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Union européenne

Budget : des positions moins tranchées

Tony Blair et Jacques Chirac devraient aborder deux sujets qui fâchent: la Politique agricole commune et le rabais britannique au budget de l’Union.(Photo: AFP)
Tony Blair et Jacques Chirac devraient aborder deux sujets qui fâchent: la Politique agricole commune et le rabais britannique au budget de l’Union.
(Photo: AFP)
A deux jours de l’ouverture d’un sommet décisif pour l’Union européenne, les rencontres se multiplient pour discuter du montant du futur budget de l’Union. Ce mardi, Tony Blair est passé à Paris pour discuter avec Jacques Chirac de deux sujets qui fâchent, la Politique agricole commune et la ristourne britannique au budget de l’Union. Pour Tony Blair, le budget européen fait l'objet d'un «désaccord aigu». Jacques Chirac veut un accord «équitable et raisonnable»

La France et le Royaume-Uni ont engagé un bras de fer concernant le prochain budget de l’Union européenne. Ce budget doit être adopté par les 25 pays membres au cours d’un sommet, à Bruxelles, les 16 et 17 juin. Il s’agit de la première réunion des chefs d’Etat et de gouvernement européens depuis le choc des «non» français et néerlandais à la Constitution européenne. Le Luxembourg, qui préside l’Union jusqu’à la fin du mois, veut tout faire pour que ce sommet soit un succès afin de montrer la continuité de l’Europe. Tony Blair, qui se démarque souvent des choix faits par l’UE, prend la présidence le premier juillet. Face à une France et une Allemagne affaiblies par des consultations populaires, le chef du gouvernement britannique, estiment les spécialistes, devrait tenter de réorienter la politique de l’Union, de faire avancer des idées libérales qui ont donné des résultats dans son pays.

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La grande question à l’ordre du jour, c’est le budget des 25 pour la période 2007-2013. Bien avant sa défaite au référendum sur la Constitution, le président français avait commencé à critiquer la ristourne accordée depuis 1984 au Royaume-Uni. Les Britanniques bénéficiaient peu de la Politique agricole commune. Il avait été convenu qu’ils paieraient peu pour les agriculteurs européens. Pour Jacques Chirac, l’exception britannique ne se justifie plus, ce pays étant devenu l’un des plus riches de l’Union.

Tony Blair a répliqué sur la Politique agricole commune dont la France est la première bénéficiaire. Le Premier ministre britannique demande une remise à plat de cette PAC qui absorbe 40% du budget de l’Union.

Pour préparer ce sommet de Bruxelles et faire évoluer des propositions tranchées, les rencontres se sont multipliées ainsi que les petites phrases. Mardi à la mi-journée, est arrivé de Luxembourg une déclaration du ministre luxembourgeois des Affaires étrangères, un proche donc de Jean-Claude Junker qui préside actuellement l’Union européenne. Selon les déclarations de Jean Asselborn, les «choses bougent» dans la négociation sur le futur budget européen. «Je pense que les Anglais ont compris qu’ils doivent bouger. J’espère que l’on va pouvoir résoudre ce problème-là pour pouvoir s’occuper aussi d’autres problèmes qui restent», a indiqué le ministre luxembourgeois quelques heures après une rencontre entre Tony Blair et Jean-Claude Juncker. «Essayons de rester calmes. Nous savons que nous devons trouver une solution. Même les Anglais le savent. Je garde un certain optimisme», a conclu le chef de la diplomatie luxembourgeoise.

Quel sera le chèque de référence ?

Tony Blair est ensuite parti pour Paris pour y rencontrer le pourfendeur de la ristourne britannique. Paris affirme que le chèque reversé au Royaume-Uni a représenté en moyenne 4,6 milliards d’euros par an pour la période 1997-2003. La France paie près du tiers de cette somme rendue à Londres. En 2007, en raison de l’élargissement de l’Union et donc de l’augmentation exponentielle du budget, Paris devrait contribuer à hauteur de 7,1 million d’euros au financement de cette ristourne.

Le Premier ministre britannique a jugé «inacceptable» ce projet qui consiste à geler le rabais accordé à son pays par l’Union. C’est la solution de compromis qu’essaie pourtant de pousser le président en exercice de l’Union. Mais pour les Britanniques, une telle mesure leur ferait perdre «entre 25 à 30 milliards d’euros» entre 2007 et 2013. Si ce gel est négocié, de toute façon tout dépendra du chèque de référence. Sera-t-il à un niveau régressé comme le souhaite Jean-Claude Juncker  alors que le chèque représente actuellement 5,3 milliards d’euros par an ?

Menacé d’isolement au sein de l’Union européenne, Londres a contre attaqué sur la PAC dont la réforme n’est pas à l’ordre du jour du prochain sommet. Ces subventions sont «ultra-protectionnistes et empêchent le commerce avec le Tiers Monde», a déclaré l’ancien ministre britannique aux Affaires européennes Denis McShane, tout en indiquant que Londres était «prêt à faire des concessions». Pour sa part le président français, soutenu par le chancelier allemand, est déterminé à bloquer toute remise en cause de la PAC négociée jusqu’en 2012. Qu’il s’agisse de la France, de l’Espagne, de l’Allemagne, de l’Italie et enfin du Royaume-Uni, la réforme de la PAC de 2002 a déjà revu à la baisse les subventions agricoles pour permettre de financer les agricultures des dix pays entrants.

Encore sept ans pour la PAC actuelle

La Fédération nationale des syndicats d’exploitants agricoles (FNSEA), le plus important syndicat agricole français, a estimé mardi que la France n’a «aucune leçon» à recevoir de Londres en matière agricole. Dans un communiqué, la FNSEA a réaffirmé le «caractère non discutable de la consolidation des dépenses agricoles» jusqu’en 2012. «Le Royaume-Uni a sacrifié son agriculture. Il a très peu d’agriculteurs. Il n’a que des grosses exploitations. Qu’il ne vienne pas nous faire la leçon» a par ailleurs déclaré un responsable de la FNSEA. L’organisation agricole estime à moins de 100 000 le nombre d’agriculteurs au Royaume-Uni contre 578 000 en France, la France étant le premier producteur et le premier exportateur de denrées agricoles de l’Union européenne.

La visite à Paris de Tony Blair coïncidait avec une réunion à l’Elysée du «Pacte mondial des Nations unies» qui cherche à instaurer un code de bonne conduite des entreprises dans les pays en développement. Le président français en a profité pour dénoncer «la course au moins-disant social», estimant que «la vraie rationalité économique» reposait sur une mondialisation «humanisée» et «maîtrisée». Jacques Chirac a réaffirmé que la France avait pour objectif d’augmenter son aide publique au développement à 0,5% du PNB en 2007.      


par Colette  Thomas

Article publié le 14/06/2005 Dernière mise à jour le 14/06/2005 à 18:39 TU