Rechercher

/ languages

Choisir langue
 

France-Libye

Chirac rend visite à Kadhafi

Le président libyen Moammar Kadhafi exprime sa joie en accueillant son homologue français Jacques Chirac, le 24 novembre à Tripoli. 

		(Photo : AFP)
Le président libyen Moammar Kadhafi exprime sa joie en accueillant son homologue français Jacques Chirac, le 24 novembre à Tripoli.
(Photo : AFP)
La visite du chef de l’Etat français, Jacques Chirac, chez son homologue libyen, Mouammar Kadhafi, témoigne de la normalisation des relations entre les deux pays. C’est la première fois qu’un chef d’Etat français se rend en Libye depuis l’indépendance de ce pays en 1951.

En route pour le sommet de la francophonie au Burkina Faso, le président de la République française Jacques Chirac fait une escale de vingt-quatre heures à Tripoli. La normalisation des relations entre les deux pays valait bien cette escale. Jacques Chirac est accompagné par trois ministres de son gouvernement, Michel Barnier (Affaires étrangères), Gilles de Robien (Equipements, Transport et Tourisme) et François Loos (Commerce extérieur). Une forte délégation d’une vingtaine d’hommes d’affaires fait partie du voyage dont le Président du patronat international, François Perigot et de nombreux chefs d’entreprises (Total, Dassault aviation, Pharma plus, Gaz de France, etc.).  

Chose promise chose due, Jacques Chirac avait projeté de se rendre en Libye dès l’instant où Tripoli aura indemnisé les victimes françaises de l’attentat contre le DC-10 d’UTA en 1989. En raison de son devoir de solidarité à l’égard de l’Union européenne, il avait aussi conditionné ce voyage au règlement de l’indemnisation des victimes allemandes de l’attentat contre un bar de Berlin en 1986. La troisième condition posée par Jacques Chirac est la levée de l’embargo international contre la Libye. Dès la fin 2003, plus rien ne s’opposait plus à cette visite à laquelle les Libyens accordent beaucoup d’importance. « La France est une puissance mondiale dont le rôle est influent au sein de l’Union européenne », a déclaré le Premier ministre libyen Choukri Ghanem  qui a mené une diplomatie de réconciliation avec l’Europe. Tony Blair, le Premier ministre britannique, José Maria Aznar, ancien président du gouvernement espagnol, Silvio Berlusconi, président du Conseil italien, Gerhard Schröder, le Chancelier allemand et William Burns, le secrétaire d’Etat adjoint américain, ont tous rendu visite au guide de la révolution libyenne, en l’espace d’un an.

Le retour en grâce, méthodiquement organisé par le colonel Kadhafi, a surtout été amorcé en décembre 2003 au moment où la Libye avait officiellement renoncé à tous ses programmes d’armes de destruction massive. En janvier 2004, Tripoli signait un accord avec la France dans lequel les autorités libyennes s’engageaient à verser 170 millions de dollars aux familles des victimes de l’attentat du DC-10 d’UTA, dont la dernière tranche a été acquittée en juillet dernier. Plusieurs autorités libyennes se sont rendues à Paris pour relancer la coopération économique entre les deux pays. Le Premier ministre libyen, Choukry Ghanem promet le règlement intégral, avant la fin 2004, des arriérés dus par son pays à la France. Mohamed Ali Elhouej, le ministre des Finances, de passage à Paris le 22 novembre dernier a précisé à ses interlocuteurs français les détails du règlement, avant d’appeler les entreprises françaises à investir dans son pays. La Libye s’est engagée dans la voie de la privatisation de plusieurs secteurs d’activités qui suscitent la convoitise des Européens.

Le commerce change la donne

La visite de Jacques Chirac consiste aussi à convaincre les autorités libyennes de donner à la France une meilleure place dans le commerce de leur pays avec l’étranger. La France réalise 6,3 % de part de marché en Libye contre 6,9% pour le Royaume-Uni, 7,4% pour le Japon, 11,2% pour l’Allemagne, et 22% pour l’Italie (ancienne puissance colonisatrice). Les nouvelles orientations économiques de la Libye suscitent des appétits dans les industries d’hydrocarbure, de télécommunications, de transport ou d’électricité où 30 millions de dollars d’investissement sont potentiellement « récupérables ». De nombreuses compagnies européennes soumissionnent également pour la construction de la « Grande rivière » artificielle longue de 4 000 kilomètres de canalisations souterraines qui offriront un lit à l’eau douce extraite du Sahara jusqu’au littoral. Les réserves de pétrole, 47 milliards de barils (1,7 million de barils par jour) et de gaz, 54 000 milliards de pieds cubes (30 pieds cubes = 1 mètre cube), non encore exploités rassurent les investisseurs sur la solvabilité de la Libye.

Avant l’arrivée de Jacques Chirac à Tripoli, le guide libyen a accordé une interview au quotidien français le Figaro, dans lequel il adresse quelques piques à la France au sujet de sa présence militaire en Afrique (Côte d’Ivoire et Tchad).L’Elysée (la présidence française) souligne que la visite de Jacques Chirac vise à «ouvrir un nouveau chapitre dans les relations avec la Libye, un grand pays maghrébin, méditerranéen et africain ».



par Didier  Samson

Article publié le 24/11/2004 Dernière mise à jour le 24/11/2004 à 17:52 TU

Audio

Luis Martinez

Maître de conférence à Sciences Po et chercheur au CERI

«La Libye a une expertise dans la lutte anti-islamiste (...), elle a du pétrole (...), elle est un relais entre l'Afrique du Nord, le Moyen-Orient et l'Afrique sub-saharienne.»

[24/11/2004]

Articles