Constitution européenne
Les Français ont tendance à dire «non»
(Photo : AFP)
Le quotidien Libération publiait ce lundi matin un nouveau sondage qui, pour la quatrième fois depuis le début du mois d’avril, donne le «non» majoritaire lors du scrutin de dimanche prochain. Selon cette enquête d’opinion réalisée par l’institut Louis Harris, 52% des personnes interrogées ont l’intention de rejeter le traité ; 48% de l’adopter. L’institut de sondage remarque que le «non» avait déjà atteint ce niveau dans un précédent sondage réalisé les 29 et 30 avril dernier.
Le décorticage de cette enquête d’opinion montre une fois encore que le «non» est majoritaire chez les électeurs de gauche. Qu’il s’agisse du Parti socialiste, du Parti Communiste ou des Verts, 57% des sympathisants de ces partis ont l’intention de rejeter le nouveau traité européen. L’opposition à la Constitution européenne atteint 60% des personnes interrogées se sentant une proximité avec l’extrême gauche.
Les deux gauches
A l’intérieur du camp des sympathisants du PS, le sondage de l’institut Louis Harris montre des intentions de vote égales entre le «oui» et le «non». Pour les spécialistes, ce partage reflète la fracture entre deux gauches. L’une estime qu’il faut aller de l’avant, prendre le traité constitutionnel tel qu’il est pour chercher ensuite à l’améliorer. L’autre gauche s’affiche antilibérale et craint, avec l’entrée en vigueur du nouveau traité, qu’une plus grande place soit laissée au marché et qu’il y ait un recul de l’Europe social.
On imaginait que le scrutin du 29 mai pourrait donner un état des lieux de l’opinion avant la grande échéance électorale de la présidentielle en 2007. Aujourd’hui, avec ce décalage annoncé dans l’électorat de gauche, le débat risque d’être très ouvert dès lundi prochain, bien avant l’élection du chef de l’Etat.
Si les Français votent majoritairement «non», les conséquences seront d’abord européennes. C’est pourquoi la Commission européenne indique qu’elle «n’a pas perdu l’espoir d’un «oui» français. Attendons les résultats», explique la porte-parole de l’instance dirigeante de l’UE. Ce lundi, deux nouveaux sondages ont continué de pronostiquer la victoire du «non» aux Pays-Bas. Le référendum est consultatif dans ce pays, le parlement aura la décision finale. A noter qu’une majorité de Danois a l’intention de voter «oui», selon un sondage Gallup. Au Danemark, le référendum sur la Constitution est prévu le 27 septembre prochain.
Chirac et Jospin
A six jours du scrutin français, les hommes politiques se mobilisent en faveur du «oui». Les instituts de sondage évaluent à 20% les personnes qui ont l’intention d’aller voter mais qui sont encore indécises. Une grande partie d’entre elles se trouve là encore parmi les sympathisants de gauche. Lionel Jospin, qui s’est retiré de la vie politique après son échec à présidentielle de 2002, est déjà venu au secours du «oui» à la télévision et dans des meetings. Mardi soir, le leader socialiste interviendra une nouvelle fois à la télévision pour convaincre les Français d’adopter le nouveau traité. Jacques Chirac, dont la popularité s’effrite, va lui aussi s’exprimer jeudi pour faire pencher la balance en faveur du «oui».
«L’intimidation ne marchera pas» auprès des Français (pour qu’ils votent «oui»), estime Marie-George Buffet. La secrétaire nationale du PCF explique que les partisans du « oui » vont «essayer de faire peur» aux personnes qui ont l’intention de voter «non» en leur disant «c’est oui ou le chaos». Marie-George Buffet assure que «la France ne sera pas affaiblie» si elle rejette la Constitution européenne.
La parole de Pasqua
De son côté Charles Pasqua, président du Rassemblement pour la France, estime que «la déroute du SPD en Allemagne préfigure la victoire du non au référendum de dimanche prochain». Le parti social-démocrate du chancelier allemand Gerhard Schröder «vient d’essuyer une déroute historique dans son bastion de l’Etat régional de Rhénanie du nord-Westphalie», a souligné l’ancien ministre de l’Intérieur. Longtemps proche du chef de l’Etat français, Charles Pasqua commente ainsi la défaite de Gerhard Schröder dans cette élection régionale : «cette sanction historique révèle qu’en Allemagne comme en France, les gros bastions des salariés, des employés, des ouvriers, ne supportent plus les règles ultralibérales imposées par l’Europe car ils ne supportent plus l’appauvrissement et la misère que celles-ci engendrent depuis tant d’années en dépit de toutes les promesses du contraire».
Jacques Delors, ancien président de la Commission européenne, a appelé les Français à «ne pas se tromper de scrutin», l’enjeu du référendum du 29 mai étant de savoir «si l’Europe va continuer ou être stoppée»par Colette Thomas
Article publié le 23/05/2005 Dernière mise à jour le 23/05/2005 à 18:00 TU