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Irak

Une Constitution sans les sunnites

Les membres du comité de rédaction de la Constitution de l'Irak, ont approuvé la dernière version du projet lors de la réunion du 28 août 2005.(Photo: AFP)
Les membres du comité de rédaction de la Constitution de l'Irak, ont approuvé la dernière version du projet lors de la réunion du 28 août 2005.
(Photo: AFP)
Les membres du comité de rédaction de la Constitution irakienne ont finalement validé la dernière version du projet qui a été présentée comme prévu, dimanche 28 août, devant le Parlement. Malgré d’intenses négociations menées depuis plusieurs jours entre les représentants des différentes communautés irakiennes, il n’a pas été possible d’obtenir le soutien des sunnites à ce texte. La campagne en vue du référendum, indispensable pour que le projet de Constitution soit ratifié, va donc s’engager sous le signe de la division.

Les sunnites ont rejeté le projet de Constitution. Les divergences profondes avec les représentants des chiites et des kurdes, qui ont très rapidement émergé pendant l’élaboration du texte, n’ont pas toutes pu être surmontées. Ni le délai supplémentaire de quelques jours dégagé pour négocier, ni l’intervention des Américains pour concilier les points de vue, n’ont permis d’arriver à un compromis. Les négociateurs sunnites ont expliqué leur position dans un communiqué où ils précisent qu’ils ont décidé de «ne pas accepter les articles qui portent atteinte à l’intégrité territoriale, à l’unité du peuple et à son identité».

Plusieurs points faisaient en effet problème. Et parmi ceux-ci figure en tête de liste la mention du fédéralisme. Pour les sunnites, l’inscription de ce terme dans la Loi fondamentale du pays porte en elle-même le ferment de la division. Une perspective qu’ils redoutent puisqu’elle pourrait aboutir à la création de zones autonomes au Nord (Kurdistan) et au Sud (région chiite). C’est la raison pour laquelle ils ont essayé d’obtenir des chiites et des kurdes qu’ils renoncent à évoquer le fédéralisme. Cela n’a pas été le cas et le seul aménagement finalement concédé sur cette question semble avoir été d'attendre l'élection de la prochaine assemblée, qui doit avoir lieu en décembre, pour envisager les mesures pratiques de sa mise en œuvre.

Islam et Parti Baas

Les sunnites s’opposaient aussi à l’article qui prévoit le bannissement du Parti Baas qui dirigeait tout le pays avant l’intervention américaine. Un passage sur lequel une modification a été, semble-t-il, réalisée dans la version finale du texte puisqu’il est précisé que la mesure s’applique uniquement au «Baas de Saddam Hussein».  Concernant la demande d’inscrire dans la Constitution que l’Irak appartient «aux mondes arabe et musulman», elle n’a pas été satisfaite. Il a été précisé que le pays appartient au monde «islamique» mais que seuls ses citoyens «arabes font partie de la Nation arabe». De même, les sunnites n’ont pas obtenu l’inscription de l’islam en tant que «principale source» de la loi mais seulement en tant que «source principale».

L’échec des négociations n’a pas empêché la présentation du projet devant le Parlement, le 28 août, comme l’avait annoncé depuis plusieurs jours le président de cette assemblée, Hajem al-Hassani, en disant qu’avec ou sans l’assentiment des sunnites la Constitution serait bouclée à la date prévue. C’est ce qui a été fait. Les sunnites, minoritaires dans le comité de rédaction comme au Parlement, n’avaient de toute manière aucun moyen d’empêcher l’adoption du texte. Il n’y avait donc qu’un seul véritable enjeu, mais il était de poids : réussir le pari de l’unanimité, ce qui aurait été particulièrement symbolique dans ce pays complètement déchiré. Cet objectif n’a pas été atteint.

Un référendum en octobre

La lecture de la version finale du projet devant les parlementaires a donc mis fin à l’étape d’élaboration de la Constitution. La première mouture du texte ayant été approuvée le 22 août dernier, les députés n’ont pas procédé à un nouveau vote et la séance a été levée. L’Irak entre maintenant dans la phase suivante du processus : celle de la campagne d’information en vue du référendum populaire qui doit avoir lieu le 15 octobre pour ratifier le projet.

Malgré leur opposition, les sunnites n’ont pas décidé, cette fois-ci, de se mettre en retrait du processus politique en cours et d’appeler au boycott. Ils désirent participer activement à la campagne dans le but d’empêcher l’adoption définitive du texte en réussissant à convaincre les électeurs de voter «non». La procédure électorale prévoit, en effet, que si le projet n’obtient pas le soutien des deux tiers des votants dans au moins trois des dix-huit provinces du pays, il sera rejeté. Et c’est désormais sur cette possibilité que comptent les sunnites pour bloquer l’entrée en vigueur de la Constitution.


par Valérie  Gas

Article publié le 28/08/2005 Dernière mise à jour le 28/08/2005 à 17:02 TU

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Addala Benraad

Journaliste à RFI

«Les sunnites ont obtenus des avancées dans le projet de nouvelle Constitution irakienne.»

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