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Népal

Le dilemme indien

Un roi Gyanendra affaibli ou une coalition de partis divisés ne serait pas pour déplaire à l'Inde.(Photo : AFP)
Un roi Gyanendra affaibli ou une coalition de partis divisés ne serait pas pour déplaire à l'Inde.
(Photo : AFP)
Jeudi, l’alliance des sept partis politiques de l’opposition a prévu d’assiéger le palais royal, dans la capitale Katmandou. Voilà 14 jours, qu’elle maintient la pression sur le monarque, avec l’appui massif de la rue, qui milite pour le retour à la démocratie. La tension est à son paroxysme dans le pays tout entier. Mardi, les émeutes ont fait une sixième victime, une femme, touchée au visage par une grenade à 500 kilomètres à l’ouest de la capitale.

De notre correspondante à New Delhi

Le roi Gyanendra, les lèvres toujours pincées, ne sait pas comment répondre à la colère de la rue. Il réprime la contestation en organisant des vagues de rafles. A Pokhara, ville touristique située à l’ouest de Katmandou, 250 professeurs ont été arrêtés mercredi pour avoir bravé l’interdiction du couvre-feu, mis en place pour endiguer l’agitation.

La semaine dernière, les ambassadeurs d’Inde, de Chine et des Etats-Unis au Népal ont tenté de l’amener à la table des négociations, sans succès. Le message transmis samedi dernier par Shiv Shanker Mukherjee, ambassadeur d’Inde au Népal  était pourtant bien clair : « il faut instaurer un dialogue impératif entre la monarchie et les partis politiques ». Mais le souverain fait toujours la source oreille, à la grande inquiétude des autorités indiennes. « Nous ne voulons pas nous immiscer dans les affaires intérieures d’autres pays, mais la situation au Népal semble devenir incontrôlable », a déclaré Karan Singh, président du Conseil des relations culturelles indiennes. Manmohan Singh, le Premier ministre indien, l’envoie tout spécialement au Népal. Il rencontrera jeudi, à Kathmandou, le roi en personne, tout comme le secrétaire indien aux Affaires étrangères, Shyam Saran, de retour du royaume bhoutanais.

Ici, on interprète ce geste comme une tentative de médiation amicale puisque Karan Singh entretient des liens particuliers avec la famille royale. Sa femme, Yashorajya Laxmi Devi est la fille de l’ancien premier ministre népalais Shamsher Jung Bahadur Rana. Au programme de la visite, « inviter les partis politiques à former un gouvernement intérimaire, négocier la paix avec la guérilla maoïste et organiser des élections ».

Les intérêts indiens

L’inquiétude indienne n’est pas nouvelle. Lorsque le monarque népalais s’est arrogé les pleins pouvoirs le 1er février dernier, l’Inde a supprimé son approvisionnement en armes à l’armée royale du Népal. Elle a, par la suite, levé son embargo sur le armes non létales, qui peuvent aller des balles en plastique au gaz lacrymogène. Ces dernières années, elle a fourni pour 100 millions de dollars en matériel de guerre.

New Delhi ne peut pas en effet risquer de perdre cette zone d’influence qu’est le royaume himalayen. Elle a vu d’un mauvais œil le Pakistan, son rival de toujours, proposer des armes à l’armée royale du Népal, et les propos de la Chine qui considère que le problème népalais est un « problème interne ».

L’Inde aussi, a tout intérêt à soutenir l’idée de monarchie et de démocratie, y compris dirigée par un roi despote ou par une alliance de partis politiques népalais faibles et corrompus, qui ne rallient pas les foules, si ce n’est, pour protester contre le roi. Sauf que l’alliance de circonstance passée entre les partis politiques et la guérilla maoïste qui envisage de « former un gouvernement parallèle », selon les partis politiques, a de quoi inquiéter le sous-continent. Si les rebelles maoïstes népalais arrivaient un jour au pouvoir, New Delhi, pourrait craindre un renforcement des liens entre insurgés maoïstes népalais et indiens.

Depuis une quarantaine d’années, l’Inde subit les attaques répétées d’une armée de 10 à 20 000 rebelles maoïstes indiens, les Naxalites. Ils opèrent dans « le corridor rouge », qui s’étend de l’Etat du Bihar, frontalier avec le Népal à l’Andhra Pradesh, au sud du pays. Ménager la chèvre et le chou, c’est un peu la stratégie indienne. Que le pouvoir soit détenu par un roi, une guérilla ou un groupe de politiciens, une chose est sûre, New Delhi souhaite avant tout, « sa sécurité ».


par Marie  Perruchet

Article publié le 19/04/2006 Dernière mise à jour le 19/04/2006 à 18:28 TU

Audio

Pierre Prakash

Envoyé spécial de RFI à Katmandou

«Les gens des banlieues sont sortis par dizaines de milliers tout autour de la capitale. Tous les grands axes sont remplis d'une marée humaine.»

[20/04/2006]

Stéphanie Selle

Responsable de l'ONG «Planète enfants» à Katmandou

«Même parmi ceux qui étaient proches du roi, il y a des gens qui ont rejoint l'opposition.»

[18/04/2006]

Nicolas Vescovacci

Journaliste à RFI

«On assiste à une sorte de polarisation de la société pour se débarrasser du roi.»

[17/04/2006]

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