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Irak

Un sunnite à la tête du parlement

L’élection de Hajem al-Hassani relance l’espoir d’un règlement de la grave crise politique que traverse le pays depuis les élections générales du 30 janvier.(Photo : AFP)
L’élection de Hajem al-Hassani relance l’espoir d’un règlement de la grave crise politique que traverse le pays depuis les élections générales du 30 janvier.
(Photo : AFP)
Après plusieurs semaines de tractations houleuses, les députés irakiens se sont finalement mis d’accord pour désigner président de l’Assemblée nationale transitoire le sunnite Hajem al-Hassani. Ils ont également élu à la tête de cette instance, qui doit rédiger d’ici le 15 août la nouvelle Constitution, deux vice-présidents, le chiite Hussein al-Chahristani et le kurde Aref Tayfour. Plus de deux mois après les élections du 30 janvier, dont le succès avait été salué par la communauté internationale, ces désignations ouvrent enfin la voie à la formation d’un nouveau gouvernement.

Bien que les sunnites aient massivement boycotté le premier scrutin de l’après-Saddam, c’est à un membre de cette communauté qu’est revenu la présidence de l’Assemblée nationale transitoire. Porte-parole du Parti islamique irakien –principale formation sunnite qui s’est retirée de la course électorale quelques jours avant le vote du 30 janvier–, Hajem al-Hassani a en effet obtenu le soutien de 215 députés sur les 241 présents alors que le parlement compte 275 sièges. Soucieux de mettre un terme aux divisions à l’origine du blocage politique qui prévaut depuis la proclamation il y a plus d’un mois des résultats des élections, le président de l’Assemblée a appelé toutes les confessions et ethnies d’Irak à «avancer la main dans la main». «Le peuple nous a accordé sa confiance, a-t-il déclaré une fois entérinée sa nomination. Nous devons donc mettre fin à toutes les corruptions financières et administratives, cesser tout jugement partisan, accorder notre attention à la souffrance de la population de Sadr City qui est inondée par les pluies et faire front devant le terrorisme».

Le choix de Hajem al-Hassani est loin d’être anodin. Et si les députés irakiens ont choisi de le désigner à la présidence de l’Assemblée nationale transitoire, c’est dans doute en raison de sa personnalité atypique. Agé de 51 ans, le nouveau chef du parlement irakien est originaire de Kirkouk, une ville pétrolière que se disputent kurdes, turcomans et sunnites. Docteur en organisation industrielle de l'université du Connecticut aux Etats-Unis, il a longtemps dirigé une compagnie d'investissement à Los Angeles. Au début des années 90, il a rejoint le Parti islamique irakien, l’un des principaux mouvements politiques sunnites, proche des Frères musulmans. Et bien que cette formation soit extrêmement disciplinée, Hajem al-Hassani a toujours refusé d’abandonner ses convictions. Il a ainsi refusé de quitter son poste de ministre de l’Industrie dans le gouvernement d’Iyad Allaoui lorsque son parti a décidé de claquer la porte pour protester contre l’assaut américain lancé en novembre dernier, avec l’aval du Premier ministre, contre la ville rebelle de Falloujah. Et alors que son mouvement a décidé de boycotter les élections du 30 janvier dernier, il a choisi de rejoindre la liste sunnite du président sortant Ghazi al-Yaouar et de participer au scrutin. Il est d’ailleurs l’un des cinq députés élus sur cette liste.

Les tractations se poursuivent

L’élection de Hajem al-Hassani à la tête de l’Assemblée nationale transitoire relance à n’en pas douter l’espoir d’un règlement de la grave crise politique que traverse le pays depuis les élections générales du 30 janvier. Car si ce scrutin a incontestablement été un succès en raison d’une forte participation –les Irakiens se sont rendus massivement aux urnes malgré le chaos sécuritaire– l’incapacité des politiques à s’entendre pour désigner les nouveaux maîtres du pays a largement hypothéqué ce succès. Les querelles sont d’ailleurs loin d’être terminées et les tractations sont actuellement toujours en cours dans la perspective de la formation du premier gouvernement élu de l’après-Saddam.

Mais les députés doivent auparavant élire à la majorité des deux tiers le Conseil présidentiel composé du nouveau chef de l’Etat et de ses deux vice-présidents. Le Kurde Jalal Talabani pourrait être désigné dès mercredi à la tête du pays. Un sunnite et un chiite doivent également être élus pour le seconder. Ce triumvirat aura ensuite deux semaines pour choisir un Premier ministre. Les deux principales forces qui siègent au parlement –les chiites et les Kurdes– se sont d’ores et déjà mises d’accord pour désigner à la tête du gouvernement le chiite Ibrahim al-Jaafari. Ce dernier aura également deux semaines pour former son cabinet qui doit être unanimement approuvé par le Conseil présidentiel avant d’être adopté à la majorité des deux tiers par les députés.

Le retard pris dans la désignation du chef du parlement, tout comme celui que risque de prendre la formation du gouvernement, font craindre un report de l’adoption de la Constitution. Celle-ci doit en effet être rédigé d’ici au 15 août prochain avant d’être ratifiée par référendum avant le 15 octobre. Mais il semblerait d’ores et déjà que le délai supplémentaire prévu en cas de blocages au moment de la rédaction de la loi fondamentale soit désormais ouvertement envisagé. Avant même d’être élu à la tête de l’Assemblée nationale transitoire, Hajem al-Hassani prédisait en effet un report de l’adoption de la Constitution. «Des questions sensibles –comme la place de la religion, question fondamentale pour les chiite, ou encore le fédéralisme, si cher aux kurdes– vont apparaître», avait-il en effet fait valoir.


par Mounia  Daoudi

Article publié le 04/04/2005 Dernière mise à jour le 04/04/2005 à 16:51 TU