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Sénégal

Les proches d'Idrissa Seck craignent pour sa vie, la police rassure

Sidiki Kaba, le président de la FIDH, a annoncé sa décision de rejoindre le collectif des «<EM>amis d'Idy</EM>».(Photo : AFP)
Sidiki Kaba, le président de la FIDH, a annoncé sa décision de rejoindre le collectif des «amis d'Idy».
(Photo : AFP)
Les alliés de l'ancien Premier ministre sénégalais, craignant pour sa vie, ont lancé le week-end dernier une campagne d'alerte demandant à préserver son «intégrité physique». La Division des investigations criminelles (DIC), où il est retenu depuis vendredi, rassure: «Idrissa Seck se porte bien».

De notre correspondante à Dakar

«Il ne peut pas vous parler parce qu'il est au secret», mais «il se porte à merveille, il se repose normalement», a déclaré lundi soir le chef de la DIC, le commissaire Assane Ndoye. «Je suis responsable aussi bien de sa sécurité que de sa santé. (...) Il est en parfait état de santé», a ajouté le commissaire Ndoye, s'exprimant à l'antenne de la télévision publique sénégalaise (RTS). Ce qui a poussé le policier à sortir d'un silence médiatique observé depuis le déclenchement de ce que la presse appelle maintenant l'«affaire Idrissa Seck» ? A l'en croire, c'est «la dimension de l'affaire» - qui passionne la population – «et également le statut du mis en cause», ex-fils spirituel et ex-bras droit du président Abdoulaye Wade qui l'a limogé en avril 2004 après environ 17 mois à la tête du gouvernement.

En réalité, pour les observateurs, la campagne dite d'«alerte précoce» lancée dimanche par un collectif appelé «Les amis d'Idy» (du surnom de l'ex-Premier ministre) n'est pas étrangère à la déclaration du chef de la DIC. Ce collectif, dont l'ancienne ministre Awa Guèye Kébé est une membre active, a entrepris d'expliquer les raisons de ses craintes à la classe politique, aux diplomates accrédités à Dakar, à la société civile, aux responsables religieux, en se fondant sur les «messages» lancés par M. Seck avant de répondre à la convocation de la DIC, le 15 juillet. «J'entre dans leurs mains (des policiers, ndlr) en excellente santé physique et mentale. (...) Donc, tout ce qui m'arrivera sera de leur totale et entière responsabilité», avait notamment déclaré M. Seck, en excluant toute idée de suicide, et en donnant mandat à ses avocats de veiller à son «intégrité physique et morale».

«Sauver» Idrissa Seck

Efficacité de l'«alerte précoce» ou concours de circonstances ? En tout cas, depuis dimanche, des voix se joignent à celles des «amis d'Idy» pour, en quelque sorte, demander à «sauver» Idrissa Seck, comme le soldat Ryan. L'avocat sénégalais de renom Me Sidiki Kaba, par ailleurs président de la Fédération internationale des ligues des droits de l'Homme (FIDH), a annoncé sa décision de rejoindre les rangs de ses défenseurs. Des responsables de l'opposition se sont également dit «préoccupés» pour Idrissa Seck. Certains, dont Moustapha Niasse, autre ancien Premier ministre et leader de l'Alliance des forces de progrès (AFP), ont expliqué qu'il ne s'agissait pas d'un soutien à l'homme politique, mais de préoccupations pour «le citoyen sénégalais (et) le père de famille».

Ce sont sans doute ces aspects qui ont également poussé lundi plusieurs personnes à se rassembler spontanément devant la DIC pour manifester leur sympathie à Idrissa Seck, lorsqu'elles l'ont aperçu dans la cour. Selon les explications du commissaire Ndoye, il était sorti «se dégourdir les jambes». Et ce n'était nullement une mise en scène pour faire taire les rumeurs sur d'éventuels dangers courus par Idrissa Seck, a assuré le chef de la DIC. «M. Seck a été retenu ici (à la DIC, ndlr) depuis quelques heures. Il est tout à fait normal qu'il puisse se dégourdir les jambes, c'est une question d'hygiène. (...) Si les gens avaient des doutes ou des inquiétudes par rapport à cela, ils sont maintenant rassurés. Qu'ils sachent qu'on est une police très légaliste, respectueuse des droits de l'Homme et du citoyen», a ajouté le commissaire Ndoye.

«Aucun détail» sur l'enquête

Interrogé sur l'enquête, il a indiqué qu'il ne pouvait en communiquer «aucun détail». «(Elle) est en cours, et suit son cours correctement». Pour rappel, Idrissa Seck est accusé par le président Wade de malversations financières portant sur plusieurs milliards de FCFA à la faveur de travaux entrepris à Thiès (70 km à l'est de Dakar) dont l'ex-Premier ministre est l'actuel maire. Au lendemain de sa convocation à la DIC, le samedi 16, le parquet a annoncé qu'il avait été placé en garde à vue dans le cadre d'une enquête ouverte suite à «des informations faisant état d'activités susceptibles de constituer des infractions d'atteinte à la sûreté de l'État», sans donner de précisions sur ces activités et infractions.

Ses avocats disent qu'ils n'ont pas accès au dossier et qu'ils ignorent la nature exacte des faits qui lui sont reprochés. L'un d'eux, Me Doudou Ndoye, a affirmé à l'Agence France-Presse qu'ils ne peuvent assister à l'audition de leur client au stade actuel de «l'enquête préliminaire» de police. Quant à la garde à vue, sa durée légale de 48 heures renouvelables peut être portée, pour les cas d'«atteinte à la sûreté de l'État», à deux fois quatre jours, soit huit jours au total. «Durant ce laps de temps, le parquet peut décider de mettre Idrissa Seck en prison ou le remettre en liberté», a expliqué Me Ndoye.

Pour les journaux privés, l'«affaire Idrissa Seck» prend les tournures d'un feuilleton politico-judiciaire qui n'est pas près de connaître son générique de fin. Sud Quotidien semble en résume les premiers épisodes avec ses titres en deux mots, barrant la Une: il y a d'abord eu «La rupture», ensuite «L'étau», puis «La trappe», suivie de «La traque».


par Coumba  Sylla

Article publié le 19/07/2005 Dernière mise à jour le 19/07/2005 à 11:21 TU