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Transport aérien

Comment rassurer les voyageurs

Des contrôleurs techniques de la Direction générale de l’aviation civile, contrôlent le réacteur d’un avion sur le tarmac de l’aéroport de Roissy-Charles-de-Gaulle.(Photo : AFP)
Des contrôleurs techniques de la Direction générale de l’aviation civile, contrôlent le réacteur d’un avion sur le tarmac de l’aéroport de Roissy-Charles-de-Gaulle.
(Photo : AFP)
La série noire dans l’aviation civile qui a créé une psychose chez les voyageurs et a poussé les pays de grandes destinations touristiques à publier des listes de «fiabilité». Compagnies et pavillons de pays sont mêlés ce qui lance une autre polémique entretenue par les pays visés qui parlent de mauvaise foi. Des intérêts économiques ne seraient pas étrangers à la confection de certaines listes.

Un Airbus d’Air France sort de piste en atterrissant à Toronto (Canada), un ATR tunisien, un Boeing chypriote, un MD 82 au Venezuela et enfin un autre Boeing péruvien s’écrasent, le tout en quelques semaines. Ces accidents à répétition ont relancé le débat sur la sécurité et la fiabilité de ce mode de transport. Toutefois, les statistiques montrent qu’il reste malgré tout le moyen de transport le sûr. Mais la répétition des accidents dans un laps de temps a inquiété les voyageurs qui se plaignent de manquer d’informations. Pour pallier ce problème qui pourrait peser sur certaines destinations touristiques et faire chuter le taux de remplissage des vols, certains pays européens ont rendu publiques des listes sensées alertées les voyageurs sur les compagnies et destinations «à risques». 

La Direction générale de l’aviation civile (DGAC) en France a publié une liste de compagnies aériennes de cinq pays, Air Koryo ( Corée du Nord), Air Saint-Thomas (Etats-Unis), International Air services (Liberia), Lineas aer de Mozambique (Mozambique), Phuket Airlines (Thaïlande) épinglées par les contrôles. Ces compagnies ne sont pas autorisées à desservir la destination France. La non-conformité aux normes internationales définies par le programme SAFA (Safety Assessments of Foreign Aircraft) de la conférence européenne de l’aviation civile aurait présidé à l’établissement de ladite liste.

Une liste noire pour rassurer les voyageurs

Mais pourquoi avoir dressé et publié une telle liste alors même que ces compagnies n’assurent aucune liaison au départ de Paris ? L’interrogation des voyageurs se porte plutôt sur les «compagnies à problèmes» dont ils pourraient éventuellement se méfier. Par ailleurs l’accident d’un avion suffit-il à discréditer une compagnie aérienne ? Les réponses à toutes ces questions ramènent les usagers, les exploitants, les compagnies et les constructeurs  de tous les pays à une seule problématique : la fiabilité. L’Organisation de l’aviation civile internationale met à jour un tableau qui répertorie, les compagnies qui ont connu des accidents, les pays où cela se passe, et les appareils incriminés. De ce travail résulte également l’efficacité des contrôles techniques et le professionnalisme des inspecteurs.

Une difficulté supplémentaire naît de la publication par chaque pays d’une liste noire. On découvre à l’occasion que les critères de fichage sur une liste noire ne répondent pas seulement aux données techniques. Les relations entre pays entre pays, les intérêts en jeu, et le poids des «tours operators» y jouent un rôle non négligeable. Cameroon Airlines s’est retrouvée sur la liste noire britannique en 2004 pour n’avoir pas payé «d’importantes factures aux autorités aéroportuaires britanniques», déclare Paul Ngamo, l’administrateur provisoire de la compagnie, qui fait aussi remarquer que la France lui a renouvelé, à l a même période, son agrément pour la desserte des lignes Paris-Douala.

 Mais une confusion naît à partir d’une autre liste dressée par l’Organisation de l’aviation civile internationale (OACI) qui cite trente pays dans lesquels les contrôles a minima laissent à désirer. De nombreux pays africains y figurent. Ils s’en défendent en arguant du fait que les avions des compagnies sont pour la plupart vérifiés dans les installations techniques françaises. Il faut cependant préciser que ces contrôles sont effectués sur les longs courriers, à destination de Paris et des grandes capitales européennes. En revanche le problème des contrôles techniques douteux est réel sur les appareils affectés aux liaisons domestiques.

Les vieux avions de l’ex-URSS  sont en cause

Les statistiques de l’OACI montrent un pourcentage d’accidents d’avions très élevé en Afrique, dix fois plus que la moyenne  en Europe et en Amérique du nord. Cela est essentiellement dû au maintien en activité des vieux avions, Antonov, Iliouchine et Tupolev de l’ex-Union soviétique en Angola, en Guinée équatoriale et en République démocratique du Congo. Les accidents sur les vols intérieurs dans ces pays sont légion. L’éclatement de l’Union soviétique a eu pour corollaire un démantèlement des accords de coopération et d’assistance technique entre les pays africains et l’URSS. De nouveaux accords bilatéraux étaient nécessaires avec les Etats de la Communauté des Etats indépendants (CEI), Russie, Ukraine, Biélorussie, etc. Mais pour ces pays les priorités étaient ailleurs que d’aller dépanner des aéronefs en Afrique. Aujourd’hui, face à la série d’accidents d’avions dans le monde, le ministère russe des Transports a demandé à toutes les compagnies aériennes de ne plus faire voler les avions Iliouchine 96-300 suite à des défaillances constatées sur les systèmes de freinage. Par ailleurs, les avions de l’ex-Union soviétique ne répondent pas aux normes de sécurité européennes.

De manière générale, le problème n’est plus seulement celui des pays dans lesquels les contrôles sont approximatifs et où les avions sont vieux. La récente série noire dans l’aviation civile a mis en cause des compagnies charters qui se défendent et mettent le doigt sur certains accidents (Concorde le 25 juillet 2000 à Gonesse, 113 morts) qui pour autant n’ont pas jeté le discrédit sur Air France. «Cet avion ne respectait pas les règles de sécurité aérienne. Il est établi que pour des raisons mercantiles, on a maintenu l’exploitation du Concorde en dépit du bon sens», déclare un avocat des parties civiles sur un site internet, eurocockpit.com.

En tout cas ces derniers accidents d’avion ont aiguisé la méfiance des passagers qui se substituent aux contrôleurs et refusent d’embarquer à la moindre incartade. Cette nouvelle attitude des voyageurs pousse, pour l’instant, les inspecteurs à plus de rigueur. Il n’y a plus un jour sur un aéroport européen où une compagnie n’est pas obligée à effectuer une réparation avant d’obtenir l’autorisation de faire voler un avion. 

par Didier  Samson

Article publié le 01/09/2005 Dernière mise à jour le 01/09/2005 à 16:41 TU