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Jordanie

Al-Qaïda en Irak revendique les trois attentats

Image de la télévision jordanienne montrant le <i>Grand Hyatt Hotel</i> d'Amman, touché par une attaque suicide. Le pays a fermé ses frontières.(Photo: AFP)
Image de la télévision jordanienne montrant le Grand Hyatt Hotel d'Amman, touché par une attaque suicide. Le pays a fermé ses frontières.
(Photo: AFP)
Dans un communiqué qui reste à authentifier, la branche d'al-Qaïda en Irak, dirigée par le Jordanien Abou Moussab al Zarqaoui, a revendiqué, jeudi, les trois attentats suicide, qui avaient fait, la veille, au moins 56 morts et 110 blessés. La première attaque kamikaze a eu lieu mercredi, vers 21h locales, un terroriste déclenchant les explosifs qu'il transportait dans la salle de bal de l'hôtel Radisson SAS, dans l'ouest d'Amman, où se déroulait un mariage. Un autre kamikaze s’est fait sauter peu après, à moins d’un kilomètre du Radisson, dans le lobby d’un autre hôtel cinq étoiles, le Hyatt. A peu près en même temps, un troisième homme lançait sa voiture piégée contre le Days Inn, un hôtel trois étoiles situé dans un autre quartier, à proximité de l'ambassade d'Israël à Amman.

«Que le tyran d'Amman sache que la protection qu'il offre aux juifs est devenue la cible des moudjahidine et qu'il s'attende au pire», menace le communiqué diffusé jeudi sur internet sous la signature d'al-Qaïda en Irak. Pour sa part, aussitôt après les attentats, le vice-Premier ministre jordanien, Marwan Moasher, avait pointé du doigt Abou Moussab al Zarqaoui, en le qualifiant de «principal suspect». Il est vrai que Zarqaoui, qui se présente comme le chef d'al-Qaïda pour l'Irak, a le profil du suspect idéal dans ces attentats. D'abord, en raison du mode opératoire. La simultanéité des explosions dans des attentats suicide est devenue sa marque de fabrique ces deux dernières années en Irak. Ensuite, Zarqaoui, qui est d'ailleurs lui même un Jordanien, a souvent menacé la Jordanie, notamment dans un message vidéo diffusé sur Internet en avril 2004. Les services jordaniens affirment avoir déjoué au même moment un attentat d'al-Qaïda qui visait les bureaux du Premier ministre et l'ambassade des Etats-Unis. Son groupe a du reste revendiqué en août dernier des attaques à la roquette contre des navires de guerre américains qui mouillaient dans le port d'Aqaba, dans le sud du pays, et Zarqaoui lui-même a été condamné à mort par contumace, l'an dernier, par un tribunal jordanien pour l'assassinat en 2002 d'un diplomate américain en poste à Amman.

Prime américaine pour la capture de Zarqaoui

Avant de se faire connaître en Irak par les exécutions d'otages et les attentats suicide, Zarqaoui avait été condamné à quinze ans de prison en Jordanie pour avoir animé une opposition armée à la tête d'un groupe qui se faisait appeler Bait al Imam, la maison de l'imam. Aujourd'hui, les services américains le considèrent comme étant aussi dangereux, sinon plus qu'Oussama Ben Laden et la prime offerte pour sa capture par Washington est de 25 millions de dollars, tout comme Ben Laden. Aujourd'hui, à l'instar du secrétaire général des Nations unies, Kofi Annan, ou du chef de la diplomatie britannique, Jack Straw, qui condamne un «mal mondial» qu'il s'agit de combattre avec la plus grande «détermination», les Etats-Unis dénoncent «ces attentats pervers contre des civils innocents» et propose leur aide à la Jordanie. Un ressortissant américain serait d'ailleurs parmi les victimes de mercredi.

Aussi horrible que cela paraisse, le plus étonnant est sans doute que des attentats terroristes ne se soient pas produits plus tôt. La Jordanie a en effet tout pour les attirer sur son territoire ou ses intérêts. Le roi Abdallah II est l'un des meilleurs alliés des Américains au Proche-Orient et, bien davantage que son père le roi Hussein, colle à la politique de Washington sans donner l'impression de s'en distancier sur quoi que ce soit. C'est notamment vrai dans le cas de l'Irak, un pays sur lequel la dynastie au pouvoir à Amman continue d'avoir des visées.

D'autre part, le royaume a signé il y a onze ans un traité de paix avec Israël et, contrairement à l'Égypte, par exemple, assume sans complexe ses contacts et sa coopération avec les Israéliens dans de nombreux domaines, y compris celui de la sécurité. Enfin, la Jordanie est le point de passage quasiment obligé pour se rendre en Irak et des dizaines de milliers d'Irakiens y vivent ou y transitent en permanence ce qui, vu la situation qui prévaut actuellement en Irak, constitue un risque de sécurité élevé.

Mais ce qui a probablement protégé le royaume jusqu'à ce jour, c'est l'efficacité de ses services de sécurité dont la réputation n'est plus à faire. D'ailleurs, à en croire la presse israélienne de ce matin, les services jordaniens ont été à deux doigts de déjouer ces attentats puisque des Israéliens qui séjournaient à l'hôtel Radisson ont été évacués de l'hôtel et escortés jusqu'à la frontière par des agents jordaniens peu avant les explosions.

 


par Olivier  Da Lage

Article publié le 10/11/2005 Dernière mise à jour le 10/11/2005 à 08:26 TU

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Farida Ayari

Journaliste à RFI

«Ces attentats suicide sont sans précédent en Jordanie.»

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