Master y ont été créés par des professeurs français, ou formés par des Français. Il y avait déjà des liens. Une maison du monde malais avait été ouverte à La Rochelle. Ensuite le réseau a fait son œuvre, mais dans des conditions économiques très différentes. L’université française se comporte alors comme un prestataire de services. Contrairement à la tradition française où l’Etat subventionne fortement les études supérieures, quand une université française ouvre une unité à l’étranger, l’étudiant et sa famille paient la formation en totalité, l’enseignement, les locaux… C’est le modèle anglo-saxon qui est appliqué. Les universités étrangères sont gérées comme des entreprises. Certaines universités françaises ne font pas payer leur service. Tout dépend de la demande du partenaire. Plusieurs dizaines de diplômes français ont été créés à l’étranger avec ce système à l’anglo-saxonne. Il en existe au Maroc (gestion), en Tunisie, au Liban, en Russie, en Syrie, au Mexique, en Roumanie, en Bulgarie, en Argentine (Master « environnement »). Le système a du succès car il revient quand même moins cher que de passer plusieurs années en France pour acquérir une formation. Ce système n’a cependant rien à voir avec l’aide  au développement de la France lorsqu’elle finance des universités dans des pays du Sud où les études sont quasiment gratuites.



par Colette  Thomas

Article publié le 23/10/2004 Dernière mise à jour le 23/10/2004 à 06:21 TU