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Algérie

Référendum sur la charte pour la paix et la réconciliation nationale

Le président Bouteflika demande aux Algériens de se prononcer par référendum sur son projet de «<I>charte pour la paix et la réconciliation nationale</I>».(photo : AFP)
Le président Bouteflika demande aux Algériens de se prononcer par référendum sur son projet de «charte pour la paix et la réconciliation nationale».
(photo : AFP)
Le 14 août dernier, dans un discours aux cadres de la nation , le président Bouteflika a annoncé que les Algériens sont appelés aux urnes le 29 septembre prochain pour se prononcer sur un projet de «charte pour la paix et la réconciliation nationale». Ce projet consacre l’option d’un arrangement interne basé sur des mesures de grâce, d’amnistie et des réparations matérielles.

De notre correspondant à Alger

Ce document de quatre pages est paru le 15 août  dans le Journal Officiel (n° 55 – www.joradp.dz). Il a été rédigé, au niveau de la présidence de la République, par un groupe de travail dont la composition n’a pas été révélée. La «charte pour la paix et la réconciliation nationale» énonce un chapelet de mesures de clémence et de compensation sociale en faveur de 5 à 6 000 ex-terroristes et de quelques dizaines de milliers de personnes représentatives des différentes catégories de victimes de ce qu’il est désormais convenu d’appeler officiellement «la tragédie nationale». Le terrorisme et le contre-terrorisme dans lesquels a sombré d’Algérie durant la décennie 1990 - violences qui ne sont pas totalement finies - a eu des effets terribles. Cette période s’est soldée par plus de 100 000 morts, des milliers de blessés, de «disparus», d’handicapés, de veuves et d’orphelins, quelques deux millions de personnes déplacées des campagnes vers les villes et vingt milliards de dollars de dégâts.

Cette charte est fondée sur plusieurs présupposés, dont le postulat selon lequel «le terrorisme a été combattu puis maîtrisé sur l’ensemble du territoire national, qui a enregistré un retour de la paix et de la sécurité». Ce sont ces «acquis» que ses rédacteurs et le président Bouteflika veulent consolider pour pouvoir tourner la page, «renforcer la cohésion nationale et s’investir dans la construction nationale». En fait, cette démarche est le prolongement de la politique de concorde civile entamée fin 1999 par le chef de l’Etat algérien. Elle avait permis la reddition de 5 à 6000 membres de l’armée islamique du salut (AIS, bras armé du parti Front islamique du salut). Cette structure rebelle s’était auto dissoute au terme d’un accord secret qu’elle avait conclu en 1997 avec l’ANP (Armée nationale populaire), juste après les grands massacres de Bentalha, Raïs et Beni Messous (Algerois).

Les urnes pour légitimer un arrangement interne

Depuis, l’AIS dirigée par «l’émir» Madani Mezrag n’a cessé de réclamer l’application des clauses de cet accord secret. La charte proposée par Abdelaziz Bouteflika est de nature à satisfaire ces revendications. Les membres de l’AIS vont être totalement blanchis. C’est ce qui est prévu par ce document qui n’exclut de toute grâce ou amnistie que les personnes qui ont participé à des «massacres collectifs, des viols et des attentats à l’explosif dans des lieux publics». Or la majorité des membres de l’AIS ainsi que les membres du GIA du groupe de «l’émir» Kartali qui sévissaient dans la plaine de la Mitidja, n’ont pas été reconnus coupables de tels faits par les commissions de probation qui avaient eu, dans une confidentialité totale, à étudier (1999-2000) leurs cas.   

Par contre, le texte soumis à référendum interdit d’activité politique, «sous quelque forme que ce soit», les ex-terroristes et les «responsables de l’instrumentalisation des préceptes de l’Islam» durant les années de violence. Autrement dit, c’est toute la mouvance islamiste du FIS, partisane d’un Etat théocratique, qui sera hors du champ politique légal. Le dossier sensible des «disparus» est également traité par la charte présidentielle. Elle ne prévoit aucune sanction contre les «agents de l’Etat», responsables de la majorité des 6 146 disparitions recensées par le comité ad hoc d’enquête, installé par Abdelaziz Bouteflika et présidé par l’avocat Farouk Ksentini.

Selon cette charte, «le peuple algérien affirme que, dans de nombreux cas, ces disparitions sont une conséquence de l’activité criminelle de terroristes sanguinaires (…), que les actes répréhensibles d’agents de l’Etat ont été sanctionnés par la justice chaque fois qu’ils ont été établis». L’Etat étant considéré comme «responsable mais pas coupable» - formule de l’avocat Ksentini - de cette situation, il prendra en charge socialement les ayant-droits de ces disparus. Pour prévenir tout sentiment d’exclusion, la charte énonce la prise en charge du «drame des familles dont des membres ont pris part à l’action terroriste». Et pour parer à toute critique de cette démarche d’ensemble, le président Bouteflika a précisé, avec insistance, dans son discours que c’est «le seul compromis autorisé par les équilibres nationaux». Dans cet esprit, la charte, qui sera soumise à référendum, interdit toute remise en cause de cette option. Elle avertit qu’une fois légitimée par les urnes, aucune contestation ne sera pas permise.«En Algérie ou à l’étranger», souligne le document. 


par Belkacem  Kolli

Article publié le 17/08/2005 Dernière mise à jour le 17/08/2005 à 11:11 TU