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Ukraine

Iouchtchenko, l'Européen

Le président ukrainien Viktor Iouchtchenko et le haut représentant de l'UE pour la politique extérieure, Javier Solana.(Photo :  AFP)
Le président ukrainien Viktor Iouchtchenko et le haut représentant de l'UE pour la politique extérieure, Javier Solana.
(Photo : AFP)
Après avoir réservé sa première sortie de chef d’Etat à la Russie, l’alliée « stratégique éternelle », le président ukrainien, Viktor Iouchtchenko engage une tournée européenne, où pense-t-il, se joue l’avenir de son pays.

« Notre voie d’avenir est celle d’une Europe unie. Nous appartenons, comme le peuple d’Europe, à une même civilisation. Nous partageons les mêmes valeurs. Notre place se trouve au sein de l’Union européenne. Nous ne sommes plus à la lisière de l’Europe. Nous sommes au centre de l’Europe », a proclamé Viktor Iouchtchenko lors de son investiture. Il ne fait pas mystère de son intention de soustraire son pays à la zone d’influence naturelle de la Russie. Au terme de sa visite éclair à Moscou, le 24 janvier, le président ukrainien a précisé que le projet russe de constituer un « marché commun » des anciens pays satellites soviétiques, par la Communauté des Etats indépendants (CEI), ne doit pas être un obstacle à l’ouverture de son pays à d’autres marchés. Le président russe, Vladimir Poutine, qui veut créer cet « espace économique commun » entre la Russie, la Biélorussie, le Kazakhstan et l’Ukraine, a ainsi vu ses offres poliment repoussées par Viktor Iouchtchenko. 

Le nouveau président ukrainien est un partisan du modèle économique développé au sein de l’Union européenne, qui lui rend bien. Elle avait exercé une pression  pour la tenue d’un troisième tour du scrutin présidentiel qui a finalement été favorable à Viktor Iouchtchenko, contre l’avis de la Russie de Vladimir Poutine. Pour le chef de l’Etat ukrainien, ce dernier soutien de l’UE apparaît comme l’ultime chance de sortir du giron russe et pour ne plus être « une zone tampon, ni un champ d’expérimentation pour quiconque », précise-t-il. L’Europe s’ouvre à lui. Mais cette Europe qui vient d’absorber dix nouveaux membres pour passer de quinze à vingt-cinq Etats membres, n’était pas préparée à cette hardiesse de l’annonce de la candidature de l’Ukraine.

Surprises mais pas étonnées

Surprises mais pas étonnées, les autorités de l’UE ont différemment réagi avant de rechercher des réponses consensuelles. L’élan du cœur a rapidement été supplanté par la realpolitik. « Nous en avons beaucoup parlé au sein de la Commission et considérons comme une vision réaliste pour l’avenir que l’Ukraine finisse par adhérer, sans pour autant proclamer aujourd’hui que nous avons une date ou une offre précise », a déclaré Margot Wallstrom, la vice-présidente de la Commission européenne. Cet enthousiasme a rapidement été tempéré par Javier Solana, le haut représentant de l’UE pour la politique extérieure. Il plaide plutôt pour un renforcement des relations bilatérales qui ne devrait, en aucun cas, être considéré comme un prélude à une quelconque adhésion. Pour se faire, il prône une « politique de voisinage » qui s’articulera autour d’une dizaine de points et déjà intitulée « plan d’action ».

Javier Solana, précise également qu’il soumettra, dès le 31 janvier prochain, à l’approbation des ministres des Affaires étrangères, quelques propositions pour des échanges entre l’UE et l’Ukraine. Il suggère, d’ores et déjà, l’étude de l’établissement d’une zone de libre-échange entre l’UE et l’Ukraine et le soutien de la candidature de l’Ukraine pour une adhésion à l’Organisation mondiale du commerce (OMC). L’UE veut également aider l’Ukraine à asseoir une économie de marché. Il est également question de revoir l’Accord de partenariat et de coopération qui arrive à échéance en 2008, pour en établir un autre aux vues des dernières évolutions politiques et économiques en Europe.

Pour Thierry Mariani, député français de l’Union pour un mouvement populaire (UMP) et président à l’Assemblée nationale française du Groupe d’amitié franco-ukrainien, l’éventuelle adhésion de l’Ukraine « sera sans doute un processus très long et qui prendra dix ou quinze ans », a-t-il souligné. Partenariat, échange, dialogue, voisinage, coopération, les Européens ne tarissent pas de vocabulaire pour bien exprimer les termes de la collaboration envisagée et pour faire entendre que l’Union européenne n’a pas vocation à s’élargir à l’infini. C’est pourquoi, il est de plus en plus question dans les couloirs de l’UE à Bruxelles qu’une réflexion approfondie soit conduite pour déterminer les frontières et le « type d’Europe » souhaitée. Mais le président ukrainien ne s’embarrasse pas de toutes ces réflexions et maintient son objectif « d’adhésion à l’Europe ». « Nous allons réorganiser le gouvernement afin que le processus d’intégration devienne réel », a-t-il déclaré devant le Conseil de l’Europe qui l’a reçu à Strasbourg, le 25 janvier.

Le 26 janvier, il participera aux commémorations de la libération du camp d’Auschwitz en Pologne, sera le 27 janvier à Bruxelles où il s’exprimera devant le Parlement européen avant de se rendre à Davos en Suisse au forum économique mondial, le 28 janvier. Il reviendra en Europe de l’ouest le 10 février prochain pour rencontrer le président de la Commission européenne, José Manuel Durao Barroso. Viktor Iouchtchenko veut marquer de près « le Plan d’action » pour l’Ukraine qui sera approuvé par l’UE le 21 février prochain.


par Didier  Samson

Article publié le 25/01/2005 Dernière mise à jour le 25/01/2005 à 18:12 TU

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Patrick Adam

Envoyé spécial de RFI à Strasbourg au siège du Conseil de l'Europe

«Iouchtchenko vient de présenter sa vision de l’avenir d’une Ukraine plus démocratique et qui dans bien des domaines répondra aux standards européens.»

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