Constitution européenne
Chirac à Barcelone pour le «oui»
(Photo: AFP)
En France, la campagne pour le « oui » n’a pas encore trouvé ses marques alors que le « non » gagne du terrain. Jacques Chirac, on le sait, a décidé de donner la parole aux Français sur cette question de la Constitution européenne. Si le président français s’est engagé pour le « oui », il n’a pas encore choisi la date de ce référendum qui pourrait être un scrutin risqué pour la majorité. En Espagne, Jacques Chirac vient défendre le « oui ». Et il est finalement le seul représentant de la classe politique européenne à s’afficher aux côtés du chef du gouvernement espagnol, le socialiste José Luis Rodriguez Zapatero, à l’occasion de « cet acte civique », grand messe organisée à Barcelone.
Des stars du football lisent des articles du nouveau traité
Le meeting prévu au départ avec Gerhard Schröder et Silvio Berlusconi se résume maintenant à un tête-à-tête franco-espagnol. A Barcelone, le président Chirac pourra cependant comparer les manières française et espagnole de populariser cette future constitution, texte plutôt rébarbatif. En France, des étudiants répondent déjà aux questions du public sur une hot-line dédiée au nouveau traité. En Espagne, des célébrités mondiales du football comme Zidane, Cruyff, ou Butragueno, qui ont fait toute leur carrière dans les clubs espagnols, ont enregistré des clips pour la télévision dans lesquels ils lisent des articles du nouveau traité. Toute la presse espagnole parle de la Constitution dont des exemplaires simplifiés ont été offerts aux lecteurs. Un grand marathon, des concerts, des manifestations sportives avec la participation de Miguel Indurain, le quintuple vainqueur du tour de France, sont organisés pour rendre l’idée du scrutin omniprésente.
Les sondages annoncent la victoire du « oui » en Espagne mais en organisant tous ces événements et cette réunion politique, José Luis Rodriguez Zapatero veut combattre l’abstention que ces mêmes instituts de sondage prévoient élevée. L’Espagne est le premier pays membre de l’Union à se lancer dans l’aventure du référendum. Les observateurs estiment que cette consultation sera sans histoire pour le Premier ministre socialiste espagnol, son parti, le PSOE et le Parti populaire conservateur de Mariano Rajoy, le successeur d’Aznar, étant tout deux pour l’adoption du nouveau traité. Le « non » n’est défendu que par les communistes et les écologistes espagnols mais il n’a pas vraiment de poids. De toute façon le référendum est consultatif, le Parlement espagnol aura le dernier mot. Cependant on voit mal les députés aller à contre-courant du résultat du référendum. Le « oui » étant annoncé, ce qui va compter c’est l’ampleur du signal envoyé par l’Espagne, premier pays à organiser un référendum, aux autres pays membres de l’Union.
Pour Schröder, pas de risque politique
Le président du conseil italien, Silvio Berlusconi, a fait défection pour raison de santé. Le chef du gouvernement allemand a, lui aussi, annulé sa visite à Barcelone pour cause de grippe. Mais pour Gerhard Schröder, ce traité ne présente pas de risque politique. L’Allemagne n’a pas choisi le référendum, le traité sera directement ratifié par les deux assemblées parlementaires. Le Bundestag votera en mai prochain, et le Bundesrat, la Chambre des Länder dominée par l’opposition, un mois plus tard. En Allemagne, le consensus est presque total dans les partis politiques sur l’adoption de ce nouveau texte européen. Seule une minorité de députés de la CSU bavaroise envisage de ne pas donner son aval au texte.
Ce « non » en a libéré d’autres
Parmi les 25 pays membres de l’Union, 11 ont prévu d’organiser un référendum pour adopter ou refuser la Constitution qui doit, en principe, entrer en vigueur le 1er décembre 2 006. A Barcelone, le chef du gouvernement espagnol et le président français se mobilisent pour défendre le « oui ». Le risque politique du référendum est probablement plus grand pour Jacques Chirac puisque le «non » français est en progression à gauche depuis que la CGT est entrée dans le camp des eurosceptiques, en raison des réticences sur la libéralisation des services européens prévue par la directive Bolkestein.
Ce « non » en a libéré d’autres, notamment chez les fonctionnaires et les enseignants. La FSU, première fédération représentative de la fonction publique, réfléchit et va peut-être donner des consignes de vote. Le SNES et l’UNSA, syndicats d’enseignants, tiendront comme prévu leur congrès avant le référendum et discuteront de la Constitution européenne, à laquelle il est de plus en plus reproché d’être trop libérale. Cette progression du « non » a son incidence sur les partis politiques. Au Parti socialiste, les partisans du « non » redressent la tête, les partisans du « oui » sont moins sûrs d’eux.
Même s’il ne veut pas que ce référendum ait des incidences sur la politique intérieure française, Jacques Chirac aura certainement en tête, à Barcelone, tous les risques du scrutin français dont la date n’est pas encore choisie.
En France, au Royaume-Uni, au Danemark, en République tchèque, et en Irlande, le « oui » est impératif pour que la nouvelle constitution soit adoptée.
par Colette Thomas
Article publié le 11/02/2005 Dernière mise à jour le 11/02/2005 à 17:14 TU