France
Les Français en manque de solidarité
(Photo : mairie-marseille.fr)
Exister dans la collectivité et se mettre au service des autres. Les jeunes d’aujourd’hui ne sont plus les individualistes d’hier et ils sont prêts, à une écrasante majorité, à faire un service civil pour assister les autres, en particulier les plus pauvres. En pleine crise du CPE, le contrat première embauche, le tout dernier sondage réalisé pour le Cidem (collectif d’associations civisme et démocratie*) montre que les jeunes ne pensent pas qu’à leurs études et au parcours du combattant qui les attend pour trouver un emploi.
Neuf jeunes sur dix interrogés dans ce sondage se déclarent prêts à s’engager dans un service civique d’intérêt général. Ils souhaitent même que ce service soit obligatoire, tout en étant partisans de « saucissonner » ce temps offert à la collectivité en plusieurs périodes courtes. Les jeunes qui ont donné leur point de vue dans ce sondage souhaitent également, pour 45% d’entre eux, s’investir d’abord en portant assistance aux personnes les plus pauvres. Et pour 42% d’entre eux, l’aide aux personnes âgées et isolées serait la priorité de ce service civique, s’il est mis en place.
Les adultes ont également été interrogés sur la création de ce service civique et 91% des personnes interrogées se sont également prononcées en faveur de cette idée. Comme les jeunes, les adultes pensent que ce service devrait servir à secourir les personnes en grande difficulté sociale, les personnes âgées, les handicapés.
Un service civil volontaire en projet
Ce baromètre de la citoyenneté n’est pas le premier du genre puisque le Cidem en a déjà commandé six depuis sa création, il y a quatre ans, pour évaluer la relation entre les citoyens et le monde politique. Cette fois, le sondage a cherché à connaître dans quel état d’esprit sont les jeunes par rapport au service civique. Les questions ont été posées en pleine crise du CPE.
Depuis plusieurs mois, La Vie cherche à porter ce projet. De son côté, après la crise des banlieues, Jacques Chirac s’était prononcé pour la mise en place d’un service civil volontaire. L’hebdomadaire propose donc au chef de l’Etat d’aller plus loin et de soutenir cette idée d’un service obligatoire, puisque les jeunes interrogés sont majoritairement pour. Dans son éditorial, le journal écrit que « les manifestations autour du CPE révèlent de multiples angoisses, mais aussi une aspiration à un monde plus solidaire ».
« C’est à travers les autres et en démultipliant les relations sociales que l’on devient soi-même », explique le sociologue Roger Sue. Jusqu’à présent, les jeunes qui voulaient aider les autres, s’engageaient plutôt dans des actions en direction des populations des pays en développement. Ces jeunes gens prenaient des contrats temporaires, même peu payés, pour donner le meilleur d’eux-mêmes à des causes lointaines. Maintenant, avec ce nouveau service qui serait « laïc, universel et obligatoire », il serait plutôt question de « contribuer au bien commun en donnant de son temps ». La contrepartie serait d’avoir « les droits que garantit la République ».
La création du service civil volontaire voulue en novembre dernier par le président Chirac n’a pas tardé puisqu’elle est prévue dans la loi pour l’égalité des chances, loi dont on parle beaucoup en ce moment puisqu’elle comprend l’article -tant décrié- annonçant la création du contrat première embauche. Le volet associatif, dans lequel les jeunes pourraient exprimer leur générosité, est donc en préparation. Il n’est pas prévu pour le moment de lui donner un caractère obligatoire.
D’autres aspects de ce programme ont déjà été mis en place comme le programme des « cadets de la République » qui propose une formation de 12 mois pour préparer les concours de gardien de la paix. Un autre programme « défense deuxième chance » est destiné à des jeunes en échec scolaire. L’armée les encadre pour leur apprendre un métier et décoder les règles de la vie sociale.
Au moment où le service civil est sur le point de s’institutionnaliser, les associations rappellent qu’elles encadrent depuis des années des jeunes en mal de solidarité, qui assistent des personnes démunies, isolées, pour qu’elles ne perdent pas pied dans la société. En contre partie, ces associations offrent déjà à ces volontaires des conseils pour préparer leur avenir professionnel. Ces expériences sont peu connues et à mille lieues du service militaire obligatoire, longtemps le cauchemar des jeunes Français.
par Colette Thomas
Article publié le 30/03/2006 Dernière mise à jour le 30/03/2006 à 16:58 TU
* L'association Civisme et Démocratie - CIDEM - est fondée en 1984 par la Ligue des Droits de l’Homme et la Ligue de l'Enseignement. Elle regroupe aujourd'hui 11 associations très diverses.
