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Réchauffement de la planète

La Russie et le Canada en rêvent

Pour le moment il faut utiliser, une bonne partie de l'année, des brise-glaces pour créer des passages dans l'océan Arctique.(Photo : AFP)
Pour le moment il faut utiliser, une bonne partie de l'année, des brise-glaces pour créer des passages dans l'océan Arctique.
(Photo : AFP)
Une nouvelle étude britannique montre que le réchauffement de la planète n’a jamais été aussi fort et aussi durable. Les chercheurs ont réussi à remonter 1 200 ans en arrière. Leurs conclusions vont relancer le débat sur la responsabilité de l’homme dans ces changements climatiques. Pourtant, ils n’ont pas que des mauvais côtés notamment pour une partie de l’hémisphère Nord.

Les deux scientifiques de l’université d’East Anglia, en Grande-Bretagne, ont rassemblé leurs données sur le climat à travers les siècles selon plusieurs méthodes. Ils ont d’abord utilisé la climatologie d’aujourd’hui : elle permet, en effectuant des carottages dans des couches de glace ne dégelant jamais, de donner un âge aux bulles d’air emprisonnées dans cette glace. Leur composition permet également de connaître leur teneur en gaz carbonique. Il est, on le sait, le premier responsable du réchauffement de la planète. Depuis la fin du dix-neuvième siècle, la présence de gaz carbonique a tellement augmenté dans l’atmosphère que le phénomène inquiète les chercheurs. Ils ont d’ailleurs détecté le début des changements climatiques actuels en étudiant la composition de ces bulles d’air emprisonnées dans les glaces polaires.

Les deux britanniques ont également utilisé une méthode avec laquelle on évalue l’âge des arbres. Il faut examiner leurs anneaux de croissance, visibles à l’intérieur du tronc. Si ces anneaux donnent l’âge d’un arbre, l’espace, la distance entre deux anneaux indique également dans quelles conditions un arbre a poussé. Si l’espace entre deux cercles est important, l’année a été chaude. Des températures élevées avaient contribué à le faire pousser plus. Comme certains arbres vivent pendant plusieurs siècles, les climatologues ont des données dans la durée.

Malgré l’alerte donnée par les chercheurs au cours des dernières décennies, le réchauffement de la planète fait débat. Certains scientifiques sont sceptiques. Ils estiment que le réchauffement actuel entre dans les variations habituelles du climat. Des études sur de longues périodes ont montré qu’un cycle chaud peut succéder à un cycle froid, chacun durant plusieurs milliers d’années.

Des indices scientifiques et des témoignages

Pour contourner cette question de la variation naturelle du climat, les deux climatologues britanniques ont donc comparé la période de réchauffement actuelle à d’autres plus anciennes. Les données de la dernière enquête remontent jusqu’à l’an 800. Les deux spécialistes se sont appuyés sur des témoignages retrouvés dans des journaux écrits par des particuliers, racontant des épisodes climatiques inhabituels comme le gel d’un canal en Belgique et aux Pays-Bas. Avec ces indices, une période de réchauffement a donc été confirmée au Moyen-âge, dans l’hémisphère nord, entre 890 et 1170. Pour cette période, d’autres scientifiques ont déjà parlé « d’un optimum climatique médiéval », qui a duré jusqu’au début du XIVe siècle. Les chercheurs britanniques, avec leur méthode de travail, viennent également de confirmer une longue période de refroidissement entre 1580 et 1850, période que d’autres scientifiques ont baptisé « la petite ère glaciaire ».

Toutes ces informations, trouvées avec des moyens de recherche différents, ont été comparées aux températures systématiquement relevées depuis 1856. Les chercheurs en concluent que la période de réchauffement actuelle est la plus forte depuis le IXe siècle, et la plus longue également.

Un bon côté du réchauffement

Les scientifiques présentent toujours les changements climatiques comme un phénomène dangereux. Il est vrai que la saison 2005 des cyclones a été particulièrement marquée et dévastatrice. Et en Europe, les hivers et les étés semblent désormais plus contrastés. L’homme va chercher à se protéger de ces modifications climatiques. Cependant le réchauffement, au niveau des pôles, pourrait avoir des effets positifs.

Depuis une dizaine d’années, les glaces de l’océan Arctique reculent, aussi bien à l’extrémité nord du Canada, constituée d’îles, qu’en Sibérie, partie nord de la Russie. En ce qui concerne les territoires canadiens les plus près du pôle Nord, les scientifiques estiment que la banquise permanente qui les entoure va disparaître d’ici une vingtaine d’années. Les climatologues pensent même que si le réchauffement se poursuit au rythme actuel, en 2050, l’océan Arctique pourrait être, en été, libre de glace.

Si le Canada y voit des avantages, la Russie en profitera aussi. Une route nouvelle pourrait s’ouvrir dans l’océan Arctique où, pour le moment, pendant une bonne partie de l’année, il faut utiliser des brise-glaces pour créer des passages qui se referment presque aussitôt. Si cette nouvelle route maritime devenait praticable, les distances entre l’Europe et l’Asie seraient considérablement réduites. Le coût du trafic diminuerait d’autant. En prenant la direction de l’Asie par le passage du Nord-Ouest, la distance entre Londres et Tokyo est de 15 700 kilomètres au lieu de 23 300 par le canal de Panama, ou 21 200 par le canal de Suez.

La Russie, qui accueille un G8 consacré à l’énergie, a montré, cet hiver, combien elle peut jouer un rôle crucial dans l’approvisionnement énergétique de l’Europe. Une nouvelle route maritime, praticable toute l’année, le long des côtes nord du pays, lui donnera un pouvoir stratégique. Pour le moment, les pays ayant une souveraineté territoriale dans les parages du pôle Nord, constatent le recul inexorable de la banquise et rêvent de l’émergence d’un nouvel eldorado. 


par Colette  Thomas

Article publié le 10/02/2006 Dernière mise à jour le 10/02/2006 à 17:47 TU