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Irak

«Restaurer le droit» à Tall Afar

Une vaste offensive militaire a été lancée samedi 10 septembre 2005 contre la ville de Tall Afar.(Photo : AFP)
Une vaste offensive militaire a été lancée samedi 10 septembre 2005 contre la ville de Tall Afar.
(Photo : AFP)
Quelque 6 000 soldats irakiens, appuyés par environ 4 000 GI’s américains, sont engagés dans une vaste offensive militaire lancée samedi contre la ville de Tall Afar, située non loin de la frontière syrienne et considérée comme étant une plaque tournante pour les armes et les combattants étrangers. A en croire le ministre irakien de la Défense, près de 147 rebelles auraient été tués dans les combats de ces derniers jours et 200 autres seraient d’ores et déjà entre les mains des forces américaines. Soucieux de montrer la volonté de son gouvernement de restaurer la sécurité à Tall Afar, mais aussi dans d’autres villes du pays, le Premier ministre irakien, le chiite Ibrahim al-Jaafari, s’est rendu sur place lundi.

En annonçant leur détermination à reprendre coûte que coûte le contrôle de Tall Afar, les autorités irakiennes ont également tenu à expliquer que la vaste offensive qu’ils allaient mener contre cette ville de 300 000 habitants avait été décidée avec l’accord des chefs de tribus sunnites et chiites de la région. Il faut croire que le souvenir de l’assaut lancé en novembre dernier par le gouvernement Allaoui contre la ville rebelle de Falloujah, qui avait profondément divisé la société accentuant notamment les communautarismes, semble avoir servi de leçon aux responsables irakiens. Le Premier ministre Ibrahim al-Jaafari a ainsi lui-même annoncé samedi le lancement de l’opération «Restaurer le droit» à Tall Afar. «Nous avons décidé d’assumer notre devoir national, de débarrasser la ville des hors-la-loi et d’y rétablir une vie normale. J’ai donné un ordre de marche aux troupes irakiennes soutenues par la Force multinationale pour y parvenir», a-t-il déclaré. L’objectif de cette opération est de «rétablir la tranquillité dans cette ville en la nettoyant des terroristes et des saboteurs étrangers qui ont tué des innocents et chassé des familles», a également souligné le chef du gouvernement en espérant que les habitants, chassés par les violences, puissent dans les plus brefs délais revenir chez eux.

Au pouvoir depuis cinq mois, le gouvernement d’Ibrahim al-Jaafari est de plus en plus critiqué pour son incapacité à rétablir la sécurité dans le pays. Et sa volonté de faire de l’opération «Restaurer le droit» un succès des troupes irakiennes n’est sans doute pas anodine à l’approche du référendum sur la Constitution prévu à la mi-octobre. Le ministre de la Défense, le sunnite Saadoun Doulaïmi, a ainsi insisté sur le fait que l’offensive en cours était «une opération menée par les forces irakiennes qui sont parfaitement capables de venir à bout des terroristes». Il a également affirmé qu’au moins 141 rebelles avaient été tués en deux jours d’opération et quelque 200 autres capturés et remis aux forces américaines pour interrogatoire. Selon lui, les forces irakiennes n’ont eu à déplorer que cinq morts dans leurs rangs et trois blessés. Le ministre, qui a estimé que les autorités «n’avaient d’autre choix que celui de rétablir l’ordre», a annoncé que d’autres opérations du même type étaient envisagées dans d’autres villes rebelles comme al-Qaïm, à l’ouest du pays, et Samara, au nord de Bagdad.

Damas une nouvelle fois montré du doigt

Les médias irakiens ont rapporté que des milliers de personnes avaient quitté Tall Afar avant le début de l’offensive américano-irakienne. Les habitants, qui ont été prévenus de l’imminence d’un assaut, ont été invités à partir de chez eux. Et les hommes en âge de porter des armes ont été mis le 6 septembre dernier devant le choix de quitter la ville ou de se faire arrêter. Soucieux d’éviter les erreurs de Falloujah, les autorités se sont préparées à accueillir les personnes déplacées. Le ministre de la Défense a ainsi affirmé que 3 260 tentes avaient été installées pour ces réfugiés. Et le Croissant-Rouge irakien, qui s’est inquiété dès dimanche de la situation humanitaire à Tall Afar, a également monté un camp de 500 tentes dans une localité située à une vingtaine de kilomètres de la ville. L’organisation a indiqué avoir équipé ce camp d’une quarantaine de latrines et d’y avoir installé une vingtaine de camions-citernes d’une capacité de 1 000 à 1 500 litres. Elle se dit prête à assister, avec l’aide d’autres organisations humanitaires, quelque 2 500 familles et pour se faire a d’ores et déjà fait appel aux Croissant-Rouge de Turquie et du Qatar. Un convoi humanitaire a d’ailleurs quitté dimanche Ankara en direction de Tall Afar.

Sur le plan politique, la Syrie a une nouvelle fois été ouvertement accusée de ne rien faire pour empêcher les combattants étrangers d’accéder depuis son territoire à l’Irak. «J’appelle nos voisins à cesser d’exporter la destruction», a notamment déclaré le ministre de la Défense Saadoun al-Doulaïmi. Et d’ajouter : «notre problème est que toutes les infiltrations porteuses de mort et de terreur se produisent par la frontière avec la Syrie qui est longue de 615 km». Selon ce responsable, «des villes comme al-Qaïm, Housayba, Routba ou Rommana sont devenues des otages aux mains de terroristes venant de tous les pays et qui n’ont trouvé d’autres portes d’entrée que la Syrie». Damas a, comme il fallait s’y attendre, réfuté les déclarations du ministre irakien jugées «contraires à la réalité». «Les responsables irakiens savent très bien que la Syrie fait tout son possible pour contrôler la frontière du côté syrien. La responsabilité de la sécurité de l’autre côté relève entièrement des forces d’occupation américaines et des autorités irakiennes», a notamment affirmé le ministère des Affaires étrangères pour qui les déclarations irakiennes font partie de «la campagne de pressions politiques et médiatiques exercées sur la Syrie pour couvrir l’échec à assurer la sécurité en Irak».

par Mounia  Daoudi

Article publié le 12/09/2005 Dernière mise à jour le 12/09/2005 à 17:19 TU