Kenya

Famine : appel à l’aide internationale

Dans la province de Mandera, au nord-est du Kenya - région la plus touchée par la famine - près de 30% du cheptel a déjà péri.
(Photo: AFP)

Le président Mwai Kibaki a déclaré la famine qui frappe le Nord du Kenya « catastrophe nationale », lors de son discours de fin d’année. Deux millions et demi de personnes – soit un Kenyan sur douze - sont menacées par une disette qui devrait durer six mois.

De notre correspondant à Nairobi

A Mandera, Wajir, Garissa, et Marsabit, les districts les plus durement touchés, les habitants doivent parfois marcher jusqu’à 40 kilomètres par jour pour trouver un point d’eau. Ils se limitent souvent à un seul et maigre repas quotidien, et le taux de malnutrition est sévère puisqu’il oscille entre 18 et 30%. Dans ces régions arides et difficiles d’accès, qui avoisinent les frontières avec la Somalie et l’Ethiopie, 30 personnes sont déjà mortes.

Les pluies, fortement insuffisantes depuis 2003, ont été particulièrement faibles lors des trois dernières saisons. Les nappes phréatiques sont quasiment taries, et les puits s’assèchent rapidement, conséquence de leur surexploitation par des populations assoiffées. La prochaine saison des pluies, si elle se manifeste, n’est attendue qu’au mois de mars prochain.

Dans certains districts, près de 30% du cheptel a déjà péri. La catastrophe est de taille pour des populations pastorales semi-nomades qui vivent principalement de l’élevage des chèvres et des vaches. Le prix du bétail émacié a chuté de façon vertigineuse. Les habitants perdent ainsi tout revenu, et deviennent dangereusement dépendants d’une assistance alimentaire qui se mobilise lentement.

Le gouvernement est accusé de réagir trop tard et trop lentement, après des mois d’indifférence. Le département météorologique kenyan avait en effet tiré la sonnette d’alarme il y a un an, les images satellites annonçant la sécheresse. Dès le mois de septembre dernier, le Fonds des Nations unies pour l’enfance (UNICEF) cherchait 4 millions de dollars pour nourrir les populations les plus vulnérables. Plusieurs autres agences onusiennes ont également lancé des appels de fonds, souvent restés sans suite.

Réaction tardive

Aujourd’hui, la facture est estimée à plus de 150 millions de dollars. Le gouvernement, qui a mobilisé 40 millions de dollars, a lancé un appel à la solidarité internationale. En attendant, l’armée a été mobilisée afin de distribuer des milliers de sacs de haricots et de riz.

C’est une réaction bien tardive, selon la presse kenyane, qui s’interrogeait pendant les fêtes de Noël sur le fait de savoir si le gouvernement aurait réagi sans la grande campagne médiatique lancée par plusieurs médias nationaux, journaux et télévisions. Les autorités sont accusées de ne pas avoir écouté les nombreux avertissements lancés par plusieurs systèmes de surveillance de la sécurité alimentaire. La société civile, elle, reproche au gouvernement d’avoir gaspillé temps et ressources sur une campagne référendaire chère au président, mais qui s’est soldée par le rejet du projet de nouvelle constitution, le 21 novembre dernier.

Pourtant, les récoltes ont été bonnes sur le reste du territoire kenyan. Il ne s’agirait alors non pas d’un problème de quantité de nourriture, mais bien de solidarité nationale. La Croix-Rouge kenyane a donc appelé le gouvernement à constituer un fonds permanent de réaction rapide à cette catastrophe récurrente.

Autre préoccupation des autorités : la compétition pour l’accès à l’eau et les pâturages risque de relancer les affrontements entre clans et tribus. Dans ces régions mal contrôlées par le gouvernement, les armes automatiques sont extrêmement nombreuses. Or, les tentatives de médiation entre les tribus qui se sont affrontées en juillet dernier, faisant plus de 80 victimes, ont échoué, la semaine dernière.

par Hilaire  Avril

Article publié le 02/01/2006 Dernière mise à jour le 02/01/2006 à 17:21 TU