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Allemagne

SPD-CDU : les bases ténues d’une grande coalition

Angela Merkel et Gerhard Schröder. Les deux grands partis CDU et SPD se sont résolus à gouverner ensemble. (Photos: www.cdu.de ; www.spd.de)
Angela Merkel et Gerhard Schröder. Les deux grands partis CDU et SPD se sont résolus à gouverner ensemble.
(Photos: www.cdu.de ; www.spd.de)
Faute d’alternative, les deux grands partis se sont résolus à gouverner ensemble. Mais l’accord ne va pas sans tiraillements au sein du SPD comme de la CDU et doit encore être ratifié par les militants.

De notre correspondant à Berlin

Les lois de l’arithmétique et les traditions parlementaires l’ont finalement emporté. Les sociaux-démocrates arrivés en seconde position en voix et en sièges au soir des élections du 18 septembre ont accepté de reconnaître qu’il revenait aux chrétiens-démocrates emmenés par Angela Merkel en cas de réussite des négociations de diriger un gouvernement de grande coalition.

Les prétentions du SPD souhaitant que Gerhard Schröder conserve son poste apparaissent a posteriori comme un jeu tactique permettant de monnayer un retrait du chancelier sortant. Les sociaux démocrates disposeraient dans un gouvernement les alliant à la CDU de huit des quatorze ministères et non des moindres comme les Affaires étrangères, les Finances, la Santé ou le Travail.

Cette répartition des compétences a d’ailleurs fait grincer des dents au sein du parti chrétien-démocrate même si la direction de la CDU a entériné l’accord lundi à l’unanimité. Au SPD, un quart du comité directeur s’est abstenu ou a voté contre ce qui prouve que le retrait de Gerhard Schröder dans la course à la chancellerie reste pour certains une couleuvre difficile à avaler.

Cette querelle des prétendants qui minait le pays depuis trois semaines a conduit à un accord hors du commun. D’ordinaire, la répartition des portefeuilles ministériels est tranchée à la fin des négociations une fois un accord sur un programme de législature signé.

Pour l’heure, seuls quatre points ont été fixés lors des rencontres préliminaires : les deux grands partis souhaitent que l’Allemagne consacre 3% de son produit intérieur brut aux dépenses de recherche d’ici 2010; l’autonomie tarifaire ne sera pas remise en cause, une concession de la CDU au SPD; le système fiscal doit être rendu plus transparent par l’abandon d’exceptions et de dérogations mais les primes pour le travail les jours fériés et le dimanche ne seront pas imposables, autre concession à la gauche ; les familles doivent bénéficier d’avantages supplémentaires.

Pour le reste, tout est encore à négocier. Une commission paritaire va être mise en place et la première rencontre est prévue pour le début de la semaine prochaine. Les négociations si le calendrier est respecté devraient s’achever à la mi-novembre. L’accord final devra être approuvé par des congrès des deux partis avant qu’Angela Merkel ne puisse être élue par le parlement.

Angela Merkel n’est pas encore chancelière

Les négociations ne seront pas simples. Mais des compromis sont possibles comme le passé l’a montré alors que la gauche seule au pouvoir avait besoin d’un soutien des chrétiens démocrates majoritaires au sein de la chambre haute représentant les régions. Les réformes de la santé et celle de l’indemnisation chômage avaient ainsi été adoptés par une grande coalition de fait.

La CDU a d’ores et déjà mis en sourdine certaines propositions de sa campagne difficilement négociables avec le SPD et qu’une partie des responsables chrétiens démocrates n’avaient de toute façon soutenu que par discipline. Certaines propositions fiscales opposaient les deux partis comme une hausse de la TVA prônée par la CDU et une imposition supplémentaire voulue par le SPD pour les plus riches. En revanche, la baisse des taux d’imposition pour les particuliers et  les entreprises est voulue par les deux partis dont les propositions ne diffèrent pas sensiblement. SPD et CDU s’étaient également mis d’accord en 2003 sur de nombreuses suppressions de subventions et pourraient ressortir leurs propositions qui n’avaient pas été suivies de conséquences. Enfin, la réforme du fédéralisme synonyme de beaucoup de blocages institutionnels avait déjà failli aboutir il y a quelques mois lors de négociations entre le SPD et la CDU. Une chance de parvenir à un accord définitif parait relativement forte.

Pour autant, la prudence reste de mise. Angela Merkel n’est pas encore chancelière contrairement à ce que beaucoup de médias,notamment étrangers, titraient hier. Les deux grands partis ont décidé d’entamer des négociations. Celles-ci peuvent échouer si les dissensions l’emportent. Les militants de base, notamment sociaux-démocrates, qui devront trancher lors d’un congrès sur l’accord final peuvent ne pas le confirmer. Enfin, une partie des députés SPD menace de ne pas voter pour une chancelière Merkel lors de son investiture. La menace est certes à nuancer en raison de la confortable majorité de la grande coalition (448 sièges sur 614) qui lui permet de supporter des défections. Si elles étaient trop importantes, les débuts du nouveau gouvernement en seraient malgré tout entachés.

Au-delà, si les négociations sont couronnées de succès, la grande coalition devra prouver qu’elle peut gouverner sur la durée et qu’elle est à même de répondre aux besoins du pays. 54% des Allemands interrogés hier le pensent. Mais la presse de ce mardi se demande si les compromis négociés ne se feront pas en partie au détriment de l’intérêt général.

par Pascal  Thibaut

Article publié le 11/10/2005 Dernière mise à jour le 11/10/2005 à 10:50 TU

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Franck Bassner

Directeur de l'Institut franco-allemand de Ludwigsburg

«En Allemagne, entre la CDU et le SPD, des dossiers comme la réforme de la sécurité sociale, l'assurance maladie risquent de bloquer.»

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