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Angela Merkel devant le Bundestag

Angela Merkel devant le <i>Bundestag</i>. La nouvelle chancelière allemande veut rendre au pays son statut de grande puissance.(Photo: AFP)
Angela Merkel devant le Bundestag. La nouvelle chancelière allemande veut rendre au pays son statut de grande puissance.
(Photo: AFP)
C’est en fille spirituelle de l’ex-chancelier Willy Brandt qu’Angela Merkel s’est adressée aux députés allemands. Dans sa première déclaration de politique générale devant la chambre basse du parlement (Bundestag), la chancelière de la République fédérale a fait également l’éloge de son prédécesseur Gerhard Schröder en matière de réformes, notamment en ce qui concerne l’agenda 2010, tout en appelant à «plus d’audace et de liberté dans l’action gouvernementale».

La première intervention de la chancelière Angela Merkel a coïncidé avec la première grande crise qu’elle doit résoudre. Inaugurant son discours par un vibrant plaidoyer contre le terrorisme international, elle est restée ferme et déterminée à l’encontre des ravisseurs de l’archéologue allemande Suzanne Osthoff et de son chauffeur, enlevés, vendredi, en Irak Les terroristes menacent d’exécuter les otages, si Berlin ne cesse pas toute coopération avec le gouvernement irakien. «Une chose est claire: ce gouvernement, ce parlement ne céderont pas au chantage», a martelé Angela Merkel pour qui le terrorisme international va à l’encontre de tout ce qui constitue «l'essence de notre civilisation».

La petite fille de Willy Brandt

«Oser plus de liberté», a proclamé, ce mercredi, la nouvelle chancelière allemande, en écho à la célèbre formule de Willy Brandt quand il est arrivé au pouvoir en 1969: «oser plus de démocratie.». Citoyenne de l’ancienne Allemagne de l’Est, Angela Merkel a confié aux députés du Bundestag que «la liberté a été la plus grande surprise de(sa) vie», évoquant la chute du Mur de Berlin, en 1989. Le fait qu’elle soit la première femme à accéder à la Chancellerie à la tête d’une grande coalition nationale passe après. La chancelière conservatrice estime par ailleurs que cette coalition entre les Unions chrétiennes (CDU-CSU) et les sociaux-démocrates (SPD) offre des «possibilités inattendues d’œuvrer en commun et non de passer son temps à critiquer l’action de l’autre».

Pendant une heure et demie, Angela Merkel ne mentionnera pas une seule fois le nom de Helmut Kohl à qui elle doit sa carrière politique. Développant son programme de politique générale, elle a déclaré vouloir poursuivre les réformes amorcées par Gerhard Schröder, son rival malheureux aux dernières élections.

Une politique volontariste

La chancelière conservatrice veut mener une politique volontariste conciliant initiative privée et justice sociale. « L’Allemagne a besoin d’un gouvernement d’actions au service des idées», a-t-elle déclaré. Approuvant l’agenda 2010 de son prédécesseur, elle lui sait gré d’avoir eu le courage de s’attaquer à la réforme des systèmes sociaux: «nous voulons réformer le fédéralisme, assainir notre système de santé et de retraites.» Elle envisage d’appliquer ce que prévoyait la précédente coalition rouge-verte de Gerhard Schröder, à savoir porter l’âge de la retraite à 67 ans. Mesure qui n’entrerait en vigueur qu’à partir de 2012 et qui s’échelonnerait jusqu’en 2035. Seuls partiront à 65 ans ceux qui comptabiliseront 45 années de cotisations.

La lutte contre le chômage reste le fer de lance du nouveau gouvernement de coalition. Insistant sur l’objectif prioritaire de faire reculer le chômage, madame Merkel a tenu à justifier le bien-fondé des économies que son gouvernement de coalition entend mettre en œuvre d’ici à 2007. Le gouvernement de conservateurs et de sociaux-démocrates issu des élections anticipées du 18 septembre a en effet prévu des hausses d’impôts dont celle de la TVA de trois points, passant ainsi à 19% dans deux ans, avec pour objectif de faire descendre le déficit public en 2007 sous la barre des 3% du pacte de stabilité. Il envisage également de supprimer certains avantages fiscaux et de faire la chasse à une bureaucratie trop coûteuse.

Dans une Allemagne qui souffre d’une baisse cruciale de la démographie, la chancelière conservatrice, célibataire et sans enfant, désire l’instauration d’un «climat favorable» à la natalité via des aides financières et l’augmentation du nombre de garderies. Aujourd’hui encore, les mères de famille qui souhaitent travailler sont très mal vues et traitées de mères indignes.

Forte de sa foi protestante, Angela Merkel a dénoncé avec la plus grande véhémence «toute forme d’extrémisme, de racisme et d’antisémitisme». Elle considère l’intégration comme «une mission-clé» de la coalition.

Politique extérieure

C’est sur le même ton sobre que la chancelière a exposé ses vues en matière de politique européenne et internationale. Sur ces dossiers, la chancelière conservatrice agira de concert avec son ministre des Affaires étrangères social-démocrate Frank-Walter Steinmeier.

Ainsi au sein de l’Union européenne, l’Allemagne jouera, selon madame Merkel, un «rôle de médiateur et de facteur équilibrant». Elle a évoqué les premières étapes de sa tournée dans les pays de l’Union (Paris, Londres et Bruxelles), exposant sa «vision très pragmatique des intérêts de l’Allemagne et de l’Europe», selon Marin Koopmann, expert européen et en relations franco-allemandes à la DGAP (société allemande de politique étrangère). Avant toute décision en matière de politique étrangère, le gouvernement Merkel privilégiera le consensus européen, dans le but d’augmenter l’impact de l’Europe vis-à-vis des Etats-Unis, mais aussi de partenaires comme la Russie. Une multipolarité que défend Jacques Chirac.

Fidèle à ses convictions, la chancelière a plaidé pour des «relations étroites, sincères et ouvertes» dans le partenariat transatlantique, ainsi que pour «la paix et la stabilité au Proche-Orient». Le but affiché de la chef de la CDU étant que «dans les dix ans à venir l’Allemagne soit parmi les trois premiers en Europe».

Les chefs des partis de l’opposition –Guisto Wederwelle, pour le parti libéral (FDP), Fritz Kuhn tête de file des Verts et Gregor Gysi, le représentant des partis de gauche– se sont exprimés après la déclaration de la nouvelle chancelière, critiquant une «politique des petits pas».

Les derniers sondages montrent que 67% des Allemands approuvent le leadership d’Angela Merkel, 59% sont d’avis que la grande coalition tiendra jusqu’au terme de la législature en 2009.

par Françoise  Dentinger

Article publié le 30/11/2005 Dernière mise à jour le 30/11/2005 à 19:05 TU

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Béatrice Leveillé

Journaliste à RFI

«Pour Angela Merkel, en matière sociale il faut plus de justice et moins d'abus du système. Il vaut mieux offrir aux gens du travail que des indemnités, c'est la dignité des gens qui est en jeu.»

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