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Economie

Echec en vue à Hong Kong

A l'ouverture de la conférence de l'OMC, des manifestations altermondialistes ont eu lieu à Hong Kong mais aussi aux Philippines. Sur l'affiche: «L'OMC à la poubelle!».(Photo: AFP)
A l'ouverture de la conférence de l'OMC, des manifestations altermondialistes ont eu lieu à Hong Kong mais aussi aux Philippines. Sur l'affiche: «L'OMC à la poubelle!».
(Photo: AFP)
Les 149 pays membres de l’Organisation mondiale du commerce entament leur travaux ce mardi à Hong Kong. La réunion, dans la grande métropole asiatique, doit faire avancer la libéralisation du commerce mondial. Mais les blocages sont tellement forts, notamment concernant les subventions agricoles des pays du Nord, que la réunion risque d’échouer.

Les altermondialistes n’ont pas attendu l’ouverture de la conférence ministérielle, prévue mardi, pour défiler dans les rues de Hong Kong contre l’Organisation mondiale du commerce. Dès dimanche, les opposants à l’ouverture des marchés ont arpenté les rues de la grande métropole asiatique pour dénoncer par avance les résultats de cette réunion qui rassemble les 149 pays membres de l’organisation internationale.

Parmi ces milliers de manifestants altermondialistes qui affluent vers Hong Kong, des militants sud-coréens. Réputés pour leur manière musclée de manifester, ils ont participé au défilé dès dimanche. Yang Kyeong-kyoo, représentant de la Confédération coréenne des syndicats, a indiqué que des «actions extrêmes» seraient menées pendant la réunion ministérielle. Le représentant sud-coréen n’a pas exclu que des militants se suicident, comme certains l’ont fait par le passé pour montrer leur désespoir. Lors de la précédente conférence de l’OMC, à Cancun (Mexique), en 2003, un représentant des fermiers sud-coréens s’était poignardé à mort. Chaque fois, les opposants sud-coréens protestent contre l’ouverture du marché du riz, ouverture qui fait baisser les revenus des producteurs nationaux.

Un autre représentant du monde agricole a fait sensation à son arrivée à Hong Kong. C’est le français José Bové. Bloqué dans le centre de rétention de l’aéroport, l’ancien porte-parole de la Confédération paysanne, syndicat agricole français, n’est sorti de l’aéroport que grâce à l’intervention de Christine Lagarde, ministre française déléguée au Commerce extérieur, et grâce à Pascal Lamy, le Français qui dirige actuellement l’Organisation mondiale du commerce. José Bové, qui milite désormais aux côtés des altermondialistes, a promis de lutter «toujours pacifiquement…Mais on ne doit pas pour autant mettre nos idées dans nos poches».

Paris ne veut pas de nouvelles concessions

Les contestataires ont donc commencé à se frotter à la police de Hong Kong, tandis que les personnalités, arrivées sur place, ont une nouvelle fois fait passer leur message. Peter Mandelson, commissaire européen au Commerce, a répété qu’il n’allait pas proposer «une nouvelle offre sur l’agriculture. Il revient donc aux autres de faire des offres améliorées dans des domaines clefs des négociations».

L’Union européenne a déjà proposé de réduire d’un taux variant entre 35% et 60% les droits de douane qu’elle prélève sur les produits agricoles provenant de pays extérieurs à l’Union. Peter Mandelson représente les 25, il négociera sous leur surveillance. La France notamment souhaite que le commissaire européen reste ferme. Paris ne veut pas de nouvelles concessions tarifaires dans le domaine agricole, des concessions susceptibles de perturber les aides européennes organisées dans le cadre de la Politique agricole commune. Ces aides européennes ont régulièrement baissé. Elles sont pérennisées jusqu’en 2012 même si Tony Blair, président actuel de l’UE, veut les réduire avant l’échéance.

Les Etats-Unis de leur côté ont proposé de diminuer leurs droits de douane sur les produits agricoles importés en allant parfois jusqu’à une baisse de 90% de ces barrières tarifaires. Washington s’oppose depuis longtemps à l’Union européenne sur ce niveau de protection, chacun des deux camps voulant soutenir son secteur agricole.

Malgré les déclarations d’intention, les Américains ont, au cours des dix dernières années, augmenté leurs subventions à leurs filières de production comme le coton, les céréales, le sucre ou les produits laitiers. C’est ce qu’indique une étude réalisée par un groupe de recherche indépendant, Environmental Working Group. De plus, malgré la volonté affichée de diminuer les aides à l’exportation, des subventions internes permettent au gouvernement américain de soutenir ses marchés, en interne. L’aide alimentaire est également utilisée comme un moyen d’exporter des denrées agricoles.

La bataille des chiffres

Il est difficile de se faire une idée exacte des aides apportées effectivement à l’agriculture. A Hong Kong cependant, les négociateurs devront faire parler les chiffres. Qu’il s’agisse de l’Union européenne ou des Etats-Unis, toute concession en suppose une autre, dans un autre secteur à ouvrir comme l’industrie ou les services.

Dans ce face à face entre les deux géants agricoles, le Brésil se positionne comme médiateur. Celso Amorim, ministre brésilien des Affaires étrangères, a fait une proposition, au nom des pays émergents, affiliés au G20. Américains et Européens accepteraient de faire un bout du chemin, de baisser leurs barrières pour laisser entrer des produits de l’extérieur. Le Brésil pourrait bénéficier de ces nouveaux débouchés. Et il s’ouvrirait à des produits industriels extérieurs.

Le commissaire européen au Commerce, Peter Mandelson, a par ailleurs estimé que les efforts des ministres, réunis jusqu’à samedi, doivent porter sur l’ouverture des marchés à des produits venant de pays en développement. «Je pense que cela enracinerait ces négociations dans le monde réel, ça leur donnerait un visage humain», a indiqué le représentant européen. Pour donner une image positive de l’ouverture des marchés, l’OMC la présente comme un moyen de réduire la pauvreté.

De son côté la FAO, l’organisation des Nations unies pour l’alimentation et l’agriculture, estime, dans un rapport publié il y a quelques jours, que les réformes envisagées par l’OMC, pour profiter aux pauvres, doivent être complétées par des politiques d’accompagnement et des investissements. Dans l’absolu, indique encore ce rapport, ceux qui ont le plus à gagner d’une libéralisation du commerce agricole, sont les pays industrialisés.


par Colette  Thomas

Article publié le 12/12/2005 Dernière mise à jour le 12/12/2005 à 17:21 TU

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Lin Zuqiang

Journaliste à la rédaction en langue chinoise de RFI

«Depuis son adhésion à l'OMC, la Chine a doublé le chiffre de son commerce extérieur.»

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