Rechercher

/ languages

Choisir langue
 

Environnement

La SNCF tentée par le colza

La SNCF va expérimenter le diester comme carburant.(Photo : Colette Thomas / RFI)
La SNCF va expérimenter le diester comme carburant.
(Photo : Colette Thomas / RFI)
Le président Chirac a demandé, au début de l’année, à deux entreprises de service public, la SNCF et la RATP, de ne plus dépendre du pétrole d’ici 20 ans. Depuis, la société nationale des chemins de fer français a décidé d’expérimenter un nouveau carburant pour ses locomotives diesel. Elle a choisi le diester. Ce projet a été présenté par le ministre des transports et le PDG de la SNCF dans le cadre de la semaine du développement durable. Ils se sont déplacés sur le tout nouveau site de maintenance des TGV Est.

C’est dans une automotrice XTER73500 roulant au diester, mélange de gazole et d’huile de colza, que Dominique Perben, le ministre des Transports et Louis Gallois, le PDG de la SNCF, ont quitté la gare de l’Est, à Paris, pour se rendre à quelques kilomètres de là, à Pantin, dans la banlieue nord-est de la capitale. C’est dans le tout nouveau technicentre Est-Européen, dédié à l’entretien des TGV de la nouvelle ligne à grande vitesse Paris-Strasbourg, mais également aux trains Corail, que les deux hommes ont présenté l’expérimentation qui vient de démarrer dans l’entreprise de transport public. 

Dominique Perben approuve les efforts de la SNCF en matière de développement durable.(Photo : Colette Thomas / RFI)
Dominique Perben approuve les efforts de la SNCF en matière de développement durable.
(Photo : Colette Thomas / RFI)

D’ici l’automne prochain, trois différents types de matériel ferroviaire vont rouler avec du biocarburant :

-        deux TER, dans deux régions françaises dont le choix n’est pas encore arrêté.

-        des véhicules locotracteurs dans un centre de triage de wagons de fret.

-        deux locomotives diesel de type BB.

Ce matériel roulant utilisera un carburant composé à  70% de gazole et à 30% de carburant d’origine végétale. « C’est la limite. Après, il y a des contraintes techniques qui pèsent sur l’exploitation », a expliqué Louis Gallois, le patron de l’entreprise publique de chemins de fer. « Un engin locotracteur sera testé avec un carburant 100% végétal. Il est évident qu’il ne va pas bien fonctionner », a encore indiqué le PDG de la SNCF.

Les tests permettront aux techniciens de mesurer les effets produits, sur les moteurs, par l’utilisation d’un biocarburant. « Jusqu’à 15% de carburant végétal ajouté dans le gazole, il ne se passe rien. A 30%, c’est le début des problèmes. A 100%, on est dans le domaine de la recherche », a pour sa part expliqué Dominique Perben, le ministre des Transports.

La SNCF sait déjà qu’il est plus facile de passer au diester, le carburant vert qu’elle a choisi, sur du matériel récent. Car ce matériel a déjà été étudié pour faire baisser la consommation de pétrole des trains. En 5 ans, elle a baissé de 25%. La SNCF cherche à tendre vers la consommation zéro comme le lui a demandé le président Chirac. Au début de cette année, il a demandé aux grandes entreprises publiques de transport de faire le nécessaire pour ne plus dépendre du pétrole. Car malgré la poursuite de l’électrification des lignes, le gazole représente encore 23% de la traction des trains français.

L’opportunité du matériel neuf

L’achat de nouveau matériel est l’occasion idéale pour l’entreprise publique de se lancer dans les carburants verts. D’abord, le parc de TER, les trains express régionaux, est en cours de renouvellement. Leurs moteurs seront neufs. Autre opportunité : 1 000 locomotives neuves sont commandées, dont 600 diesel. Elles arriveront dans le parc de la SNCF l’automne prochain. Les techniciens travaillent déjà pour les convertir au B30, ce carburant vert fait de 70% de gazole et 30% de végétal. Ces locomotives neuves seront plus aptes à passer aux biocarburants que les anciennes, dont les moteurs sont anciens. Ils sont parfois âgés de 30 ou 40 ans.

« Il n’y a pas que les moteurs. Le problème de la distribution est la grande question », a expliqué l’un des responsables de la SNCF. Bien sûr l’entreprise de chemins de fer a ses propres dépôts de carburant mais la question de la distribution est posée car pour rouler, il faut avoir été livré. Les compagnies pétrolières se sont positionnées sur ce nouveau marché. Le carburant vert choisi par la SNCF est produit par la société Diester Industries. Il est commercialisé presque exclusivement par Total. Cette compagnie met en avant les coûts. Elle estime que le B30 revient deux fois plus cher à fabriquer que le carburant classique. L’ADEME, l’Agence de l’environnement et de la maîtrise de l’énergie, évalue pour sa part ce surcoût à 30 centimes d’euro par litre, comparé au prix de revient du gazole classique.

Avoir la garantie de la filière

La SNCF va expérimenter le diester comme carburant.(Photo : Colette Thomas / RFI)
La SNCF va expérimenter le diester comme carburant.
(Photo : Colette Thomas / RFI)

La direction de la SNCF estime que dans trois ou quatre ans, une bonne partie du matériel roulera avec du B30 mais elle n’en dit pas plus sur la percée possible du carburant vert. Il y a trop d’incertitudes, on ne sait pas par exemple à quelle vitesse vont s’encrasser les moteurs. Et l’entreprise publique veut garder un œil sur les coûts. Très vite, le B10 et le B15 (15% d’huile de colza dans le gazole) vont alimenter l’ensemble du matériel. C’est une question de mois, explique encore les promoteurs du projet.

Le PDG de la SNCF a profité de cette présentation dans le cadre de la semaine du développement durable pour lancer un appel aux producteurs de biocarburants, « pour qu’ils aillent aussi vite que nous ». Il s’agit de la compagnie pétrolière Total. Elle fabrique dans certaines raffineries seulement ce carburant vert. Mais Total, comme les autres compagnies, ont des contraintes.  Pour le moment, elles n’ont pas le droit d’incorporer plus de 2% de carburant vert dans les carburants classiques. La SNCF veut anticiper sur la réglementation qui autorisera, en 2010, un ajout de 6% d’huile végétale dans le gazole.

« Si la SNCF passait tous ses moteurs diesel au diester, ça représenterait 20% de la production française », a encore expliqué un responsable de la SNCF. Pour le moment, les besoins en carburant de ses locomotives n’ont pas encore changé de manière significative. Mais la question de l’approvisionnement, de la régularité de la production agricole et de la fabrication industrielle, se posera lorsque la SNCF envisagera de donner une part plus grande au diester. Elle est l’un des plus gros consommateurs d’énergie en France.

La direction de la SNCF avait choisi de présenter son projet sur le site du technicentre Est-Européen. Construit sur les communes de Pantin et Bobigny, il va servir à l’entretien, lavage et maintenance, des 52 rames du TGV est-européen. Ces rames vont commencer à circuler le mois prochain à vitesse normale et rouleront à très grande vitesse à partir de juin 2007. Des trains Corail desservant l’est de la France passeront également en maintenance sur ce nouveau site.

     



par Colette  Thomas

Article publié le 30/05/2006Dernière mise à jour le 30/05/2006 à 17:42 TU