Etats-Unis
Cour suprême : Bush déçoit les conservateurs
(Photo: Maison Blanche-Paul Morse)
Avec la nomination de Harriet Miers, la Cour suprême des Etats-Unis est désormais au complet, sous réserve d’approbation du choix de George W. Bush par le sénat. Mais la dernière désignée des neuf juges de la haute instance américaine est la cible d’une volée de critiques tous azimuts, mais dont les plus vives proviennent incontestablement des milieux conservateurs, où se recrutent les plus solides soutiens du président.
Plusieurs porte-parole de la droite américaine, militants des associations anti-avortement notamment, se déclarent déçus, voire franchement hostiles à cette nomination. «Nous devons rejeter la nomination de Harriet Miers à la Cour suprême», a déclaré le président de l’organisation anti-avortement Troy Newman. C’est une «trahison des électeurs conservateurs (…) qui ont mis Bush à la Maison Blanche en 2000 et 2004», s’est exclamé le président d’une association de la droite religieuse, Eugene Delgaudio. «Copinage», «capitulation», se lamente le rédacteur en chef de l’hebdomadaire de droite Weekly Standard qui se déclare «déçu, déprimé et démoralisé» et accuse le président d’avoir manqué de courage.
Rassurer la base
La déception de la droite religieuse et conservatrice américaine est à la mesure des espoirs soulevés par la seconde présidence Bush, en novembre 2004, d’obtenir enfin l’annulation de l’arrêt de 1973 légalisant l’avortement. Celle-ci est d’autant plus amère qu’elle considère avoir fait beaucoup pour l’élection et la réélection du président. Et, avec la nomination de Harriet Miers en remplacement de Sandra Day O’Connor, les chances de faire basculer le centre de gravité idéologique de la Cour suprême vers une conception plus puritaine de la société s’éloignent. Depuis lundi, le vice-président Dick Cheney a multiplié les interventions radiodiffusées auprès des commentateurs ultra-conservateurs pour rassurer cette base de l’électorat républicain.
Des républicains de la commission judiciaire du sénat ont annoncé que lors de son audition, Mme Miers serait assaillie de questions afin qu’elle précise ses positions sur ses conceptions en matière de mœurs qui leur tiennent tant à cœur.
Pour les mêmes raisons, le choix de Harriet Miers a rassuré les démocrates. En revanche nombre de ces derniers, tout comme certains républicains, formulent des réserves sur ses compétences. Celle-ci est en effet avocate de formation, et non pas juge. Et ils éprouvent des doutes sur ses capacités à assumer ses hautes fonctions à ce poste-clé au sein des institutions du pays. Le président Bush a estimé qu’il s’agissait là d’un atout car Harriet Miers bénéficierait ainsi d’une «grande expertise, mais aussi d’une approche neuve», et que ce choix lui avait été suggéré par des sénateurs.
Candidat de compromis
Mais l’inquiétude des démocrates se porte également sur l’indépendance de Mme Miers à l’égard de l’exécutif. Cette avocate texane de 60 ans est une amie de longue date du président, pour lequel elle travaillait déjà lorsqu’il était gouverneur du Texas. Avant de rejoindre les républicains, Mme Miers avait financé certaines campagnes électorales démocrates. Elle est actuellement chef du service juridique de la Maison Blanche, où elle travaille pour l’administration Bush depuis 5 ans.
Mardi soir, lors d’une conférence de presse, George W. Bush a considéré que Harriet Miers était «le meilleur candidat possible». Certainement un candidat de compromis.
par Georges Abou (avec AFP)
Article publié le 05/10/2005 Dernière mise à jour le 05/10/2005 à 16:45 TU