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Constitution européenne

La CGT rejoint le camp du «non»

Les membres du Comité national confédéral de la CGT (en photo, Bernard Thibault, secrétaire général de la CGT) ont adopté, par 81 voix pour, 18 contre et 17 abstentions le texte qui rejette le projet de Constitution européenne.(Photo : AFP)
Les membres du Comité national confédéral de la CGT (en photo, Bernard Thibault, secrétaire général de la CGT) ont adopté, par 81 voix pour, 18 contre et 17 abstentions le texte qui rejette le projet de Constitution européenne.
(Photo : AFP)
En adoptant un texte qui rejette le projet de Constitution européenne, le comité confédéral national de la CGT (Confédération générale du travail) a provoqué de nombreux remous. A l’intérieur même du syndicat français, puisque ce texte a été voté contre l’avis de son secrétaire général, Bernard Thibault, qui le dénonce. Au sein des organisations syndicales françaises et européennes, où la prise de position de la CGT sur une question politique aussi sensible ne fait pas l’unanimité. Mais aussi dans le monde politique, où l’on estime que cet appel à voter «non» pourrait jouer un grand rôle dans la campagne en vue du référendum sur la Constitution européenne.

Bernard Thibault ne voulait surtout pas que la CGT donne une consigne de vote pour le référendum sur la Constitution européenne. Il désirait simplement s’en tenir à proposer un avis syndical sur ce projet. Il n’a pas obtenu gain de cause. Les membres du conseil confédéral national (CCN) ont adopté, malgré son opposition, un texte qui rejette le nouveau traité constitutionnel. Le secrétaire général de Confédération a immédiatement marqué son désaccord en déclarant qu’il désapprouvait à la fois «le processus et la démarche». Il est même allé jusqu’à dénoncer «des carences en matière de démocratie interne et de respect des règles de la vie commune».

Le conseil confédéral national est composé des secrétaires des fédérations professionnelles et des unions départementales de la CGT, les cadres de l’organisation, qui avaient dans l’ensemble déjà manifesté leur opposition à la Constitution dans leur secteur respectif. Maryse Dumas, secrétaire confédérale du syndicat, a d’ailleurs estimé que la plupart d’entre eux avaient des «mandats impératifs» sur la question européenne, qui ont rendu impossible l’élaboration «d’une position commune». Elle a, d’autre part, insisté sur le fait que l’opinion des syndiqués était vraisemblablement «beaucoup plus complexe et diversifiée que ce qui a été voté par le CCN».

Quoi qu’il en soit, la direction n’envisage pas de revenir sur le texte adopté par le comité. Même si elle estime qu’il remet en cause les orientations de l’action de la Confédération décidées lors du congrès «d’ouverture» de la CGT, il y a deux ans. A cette occasion, le syndicat avait manifesté son intention de prendre ses distances avec le Parti communiste et de se désengager de la politique pour se recentrer sur l’action sociale. Jean-Christophe Le Duigou, secrétaire confédéral, a d’ailleurs manifesté ses craintes face à un possible retour en arrière sur ces questions. Il a déclaré redouter de voir de nouveau valorisées «les postures protestataires et le lien avec le politique». C’est pourquoi les thèmes de la stratégie et des objectifs de la CGT, mais aussi du fonctionnement interne de l’organisation, seront placés à l’ordre du jour de la prochaine réunion de la commission consultative fédérale, le 8 février. Dans l’espoir de remettre le syndicat sur la voie des réformes décidées il y a deux ans, donc de permettre une reprise en main de Bernard Thibault.

Le Parti communiste approuve

La prise de position de la CGT contre le projet de Constitution européenne ne laisse pas les autres organisations syndicales indifférentes. Le secrétaire général de la CFDT (Confédération française démocratique du travail), François Chérèque, a tout de suite estimé qu’elle était «mauvaise pour le syndicalisme français». Il a d’autre part expliqué qu’elle serait difficile à faire comprendre hors de l’Hexagone car «tous les autres syndicats européens vont appeler à soutenir ce traité». D’autant que la CGT a intégré, en 1999, la Confédération européenne des syndicats. Mais surtout, François Chérèque a mis en garde contre le risque de «confusion entre le climat social dans notre pays et le débat sur le traité constitutionnel».

Du point de vue des partisans du «non» à la nouvelle Constitution européenne, l’engagement de la CGT dans la bataille politique est, par contre, accueilli avec bienveillance. Marie-George Buffet, la secrétaire nationale du Parti communiste, s’en est immédiatement réjouie. Elle a déclaré : «Ce que je trouve formidable, c’est la mobilisation des salariés face à la politique libérale de Raffarin [le Premier ministre français] et face à une Constitution elle-même libérale que l’on veut nous imposer». Le socialiste Laurent Fabius, qui milite pour le «non» même si son parti a pris position en faveur du «oui», a d’autant plus apprécié le vote de la CGT que ce syndicat, qui regroupe environ 700 000 adhérents, est «le plus massif» de France. Quant à Georges Sarre du Mouvement républicain et citoyen (MRC), il a lui aussi salué la prise de position de la CGT.

Dans un contexte où les adversaires de la ratification de la Constitution se font de plus en plus entendre en France, le vote de la CGT contre le texte semble tout à fait à même de compliquer un  peu plus la tâche du gouvernement, qui entend pourtant bien convaincre les Français de la nécessité d’adopter le traité. Même si les sondages indiquent que le «oui» est toujours majoritaire, la part des indécis augmente. Et selon toute probabilité, c’est dans les couches populaires, où la CGT exerce la plus grande influence, que la campagne en faveur du «non» est susceptible de mobiliser largement.

par Valérie  Gas

Article publié le 04/02/2005 Dernière mise à jour le 04/02/2005 à 17:03 TU