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Sri Lanka

Entre guerre et négociations

Trois attaques à la bombe attribuées aux rebelles tamouls ont fait au moins quatre morts jeudi dans l'est du pays. Colombo est sous haute sécurité.(Photo : Mouhssine Ennaimi/RFI)
Trois attaques à la bombe attribuées aux rebelles tamouls ont fait au moins quatre morts jeudi dans l'est du pays. Colombo est sous haute sécurité.
(Photo : Mouhssine Ennaimi/RFI)
A l'heure où le pays devrait fêter les quatre années de cessez-le-feu entre l'armée sri lankaise et les Tigres de libération de l'Eelam Tamoul (LTTE), jamais, le pays ne s'est trouvé aussi près d'un retour au conflit armé. Depuis les élections présidentielles de novembre dernier, le Sri Lanka s'éloigne de plus en plus de la paix au moment où le médiateur norvégien, Eric Solheim, revient pour tenter de ramener les deux parties à la table des négociations.

De notre correspondant à Colombo

La paix était l'enjeu principal de la campagne présidentielle de novembre dernier. Le vainqueur, Mahinda Rajapakse, a promis une «nouvelle approche, une nouvelle initiative pour résoudre le conflit». Moins de cent jours plus tard, «le candidat de la guerre», comme il a été rebaptisé, est à la tête d'un pays où les violences ont fait près de 150 morts, dont une centaine de civils. Jaffna, Trincomalee, Batticaloa, aucune des grandes métropoles du nord et de l'est de l'île n'échappent aux agressions et aux attentats. Les incidents sont tellement nombreux qu'aucun habitant ne peut dire combien il y a eu de violations flagrantes de la trêve ces deux derniers mois.

«Il semblerait que la stratégie du président prend l'eau. Il comptait sur l'appui de la super-puissance voisine, l'Inde. Or, l'Inde s'est désengagée. Le président s'est replié sur les Etats-Unis. Même si les USA soutiennent les autorités, ils ne vont pour autant s'investir dans le conflit. Et ça, les Tigres le savent», confie un diplomate qui tient à son anonymat. Il est vrai que les voyages diplomatiques se sont multipliés. Le ministre des Affaires étrangères, Mangala Samaraweera, a rencontré la secrétaire d'Etat américaine Condoleezza Rice en début d'année alors que le président rentrait à peine de Delhi.

Dialogue rompu

Sur la sellette pendant les présidentielles, la Norvège revient sur le devant de la scène. Eric Solheim, le médiateur norvégien entame ce lundi, une visite sur l'île pour ramener les adversaires à la table des négociations. «Le dialogue est rompu. C'est la cause majeure du problème. Il y a énormément de méfiance réciproque et seule une rencontre directe pourrait résoudre les violences rencontrées sur le terrain», indique Helen Olafsdottir, porte-parole de la mission scandinave chargée de la surveillance de la trêve. Tout le monde s'accorde à dire qu'il faudrait renégocier les accords de cessez-le-feu signé en 2002. Or, pour l'instant, les protagonistes en sont seulement à négocier l'endroit où devrait avoir lieu l'éventuelle rencontre. Récemment un auteur du Morning Leader, un des journaux publiés à Colombo, conseillait d’organiser cette rencontre sur un bateau, si aucune capitale mondiale ne satisfait à la fois le gouvernement et la rébellion. Un véritable cri d'alarme pour dire qu'il faut agir vite.

Vendredi, tous les journaux anglophones titraient sur l'unanimité de tous les partis politiques du pays. Pour eux, les discussions doivent commencer et ce, dès que possible. La situation sur le terrain devient insoutenable et les marchés financiers en subissent les conséquences. Pendant sa visite, Eric Solheim devrait rencontrer tous les caciques de la rébellion, y compris Velupilai Prabakharan, le leader militaire du LTTE. Anton Balasingham, le mentor de la cause tamoule a même fait le voyage depuis Londres – où il séjourne pour des raisons de santé – jusqu’à Kilinochchi, le fief de la guérilla séparatiste.

Martin Mc Guiness devrait lui-aussi participer aux réunions prévues la semaine prochaine. Invité par une ONG de soutien à la paix, le négociateur du Sin Fein, l'aile politique de l'ex-IRA, va tenter d'apporter son expérience en essayant de convaincre la guérilla tamoule d'abandonner la lutte armée et de rejoindre le jeu politique.

En provoquant l'élection du candidat bouddhiste nationaliste Mahinda Rajapakse, le LTTE laisse deux options au gouvernement. Poursuivre le processus de paix ou relancer le conflit armé. Etant donné l'hostilité annoncée du président au partage de pouvoir, la rébellion endosse le rôle de victime et tente de faire plier le gouvernement. Les provocations sur le terrain font monter les enchères avant la renégociation éventuelle des accords de cessez-le-feu.


par Mouhssine  Ennaimi

Article publié le 22/01/2006 Dernière mise à jour le 22/01/2006 à 16:23 TU