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Allemagne

Schröder joue la défiance pour retrouver la confiance

Gerhard Schröder au Bundestag et le ministre des Affaires étrangères, Joschka Fischer (à dr.).(Photo: AFP)
Gerhard Schröder au Bundestag et le ministre des Affaires étrangères, Joschka Fischer (à dr.).
(Photo: AFP)
Gerhard Schröder a obtenu un vote de défiance de la part des députés du Bundestag, la chambre basse du Parlement. Le chancelier allemand peut donc désormais engager la procédure visant à dissoudre cette assemblée et à convoquer, avant la date prévue, des élections législatives. Après plusieurs défaites électorales importantes et face à l’opposition manifestée contre son programme de réformes socio-économiques, il espère pouvoir relancer la machine et trouver une nouvelle dynamique politique en demandant aux électeurs de revenir aux urnes plus tôt que prévu. Cette décision apparaît à certains comme le geste courageux d’un responsable qui tire les conclusions de ses échecs, à d’autres comme une manœuvre de pure politique politicienne.

Gerhard Schröder est satisfait, il a obtenu la défiance. Le chancelier allemand qui avait sollicité ce vote hostile auprès des députés, a été entendu par 296 d’entre eux, alors 151 autres ont refusé de lui donner satisfaction en choisissant de voter la confiance et que 148 se sont abstenus. Si le chancelier allemand a demandé aux membres du Bundestag de voter contre son gouvernement, c’est pour pouvoir engager la procédure qui devrait lui permettre de convoquer de nouvelles élections législatives avant la fin de l’année 2005. Gerhard Schröder a donc réussi à franchir la première étape institutionnelle vers le scrutin anticipé qu’il appelle de ses vœux. La suite ne dépend, en revanche, plus de lui mais du président allemand Horst Köhler.

C’est à ce dernier que revient de décider si l’organisation des législatives est justifiée ou non. Il doit faire connaître son choix définitif dans un délai de 21 jours. S’il estime que la procédure engagée par le chancelier pour provoquer un scrutin anticipé n’a pas lieu d’être, Gerhard Schröder se verra dans l’obligation de démissionner et de céder la place à un autre représentant du parti social-démocrate (SPD) à la tête du gouvernement pour terminer le mandat (jusqu’en 2006). Si, au contraire, le président juge que la convocation des électeurs s’impose, il autorisera la dissolution de la chambre basse du parlement. Et un scrutin devra être organisé dans les 60 jours.

Les Allemands approuvent la convocation d’élections anticipées

Il est difficile de savoir quelle sera la décision du président allemand, mais le fait que la plupart des formations politiques se trouvent désormais sur la même ligne que Gerhard Schröder et demandent l’organisation d’élections anticipées, devrait incontestablement peser sur son choix final. D’autant que les sondages montrent que la population voit, elle aussi, d’un bon oeil l’organisation de ces élections. Entre 71 % et 82 % des électeurs approuvent l’idée de la dissolution.

Cela ne veut néanmoins pas dire qu’il y a unanimité. Un certain nombre d’oppositions se sont aussi manifestées vis-à-vis de cette position. Elles sont venues, par exemple, du SPD mais aussi des Verts qui font partie de la coalition qui soutient Gerhard Schröder. Un député de ce dernier parti, Werner Schultz, a même annoncé son intention de déposer un recours devant la cour de Karlsruhe pour contester la constitutionnalité de cette procédure. Mais même dans une telle hypothèse, il paraît peu probable que la cour rejette la demande du chancelier qui aura tout loisir d’invoquer l’existence de précédents puisque Helmut Kohl en 1983 et Willy Brandt en 1972 ont réussi à obtenir une dissolution par le même moyen en utilisant l’article 68 de la Loi fondamentale.

Désavoué par plusieurs échecs électoraux cuisants, dont le dernier a fait perdre au mois de mai au SPD le plus grand Etat régional d’Allemagne, la Rhénanie du Nord-Westphalie qui était l’un de ses principaux fiefs, Gerhard Schröder a décidé de jouer son va-tout en annonçant immédiatement son intention de mettre un terme à la législature en cours. Il a justifié cette décision par l’incapacité dans laquelle il se trouvait de poursuivre sa politique de réforme (allocations chômage, sécurité sociale…), cible de tous les mécontentements, sans avoir obtenu une «nouvelle légitimation» de son action par les urnes. Il est vrai que le chancelier ne peut s’appuyer que sur une très faible majorité au Bundestag (4 voix), et se trouve en minorité au Bundesrat. La chambre haute du Parlement allemand qui représente les Länders (régions) et peut bloquer l’adoption d’un grand nombre de textes législatifs est, en effet, dominée par les conservateurs de l’Union chrétienne démocrate (CDU) et de l’Union chrétienne sociale (CSU).

Quelle que soient les motivations de ce coup politique –volonté de remettre en cause son mandat en raison de l’impopularité de son action ou de tenter une manœuvre pour essayer de rétablir une situation ingérable en dramatisant les enjeux-, le chancelier allemand prend des risques. Car tous les sondages placent l’opposition conservatrice chrétienne en tête en cas de scrutin. Le SPD n’est, pour le moment, crédité que de 26% des intentions de vote contre 47% à la CDU d’Angela Merkel, concurrente officielle de Gerhard Schröder à la fonction de chancelier. A demander aux électeurs de «clarifier» la situation dans l’espoir d’obtenir à nouveau leur confiance, le chancelier pourrait clairement se retrouver sur la touche.


par Valérie  Gas

Article publié le 01/07/2005 Dernière mise à jour le 01/07/2005 à 18:24 TU

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Thierry Parisot

Journaliste à RFI

«Gerhard Schröder a gagné son pari : il a perdu la confiance du Parlement.»

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