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Tunisie

Le cyberdissident «Ettounsi» est mort

Le cyberdissident tunisien Zouhair Yahyaoui a été récompensé, en 2003 à Paris, du premier prix Cyberlibertés-Reporters sans frontières-Globenet.
(Photo : RSF)
Le cyberdissident tunisien Zouhair Yahyaoui a été récompensé, en 2003 à Paris, du premier prix Cyberlibertés-Reporters sans frontières-Globenet.
(Photo : RSF)
Zouhair Yahyaoui, fondateur du journal satirique en ligne TuneZine, est décédé à l’âge de 36 ans à Tunis, des suites d’une crise cardiaque, le dimanche 13 mars. Condamné en 2002 puis relâché après une année passée dans les geôles tunisiennes, pour avoir diffusé sur son site des informations critiques à l’endroit du régime de Ben Ali, Zouhair Yahyaoui, reste un symbole pour les défenseurs des droits de l’Homme.

Pour beaucoup, Zouhair Yahyaoui était une des voix de la liberté en Tunisie. Connu sur le Net sous le nom de «Ettounsi» (le Tunisien, en arabe), son site TuneZine a fait de lui l’internaute le plus célèbre de Tunisie. Il s’est fait connaître pour avoir publié sur Internet des informations sur la lutte en faveur des libertés et des documents de l’opposition. C’est en effet, lui qui a publié sur son site une lettre ouverte dénonçant «l’absence totale d’indépendance de la justice tunisienne», adressé au président de la République par le juge Mokhtar Yahyaoui, dont Zouhair est le neveu.

Le magistrat rebelle est alors révoqué pour avoir «enfreint le droit de réserve», mais le site tunezine.com poursuit ses publications en ligne et notamment son magazine satirique. Dans de nombreuses chroniques et pamphlets sur la situation politique, Zouhair Yahyaoui ne cesse de brocarder le régime du président Ben Ali. Peu de temps après sa création, la censure s’abat sur le site, les fans de «Ettounsi» reçoivent alors chaque semaine une liste d’adresses de serveurs relais (proxies) qui leur permettent d’accéder au magazine en ligne en dépit du blocage.

Des conditions de détention inhumaines

Le 4 juin 2002, le cyberdissident est arrêté à Tunis. Il est condamné en juillet 2002 à deux ans de prison ferme pour «propagation de fausses nouvelles» et «utilisation frauduleuse de lignes de connexion sur Internet». L’affaire qui n’a rien d’un procès relevant du droit commun (comme il est officiellement présenté), mais d’un procès politique pour délit d’expression, soulève un tollé des organisations de défense des droits de l’Homme en Tunisie et à l’étranger. L’association Reporters sans frontières (RSF) et Amnesty International protestent contre le jugement affirmant que l’internaute connu pour être «un fervent opposant au président Ben Ali» paie également le fait d’être le neveu du juge Yahyaoui.

Après trois grèves de la faim pour protester contre ses conditions de détention, il est remis en libération conditionnelle six mois avant l’expiration de sa peine. Lauréat du «Prix cyberliberté» qui lui est décerné en 2003 à Paris, Zouhair Yahyaoui reste très actif dans le tissu associatif, il aide notamment à la création d’un site web pour la Ligue tunisienne des droits de l’Homme (LTDH). C’est également avec cette association qu’il se rend à Genève en février dernier pour protester contre l’organisation de la seconde phase du Sommet sur la société de l’information (SMSI) à Tunis en novembre 2005. Son dernier acte de cyberdissident contre le régime de Ben Ali, avant que la mort ne le fauche à 36 ans.


par Myriam  Berber

Article publié le 14/03/2005 Dernière mise à jour le 14/03/2005 à 16:59 TU