Attentats de Londres
Une enquête difficile
(Photo : AFP)
A en croire le Daily Mail et The Independant, deux quotidiens britanniques, Scotland Yard a transmis aux polices européennes une demande d’information sur un islamiste marocain, Mohammed al-Guerbouzi. Cet homme est soupçonné d’être l’un des chefs du Groupe islamique combattant marocain (GICM), qui serait impliqué dans les attentats de Casablanca en mai 2003, et de Madrid, le 11 mars 2004. Il a obtenu l’asile en Grande-Bretagne dans les années 80 et a échappé jusqu’ici à plusieurs demandes d’extradition, de la part du Maroc notamment. Guerbouzi serait lié au prédicateur radical d’origine palestinienne Abou Qatada, soupçonné d’être le chef spirituel d’al-Qaïda en Europe et aurait été en contact téléphonique avec l’un des exécutants des attentats de Madrid, Jamal Zougam. Selon les deux journaux, Guerbouzi aurait disparu de son domicile de la banlieue de Londres depuis vendredi.
Les autorités britanniques n’ont pas réagi à la suite de la diffusion de ces informations. Pour le moment, elles indiquent simplement qu’il n’y a eu aucune arrestation en liaison avec les attentats et qu’elles examinent «tous les éléments d’information» pour faire avancer l’enquête. Parmi ces éléments, les policiers étudient la nouvelle revendication des attentats de Londres, intervenue samedi par le biais d’un site internet. Elle est signée des «Brigades Abou Hafs al-Masri - division Europe». Le nom de ce groupe fait référence à un chef d’al-Qaïda tué en octobre 2001 en Afghanistan. Et c’est la même brigade qui avait revendiqué les attentats de Madrid. Dans leur communiqué, les terroristes promettent «de nouvelles attaques» dans les prochains jours contre «ceux qui ont déclaré la guerre à l’islam et aux musulmans». Reste à savoir si cette revendication, ou celle diffusée par un autre groupe, «al-Qaïda-jihad en Europe», dès les heures qui ont suivi les explosions, peut être authentifiée. De ce point de vue, les déclarations à un journal portugais d’un prédicateur islamistes basé à Londres, Omar Bakri, juste après les attentats de Madrid, ont une résonance particulière. Il avait, en effet, déclaré qu’un groupe appelé «al-Qaïda en Europe», installé à Londres, y préparait «une grosse opération».
Recouper les indicesLe travail mené par les enquêteurs sur les lieux des attentats permettra peut-être de recouper les indices, de confirmer une piste ou d’établir des liens entre les différentes hypothèses. L’examen des carcasses des wagons du métro mais aussi du bus qui ont explosé a déjà permis d’apprendre un certain nombre de choses. La police a ainsi pu se rendre compte que les trois explosions qui ont eu lieu dans le métro ont été quasi-simultanées, contrairement à la première hypothèse selon laquelle elles s’étaient échelonnées sur près d’une demi-heure. En fait, elles ont eu lieu dans un délai de «50 secondes» au maximum. Seule l’explosion du bus a eu lieu environ une heure plus tard. Cette simultanéité incite les enquêteurs à penser que les bombes ont été déclenchées par une minuterie et non manuellement.
Des indications sur la taille des engins (moins de 5 kilos) ont aussi permis de comprendre que l’explosif utilisé était forcément très puissant et en aucun cas de fabrication artisanale. Les dégâts occasionnés par les explosions sont tellement importants qu’il ne peut s’agir que d’un explosif industriel ou militaire. La nature de cet explosif, du détonateur et la manière dont la bombe a été fabriquée, sont autant d’éléments susceptibles de permettre de savoir quel groupe est à l’origine de l’attaque ou a contrario d’écarter un suspect potentiel. Mais les investigations pour recueillir les indices sont très difficiles, notamment dans le métro où certains wagons détruits par les explosions sont encore inaccessibles.
Identifier les victimesAu-delà des éléments matériels, les enquêteurs comptent beaucoup sur l’examen des enregistrements des caméras de surveillance implantées dans les rues de Londres, dans les bus ou le métro. Plusieurs milliers d’appareils sont ainsi dispersés dans la capitale britannique et les policiers ont déjà saisi toutes les cassettes vidéo disponibles pour les visionner dans l’espoir de pouvoir identifier les responsables des attentats sur les films.
La police doit aussi effectuer un autre travail très douloureux : celui de l’identification des victimes. Pour le moment, les autorités n’ont communiqué aucun nom, ni même un bilan exact des décès car tous les corps n’ont pas encore pu être extraits des wagons où ils sont incarcérés. Il n’y a plus d’espoir de retrouver des survivants mais il n’est pas encore possible d’affirmer que d’autres cadavres ne seront pas découverts. Cette attente est très difficile pour certaines familles à la recherche de proches dont elles sont sans nouvelle depuis le jour des attentats. Une vingtaine de personnes ont ainsi disparu sans laisser de traces, le 7 juillet à Londres.
par Valérie Gas
Article publié le 09/07/2005 Dernière mise à jour le 09/07/2005 à 18:44 TU