Union européenne
Ralentissement au sommet
(Photo: Commission européenne)
Sommet européen du 16 et 17 juin 2005: détail de la photo de famille. (Photo: Commission européenne) |
Se revoyant pour la première fois après ces deux chocs électoraux, les leaders politiques de l’Union ont exclu toute «renégociation» de la Constitution. Pour ne pas la mettre à mort, ils se sont cependant mis d’accord pour prolonger jusqu’en 2008 les procédures de ratification. Chaque pays membre doit l’organiser, soit par voie parlementaire, soit par référendum, pour que cette Constitution entre en vigueur dans toute l’Union.
Des reports en cascade
Ce délai supplémentaire donné aux gouvernements a pour but d’enrayer la dynamique du non enclenchée par les référendums dans deux pays fondateurs de l’UE, la France et les Pays-Bas. L’annonce de ce délai a immédiatement entraîné le report de plusieurs scrutins prévus dans les mois à venir. Président en exercice de l’Union (jusqu’à la fin du mois de juin), le luxembourgeois Jean-Claude Juncker s’est prononcé pour le report de la consultation prévue le 10 juillet dans son pays. «Il faut donner du temps au temps», a-t-il résumé, justifiant dans le même temps le choix des 25 de se donner une «période de réflexion».
Le Danemark, qui avait programmé un référendum en septembre prochain, le reporte sine die. «La base pour un référendum n’est pas suffisamment claire. Il n’y a pas de date pour un nouveau référendum», a déclaré le Premier ministre Anders Fogh Rasmussen.
«Nous reportons notre ratification jusqu’à nouvel ordre», a annoncé de son côté le chef du gouvernement suédois Göran Persson. Jusqu’à présent, un vote du Parlement suédois sur le traité était prévu en décembre.
Même décision pour la Finlande. Le chef du gouvernement Matti Vanhanen a indiqué que les parlementaires finlandais ne se prononceraient pas comme prévu fin 2005-début 2006 sur le texte. Le Premier ministre finlandais a dans le même temps annoncé un «débat en profondeur» dans son pays sur le texte. « Aucun des dirigeants européens n’a remis en question le besoin d’une Constitution. Mais il est aussi devenu évident qu’on n’a pas besoin de «non» supplémentaires» après les «non» français et néerlandais, a souligné Matti Vanhanen.
Au Portugal, c’est un référendum qui était prévu en octobre. Le Premier ministre José Socrates a fait part du report de la consultation populaire.
A son retour à Prague, le Premier ministre tchèque Jiri Paroubek va proposer aux partis politiques de son pays de repousser fin 2006 ou début 2007 la consultation sur la Constitution européenne. Le gouvernement tchèque n’avait de toute façon pas encore décidé comment le pays allait ratifier le nouveau traité.
L’Estonie, à contre-courant
En Irlande, le gouvernement ne s’est pas encore prononcé mais la presse affirme que le référendum prévu en 2006 va être repoussé.
Sept gels de ratification et dans le même temps, l’Estonie, à contre-courant de ses partenaires, va poursuivre comme prévu le processus qui doit intervenir l’automne prochain au Parlement. « L’Estonie ne peut pas déclarer mort le traité constitutionnel maintenant. Dix pays l’ont déjà approuvé et c’est une preuve suffisante que c’est un bon texte », a déclaré le Premier ministre estonien Andrus Ansip.
Lituanie, Hongrie, Slovénie, Espagne (référendum), Italie, Grèce, Slovaquie, Autriche, Allemagne, Lettonie et Belgique (en cours) : onze pays ont ratifié le texte avant les rejets français et néerlandais (sauf la Lettonie juste après).
Le «blues» de l’élargissement
L’autre volet politique du sommet, c’est l’élargissement. « On sent comme un blues sur l’élargissement », a déclaré Olli Rehn, commissaire européen à l’Elargissement. « La position de la Commission est que nous devons être prudents sur les nouveaux engagements d’élargissement mais que nous nous tenions en même temps aux engagements existants », a expliqué Olli Rehn.
La « feuille de route » arrêtée en 2004 concernant la Roumanie, la Bulgarie, la Turquie, les pays des Balkans, reste inchangée. « Les engagements qui ont été pris ces dernières années sur l’élargissement de l’Union seront respectés », assure Jean-Claude Juncker, président en exercice de l’Union.
Malgré ce volontarisme affiché, les responsables politiques européens savent que l’élargissement et en particulier la candidature de la Turquie ont joué en faveur du «non». A Bruxelles, le président français a d’ailleurs posé la question de la poursuite de l’élargissement dans une Europe en panne de traité. «Dans cette situation nouvelle, l’Union peut-elle continuer à s’étendre sans que nous ayons les institutions capables de faire fonctionner efficacement cette Union élargie ?» a demandé Jacques Chirac. Un autre sujet de désaccord avec Tony Blair qui plaide pour un élargissement à la vitesse grand V.
par Colette Thomas
Article publié le 17/06/2005 Dernière mise à jour le 17/06/2005 à 15:24 TU