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Thaïlande

Les élections radicalisent le conflit

Interview télévisée du Premier ministre thaïlandais, Thaksin Shinawatra le 3 avril 2006.(Photo: AFP)
Interview télévisée du Premier ministre thaïlandais, Thaksin Shinawatra le 3 avril 2006.
(Photo: AFP)
Après le revers essuyé lors des législatives de dimanche, le Premier ministre thaïlandais Thaksin Shinawatra annonce qu'il est prêt à remettre le pouvoir au successeur qui lui sera désigné.

De notre correspondant à Bangkok

Deux jours après les élections législatives en Thaïlande, il apparaît clairement que le Premier ministre a raté son objectif : mettre un terme à un mouvement de contestation qui dénonce son « manque d’éthique » et réclame son départ. Le message envoyé par les électeurs a pourtant été clair, à tout le moins dans la capitale qui compte six millions d’habitants. Plus de 50 % des suffrages à Bangkok ont été des bulletins blancs, une première dans l’histoire politique du royaume. Dans les provinces du sud du pays – aussi bien dans la partie musulmane que dans les zones dominées par les bouddhistes -, le rejet de son parti Thai Rak Thai (les Thaïlandais aiment les Thaïlandais) a été encore plus net : plusieurs dizaines de candidats, qui  concourraient sans rival, n’ont pas obtenu les 20 % de voix nécessaires pour que l’élection soit valable. Les provinces du Nord, d’où Thaksin est originaire, et du Nord-Est, région très peuplée et laissée pour compte du développement économique, ont voté massivement pour le parti de Thaksin. Le royaume est donc nettement divisé, selon une ligne Nord Ouest – Sud Est.

Dans une intervention télévisée lundi soir, Thaksin, un ancien homme d’affaire accusé de conflits d’intérêts et d’abus de pouvoir, a estimé avoir remporté une victoire. « J’ai obtenu 16 millions de voix. Les dix millions de bulletins blancs n’ont rien de surprenant, ils représentent les voix de ceux qui auraient voté pour les trois partis d’opposition (qui ont boycotté le scrutin, ndlr) », a-t-il affirmé. Le rejet massif dans les quinze provinces du Sud où le vote blanc a partout dépassé le nombre de bulletins pour le parti Thai Rak Thai ? « On sait depuis longtemps que le Sud est un bastion de l’opposition. Nous avions prévu tout cela », assène-t-il. L’apparent désarroi au sein de la direction du Thai Rak Thai, dimanche soir, quand l’ampleur du vote de protestation a été connu, a laissé place à une humeur combative. « Où que j’aille les gens m’encouragent. Ceux qui veulent que je parte doivent me donner de bonnes raisons, pour que je puisse expliquer mon retrait aux 16 millions de gens qui ont voté pour moi », a-t-il indiqué au cours du débat.

L’usage de la force en « ultime recours »

Pour résoudre la crise politique qui entre dans son troisième mois, Thaksin propose la formation d’une commission indépendante de sages, composée de juges de la cour suprêmes à la retraite, d’anciens premiers ministres et d’ex-présidents du parlement. Cette commission serait chargé d’entendre toutes les parties au conflit et de proposer des solutions. « Tout le monde devra suivre les recommandations de la commission, y compris moi », a expliqué le premier ministre.

L’Alliance populaire pour la démocratie, le mouvement rassemblant des organisations de la société civile qui a organisé les manifestations anti-gouvernementales, a rejeté cette proposition. Plusieurs voix au sein de l’influente communauté d’affaires sino-thaïlandaises estiment aussi que l’option proposée par Thaksin ne fera que prolonger une crise qui pourrait écorner la bonne situation économique. « Qui nommera les membres de cette commission ? Si c’est Thaksin, cela ne marchera pas. Le Thai Rak Thai a remporté une majorité, mais sûrement pas un mandat. La popularité de Thaksin a chuté, c’est une simple question de bon sens », a indiqué Pornsil Patchrintanakul, vice-secrétaire générale au Bureau du Commerce, au quotidien Bangkok Post.

On semble donc s’orienter vers une radicalisation des positions de part et d’autre. L’Alliance anti-Thaksin a appellé à une reprise des manifestations ; un rassemblement massif est prévu dimanche prochain à Bangkok. Interrogé sur la manière de mettre un terme à cette opposition dans les rues, le Premier ministre a indiqué qu’en « ultime recours », il pourrait utiliser la force pour rétablir l’ordre. « Si on utilise uniquement des moyens politiques, ces manifestations vont se poursuivre pendant encore sept ans », a-t-il dit. La polarisation croissante augmente aussi les risques d’affrontements entre les détracteurs et les partisans de Thaksin, ces derniers ayant montrant la semaine dernière qu’ils n’hésitaient pas à employer la violence pour affirmer leurs vues.


par Arnaud  Dubus

Article publié le 04/04/2006 Dernière mise à jour le 04/04/2006 à 08:23 TU

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[06/03/2006]

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