Afghanistan
Les employés de l’Onu libérés
(Photo : AFP)
De notre correspondant à Kaboul.
« Il y a une histoire d’argent là-dessous », confie un journaliste afghan sous couvert d’anonymat. « Ca faisait déjà plusieurs jours que les ravisseurs et le gouvernement communiquaient discrètement. Ils sont finalement parvenus à un accord », ajoute-t-il. Argent ou pas, les otages sont libres. Il est six heures du matin, heure locale mardi, quand les kidnappeurs relâchent enfin Annetta Flanigan, Shqipe Hebibi et Angelito Nayan, juste à l’entrée d’un jardin public dans l’ouest de Kaboul. Directement pris en charge par l’Isaf, la force internationale de paix en Afghanistan, ils se retrouvent dans un hôpital militaire. Leur captivité aura duré trois semaines, trois semaines de rumeurs et d’inquiétude. Les otages n’ont finalement pas quitté la capitale afghane.
« Nous sommes très heureux », s’est exclamé le porte-parole de l’Onu en Afghanistan, Manuel de Almeida e Silva, avant d’ajouter : « Ils semblent en bonne santé et pas trop éprouvés par leur enlèvement, mais ils souhaitent quitter le pays au plus vite pour retrouver leur famille ». Enlevés le 28 octobre en pleine journée au centre de la capitale, les trois employés des Nations unies avaient participé à l’organisation des élections présidentielles. Un groupe taliban dissident, l’Armée des musulmans, a immédiatement revendiqué cette opération. Quinze jours durant, il a exigé le départ de l’Onu et des troupes étrangères, ainsi que la libération des tous les prisonniers afghans enfermés à Guantanamo et dans les bases américaines d’Afghanistan. Mais les ravisseurs ont à chaque fois repoussé leur ultimatum et souvent changé leurs exigences.
« Ni rançon, ni libération quelconque »
« Ils semblaient peu sûrs d’eux, confie un enquêteur. La pression exercée par les kidnappeurs est en fait rapidement retombée. Ce qui a permis à l’armée de rechercher discrètement les otages et au gouvernement de se sentir chaque jour un peu plus fort ». La confusion a longtemps régné sur l’identité des ravisseurs. Le gouvernement a même déclaré la semaine dernière qu’il ne croyait pas que les otages soient avec l’Armée des musulmans, mais qu’ils étaient certainement détenus par une bande criminelle à Kaboul. Des diplomates se demandent, de leur côté, si l’enlèvement n’a pas été effectué par des miliciens loyaux à un rival du président Hamid Karzai n’ayant pas digéré le résultat des élections du 9 octobre.
« Les talibans n’ont pas les moyens d’organiser une telle opération. Nous ne savons pas encore s’ils étaient effectivement derrière cet enlèvement, mais si c’est le cas, ils se sont forcément appuyés sur une bande maffieuse », affirme encore l’enquêteur. Mohammad Akbar Agha, chef du groupe présumé des ravisseurs, a cependant indiqué hier matin : « Au terme de l’accord avec le gouvernement, nous avons relâché les trois otages contre la libération de 24 de nos frères ». Ce que réfute catégoriquement le gouvernement afghan : « ni rançon, ni libération quelconque », a précisé au cour d’une conférence de presse le ministre de l’Intérieur, Ali Ahmad Jalili. « C’est par une pression constante exercée par notre armée et par les soldats américains que nous sommes parvenus à libérer les otages. Les ravisseurs ont eu peur », a-t-il ajouté.
Epaulés par des membres des services de renseignement afghans, les GI’s ont en effet perquisitionné plusieurs maisons à Kaboul, parfois violemment, utilisant notamment des roquettes. Une quinzaine de personnes ont été arrêtées et sont entendues depuis dimanche soir. A l’Onu, des bruits de couloirs font état d’une rançon.
par Eric de La Varène
Article publié le 23/11/2004 Dernière mise à jour le 23/11/2004 à 16:42 TU