Pologne
Vote de confiance extrême

Photo : AFP
De notre correspondante à Varsovie
Issu du seul parti des frères jumeaux Kaczynski, Droit et Justice (PiS), le gouvernement Marcinkiewicz était minoritaire sur le papier, avec 155 députés seulement. Avec l’appui du populiste Autodéfense, celui de l'ultra-catholique Ligue des familles polonaises (LPR) et du Parti paysan PSL, il se trouve désormais en ordre de bataille au Parlement, majoritaire face à son ancien allié libéral, la Plate-forme civique (PO) de Donald Tusk. La rupture consommée avec la victoire du PiS à la présidentielle d’octobre, la Plate-forme se range en effet désormais dans l’opposition.
Le vote a eu lieu après un houleux débat à l’assemblée qui a duré toute la journée de jeudi. Le Premier ministre conservateur a d’abord présenté le programme de son gouvernement. Celui-ci affiche cinq priorités : la réforme des institutions de l’Etat rongé par la corruption, le renforcement des dispositifs de sécurité, avec, notamment le doublement en deux ans des effectifs de la police, mais aussi un soutien économique et social aux familles et une politique économique fondée sur la solidarité et le développement de l’agriculture.
Appels du pied
Marcinkiewicz a eu aussi quelques phrases d’apaisement vis-à-vis de l’Union européenne. «Notre entrée dans l’Union européenne nous garantit le développement économique et l’opulence», a-t-il lancé avant d’ajouter: «Notre présence dans l’Otan est le garant de notre sécurité. Les deux options, l’européenne et l’atlantique, ne doivent pas être en concurrence mais doivent se compléter». Le Premier ministre espère aussi effacer la mauvaise impression que son gouvernement a fait en cherchant des appuis du coté des populistes paysans et de l’extrême droite. Ce qui n’est pas gagné.
Marcinkiewicz a employé la métaphore d’une table de bridge pour illustrer les relations corrompues qui réunissaient autour d’une même table les hommes politiques, les services secrets, les businessmen et les gangsters. Marcinkiewicz a déclaré qu’il ne fait que réaliser le programme électoral de son parti conservateur: «Le Droit et la Justice». De son côté, le chef de la Plate-forme civique, Donald Tusk, le candidat libéral malheureux à la présidentielle, se présente désormais comme le chef de l’opposition. Il a attaqué violemment Marcinkiewicz et les jumeaux Kaczynski pour leur stratégie d’alliance avec l’extrême droite.
Tusk a répété que sa formation était prête à renouer le dialogue avec le PiS, si la coalition informelle avec Andrzej Lepper était officiellement rompue. Rien n’annonce un tel retournement. Au contraire. Pour sa part, Andrzej Lepper a annoncé que l’adoubement du gouvernement Marcinkiewicz était un grand jour pour la Pologne. Le vaste volet social était du goût du président populiste de ce parti paysan. Jaroslaw Kaczynski, le leader du PiS a, de son côté, promis que si l’Autodéfense continuait à soutenir les projets du PiS à l’Assemblée, cette coalition pourrait devenir officielle et Lepper pourrait entrer dans le gouvernement.
Lech Walesa, l’ancien président et héros de Solidarnosc n’est pas aussi effrayé que les médias polonais par cette alliance incongrue. «Le gouvernement minoritaire s’est appuyé sur ceux qui ont bien voulu voter pour lui», a-t-il dit. «Si Lech Kaczynski réalise la moitié de ce qu’il a promis, je serais très content. Mais il a promis beaucoup», ajoute l’ancien électricien de Gdansk.
par Maya Szymanowska
Article publié le 11/11/2005 Dernière mise à jour le 11/11/2005 à 14:14 TU