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Territoires palestiniens

Menace de crise humanitaire

Le centre de distribution de nourriture de l'UNRWA, à Gaza, où normalement sont livrés des sacs de farine.(Photo : un.org.unrwa)
Le centre de distribution de nourriture de l'UNRWA, à Gaza, où normalement sont livrés des sacs de farine.
(Photo : un.org.unrwa)
A Bruxelles, les Nations unies, dont une antenne assiste les Palestiniens, lancent un cri d’alarme : le bouclage des Territoires palestiniens par Israël risque de provoquer une crise humanitaire.

Karen Koning Abuzayd, commissaire général de l'agence de l'ONU pour les réfugiés de Palestine, UNRWA.(Photo : un.org.unrwa)
Karen Koning AbuZayd, commissaire général de l'agence de l'ONU pour les réfugiés de Palestine, UNRWA.
(Photo : un.org.unrwa)

Karen AbuZayd est venue passer trois jours à Bruxelles, où siège la Commission européenne, pour plaider la cause des Palestiniens. L’organisation qu’elle dirige, l’UNRWA (Office de secours et de travaux des Nations unies pour les réfugiés de Palestine dans le Proche-Orient), est confrontée à des pénuries graves dans les Territoires. « Pour la toute première fois, nous, à l’UNRWA, manquons de carburant et les boulangeries de Gaza manquent de farine », a expliqué Karen AbuZayd au cours de son séjour dans la capitale de l’Union européenne.

Après la victoire du Hamas aux élections législatives du 25 janvier dernier, Israël a pris des mesures de rétorsion contre ce parti qualifié de « terroriste ». La mesure la plus draconienne est de ne plus reverser à l’Autorité palestinienne des taxes prélevées sur les marchandises destinées aux Palestiniens. Elles représentaient la moitié des revenus de l’Autorité palestinienne. Pour la responsable de l’assistance aux Palestiniens, la sanction financière prise par Jérusalem risque de provoquer une crise humanitaire grave. En plus, si les salaires ne sont pas versés, « nous pourrions assister à un effondrement de la loi et de l’ordre », a prévenu Karen AbuZayd. L’argent des taxes sert en effet pour moitié à payer les salaires des forces de sécurité. La responsable de l’UNRWA a déclaré qu’elle espérait que la situation « soit corrigée après les élections israéliennes » du 28 mars.

Une aide, même de nature différente

Après la victoire du Hamas aux élections de janvier, les Américains ont annoncé qu’ils ne fourniraient plus qu’une aide humanitaire aux Palestiniens. L’Union européenne, le plus gros contributeur des Territoires, a pour sa part décidé de donner du temps au parti islamiste pour qu’il ait la possibilité de changer son idéologie, en particulier à l’égard d’Israël. Réunis en début de semaine, les ministres des Affaires étrangères de l’Union ont laissé la question en suspens. Ils ont reporté leur décision sur l’aide financière fournie régulièrement aux Palestiniens. L’idée est de donner du temps au parti islamiste pour qu’il prenne des positions plus modérées envers Israël. La charte fondamentale de ce parti appelle toujours à la destruction de l’Etat juif.

« Si certains types d’aides sont supprimés, il y aura un besoin plus pressant d’aide humanitaire », a encore lancé Karen AbuZayd qui compte bien remplacer un soutien financier par un autre, fourni cependant par les mêmes contributeurs. La responsable de l’UNRWA a par ailleurs exhorté la communauté internationale à « observer ce que le nouveau gouvernement de la Palestine va faire, lui accorder une petite chance ».

« Pour la première fois, il y a des files d’attente devant les boulangeries de Gaza et des gens qui viennent dans les camps de réfugiés pour avoir des médicaments qu’ils ne trouvent plus dans les pharmacies », a encore expliqué la responsable des Nations unies pour l’aide aux Palestiniens. Pour elle, ces pénuries sont liées aux élections en Israël et « à la nécessité, pour ceux qui font campagne, de paraître très fermes ». Mi-février déjà, un conseiller du Premier ministre israélien par intérim, Dov Weisglass, avait déclaré que l'idée c'était d'imposer une diète aux Palestiniens, mais pas de les faire mourir de faim. 

Que ce soit côté palestinien ou côté israélien, les élections de la semaine prochaine inquiètent. A Jérusalem en particulier, les forces de sécurité israéliennes redoutent des attentats suicide susceptibles d’influencer le vote des Israéliens. Ces forces auraient des renseignements indiquant que le Jihad islamique serait en train de préparer plusieurs attentats. Des responsables de Kadima, le parti centriste du Premier ministre par intérim Ehud Olmert, s’inquiètent de l’impact négatif que pourrait avoir un « gros » attentat. Ce parti, selon les sondages, devrait gagner les élections.

Les Palestiniens, eux, pensent qu’ils seront les grands perdants de ce scrutin car leur vie quotidienne est étroitement liée à Israël. « Quel que soit le parti qui gagne, je suis certain que les Israéliens ne reviendront pas à la table de négociation », a déclaré Saëb Erakat, principal négociateur palestinien. « Comment allons-nous nous approvisionner en eau, en nourriture, nous soigner ? », s’interroge-t-il.

Tous les responsables israéliens, de droite comme de gauche, ont exclu de travailler avec le Hamas. Sur le terrain, les Palestiniens continuent de payer leur vote pour le parti radical. Si un point de passage a été mis en service, mercredi, au sud de la bande de Gaza, pour permettre l’acheminement de marchandises en provenance d’Egypte, Karni, le point de passage le plus important, reste presque totalement fermé. L’UNRWA a réussi à y faire passer des marchandises au compte-gouttes. Seule une ouverture totale de ce point de passage permettra d’éviter la crise humanitaire, a déclaré, sur place, le directeur de l’organisation, tandis que sa présidente tenait le même discours à Bruxelles.


par Colette  Thomas

Article publié le 23/03/2006 Dernière mise à jour le 23/03/2006 à 16:13 TU