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Nations unies

Le faucon John Bolton ambassadeur des Etats-Unis

En privé, beaucoup de fonctionnaires onusiens avouent être consternés par la nomination de John Bolton, qui marque, craignent-ils, un durcissement de l'administration Bush.(Photo : U.S. State Department )
En privé, beaucoup de fonctionnaires onusiens avouent être consternés par la nomination de John Bolton, qui marque, craignent-ils, un durcissement de l'administration Bush.
(Photo : U.S. State Department )
Le président George Bush a contourné les réticences du Sénat en promulguant un décret pour nommer John Bolton ambassadeur des Etats-Unis à l’ONU. Cet ultraconservateur aux manières rugueuses est connu pour ses attaques en règle contre l’institution qu’il rejoint. Il est attendu avec appréhension dans le temple de la diplomatie.

De notre correspondant à New York (Nations unies)

Le président Bush est passé en force. Profitant des vacances parlementaires, il a promulgué un décret pour nommer John Bolton ambassadeur des Etats-Unis à l'ONU. Mais ce procédé, qui l’autorise à passer outre l’exercice d’approbation du Sénat, permet de valider la nomination uniquement jusqu’au mois de janvier 2007. «Ce poste est trop important pour le laisser vacant plus longtemps, spécialement en temps de guerre et en plein débat sur la réforme de l'Onu», a déclaré le président Bush. «Une majorité de sénateurs sont d’accord pour dire qu’il est l’homme qu’il faut pour ce poste, mais en raisons de tactiques dilatoires partisanes utilisées par une poignée de sénateurs, John n’a pas pu obtenir le vote qu’il mérite», a-t-il ajouté.

Les démocrates soupçonnent John Bolton d’avoir, en tant que sous-secrétaire d'Etat chargé des questions de désarmement depuis mai 2001, manipulé le renseignement concernant notamment les arsenaux cubains et syriens pour le faire correspondre à ses vues bellicistes. Il est accusé d’avoir fait pression sur ceux de ses subordonnés dont les analyses contredisaient ses thèses. On le dit colérique, rugueux dans ses manières et intransigeant dans ses idées. Il est considéré comme un faucon, un ultraconservateur, connu pour ses prises de position unilatéralistes et ses attaques en règles contre l’ONU. Il a un jour affirmé qu’on pouvait sans problème retirer 10 étages de l'immeuble qui sert de quartier général à l'organisation.

Les démocrates sur leurs gardes

Pour toutes ces raisons, et parce que certains républicains ont des doutes le concernant, il n'avait pas obtenu le soutien de la commission des Affaires étrangères du Sénat. «Le président rend un mauvais service à notre nation en nommant un individu qui manque de crédibilité pour défendre les intérêts américains à l’ONU. Je le surveillerai de près pour m’assurer qu’il n’abuse pas de son autorité comme il l’a fait par le passé», a déclaré le sénateur démocrate Christopher Dodd, membre de la commission.

A l'ONU, Kofi Annan a fait contre mauvaise fortune bon cœur. Il se dit impatient de commencer à travailler avec John Bolton, qu'il juge «très intelligent et très capable». Même s’il a toutefois cru bon de lui rappeler qu'il devrait travailler avec 190 autres pays. Même tonalité du côté des ambassadeurs, qui font preuve d'un attentisme prudent et entendent bien montrer à John Bolton qu’il devra consulter et négocier. Car son style déplaît dans les cercles onusiens, pour lesquels la diplomatie est une religion. Selon le sénateur démocrate Joseph Biden, envoyer John Bolton à l'ONU, c'est envoyer «un taureau dans un magasin de porcelaine». En privé, beaucoup de fonctionnaires onusiens avouent être consternés par cette nomination, qui marque, craignent-ils, un durcissement de l'administration Bush. Ils ont le sentiment que «le loup est entré dans la bergerie». Mais dans l'équipe dirigeante de l'ONU, c'est le fatalisme qui domine : la nouvelle était annoncée depuis longtemps, la pilule est amère, mais elle devra être avalée.


par Philippe  Bolopion

Article publié le 02/08/2005 Dernière mise à jour le 02/08/2005 à 08:39 TU