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Territoires palestiniens

Israël prêt à desserrer l’étau

Le ministre israélien de la Défense, Amir Peretz (au centre), n'est «&nbsp;<em>pas convaincu que l'isolement total de l'Autorité palestinienne affaiblira le Hamas&nbsp;</em>».(Photo : AFP)
Le ministre israélien de la Défense, Amir Peretz (au centre), n'est « pas convaincu que l'isolement total de l'Autorité palestinienne affaiblira le Hamas ».
(Photo : AFP)
Face aux risques de désastre humanitaire à Gaza et en Cisjordanie, le gouvernement israélien emboîte le pas au Quartette pour le Proche-Orient et étudie le déblocage d’une aide d’urgence aux Palestiniens. L’Etat hébreu, qui craint également un retournement de l’opinion internationale en faveur des islamistes du Hamas, pourrait négocier avec le président de l’Autorité palestinienne, le modéré Mahmoud Abbas.

Et si le blocus économique des Territoires palestiniens, censé étouffer le Hamas, ne faisait en réalité que le renforcer ? Certains en Israël le pensent, et désormais jusqu’au gouvernement où plusieurs personnalités se sont prononcées pour une attitude plus souple. Ainsi Amir Peretz, le ministre travailliste de la Défense, propose l’ouverture de négociations avec le président de l’Autorité palestinienne Mahmoud Abbas ainsi que le déblocage d’une aide humanitaire pour les Palestiniens.

« Je ne suis pas convaincu que l'isolement total de l'Autorité palestinienne affaiblira le Hamas et il pourrait avoir l'effet contraire », a-t-il déclaré lors d'une rencontre avec des responsables de la Défense. Selon lui, parallèlement au boycott du gouvernement issu du Hamas, Israël doit conforter la position du président palestinien. Amir Peretz note que la popularité du mouvement islamiste radical ne cesse de monter dans les Territoires palestiniens depuis qu’Israël, l’Union européenne et les Etats-Unis ont imposé des sanctions économiques.

Ces sanctions, le ministre travailliste propose de les assouplir en versant 12 millions de dollars sous forme d’« aide humanitaire ». Cette somme serait prélevée sur les quelque 55 millions de dollars mensuels de taxes et droits de douane perçus sur les marchandises destinées aux Territoires palestiniens transitant par Israël, et dont le gouvernement israélien a gelé le transfert. Un projet détaillé concernant le déblocage de ces fonds sera soumis dimanche au vote du cabinet israélien.

Abbas est « un interlocuteur parfaitement valable »

Faisant écho à la position d’Amir Peretz, la ministre des Affaires étrangères Tzipi Livni s’est  également déclarée favorable à cette aide. Cette ancienne responsable du Likoud (droite) devenue membre de Kadima, le parti fondé par Ariel Sharon, craint un retournement de l’opinion internationale à l’encontre d’Israël. Elle estime qu’une situation de chaos humanitaire à Gaza et en Cisjordanie nuirait profondément à la cohésion du front anti-Hamas, notamment au sein de l’Union européenne.

Quant au vice-Premier ministre Shimon Peres, il a proposé, lui aussi, que le chef du gouvernement Ehud Olmert rencontre prochainement Mahmoud Abbas. Le Premier ministre israélien doit se rendre le 21 mai à Washington pour y demander le soutien de George Bush à son plan de retrait partiel de Cisjordanie. Selon Shimon Peres, la rencontre pourrait se dérouler à son retour. Le président palestinien est « un interlocuteur parfaitement valable pour Israël et il n’y a aucune raison pour ne pas le rencontrer », a-t-il estimé.

Des camions-citernes ont bloqué le Parlement palestinien

Ces prises de positions en Israël surviennent au lendemain de la réunion du Quartette pour le Proche-Orient (Etats-Unis, Union européenne, Russie et ONU). Cette instance a chargé mardi l'Union européenne de créer un « mécanisme temporaire » pour acheminer directement une aide aux Palestiniens, sans passer par le Hamas. La Banque mondiale, l'agence des Nations unies pour les réfugiés palestiniens (UNRWA) ainsi que des responsables arabes ont récemment averti les Occidentaux des risques humains, économiques et sociaux d’une poursuite du blocus des Territoires palestiniens.

Leur mise en garde semble avoir été partiellement entendue. Elle aurait même d’ores et déjà reçu une esquisse de mise en oeuvre. Mercredi, sur une chaîne de télévision israélienne, Tzipi Livni a déclaré que certains des fonds palestiniens bloqués par Israël avaient, en réalité, été utilisés. Selon la ministre, ils ont été redirigés vers des entreprises israéliennes fournissant de l'eau et de l'électricité aux Palestiniens, ou vers des hôpitaux israéliens où se font soigner des Palestiniens : « Israël n'utilisera pas cet argent pour les salaires [des 165 000 fonctionnaires palestiniens qui ne sont plus payés depuis mars] mais est disposé à en utiliser davantage à des fins humanitaires. »

Ces quelques mesures restent, toutefois, bien insuffisantes aux yeux de l’UNRWA et des autorités sanitaires palestiniennes. D’autant qu’une pénurie de gaz domestique et d’essence sévit depuis plusieurs jours dans les Territoires palestiniens. Une cinquantaine de conducteurs de camions-citernes ont bloqué jeudi les abords du Conseil législatif palestinien (CLP, Parlement) pour protester contre la pénurie d'essence dans la bande de Gaza. De nombreuses stations-services sont à sec. La compagnie israélienne Dor-Alon, qui a le monopole des livraisons dans les Territoires palestiniens, a cessé ses approvisionnements pour des factures non réglées. Elle pourrait, selon des sources palestiniennes, reprendre ses livraisons vendredi.


par Philippe  Quillerier

Article publié le 11/05/2006 Dernière mise à jour le 11/05/2006 à 17:15 TU