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Société

L’Institut national du cancer dans le collimateur

Le président de l’INCa, le professeur David Khayat; a annoncé qu’il quittera l’Institut avant la fin de l’année. 

		(Photo: AFP)
Le président de l’INCa, le professeur David Khayat; a annoncé qu’il quittera l’Institut avant la fin de l’année.
(Photo: AFP)
Un an après sa création, la gestion de l’Institut national du cancer (INCa) est épinglée par un audit du Conseil général économique et financier du ministère des Finances qui sera remis au gouvernement le 30 juin. Les dépenses somptuaires du président de l’INCa, le professeur David Khayat, sont réfutées mais le rapport de Bercy pointe de nombreux dysfonctionnements.

Pour Jacques Chirac qui a fait de la lutte contre le cancer, l’un des grands chantiers présidentiels, avec la sécurité routière et les handicapés, le rapport du Conseil général économique et financier de Bercy sur l’Institut national du cancer (INCa) tombe au plus mal. Tout est parti de plusieurs lettres anonymes qui dénonçaient «le train de vie» de l’Institut et accusaient le président de l’INCa, le professeur David Khayat, «d’avoir dépensé en un an pas moins d’un million d’euros en notes de restaurants et en frais de déplacements en hélicoptère». 

Si le rapport rendu public, mardi 20 juin, conclut de manière claire à l’absence d’enrichissement personnel du directeur de l’Institut, il reste accablant comme l’était déjà en avril dernier, une enquête du député socialiste Gérard Bapt de la commission des Finances. La place de l’Institut est largement remise en cause. Les enquêteurs de Bercy épinglent en effet sérieusement le fonctionnement de l’Institut. Le rapport écrit «l’organisation des instances et surtout leur conduite, comme l’animation des équipes, n’ont pas été à la hauteur des enjeux et des difficultés de la lutte contre le cancer». Evoquant des «tensions» entre l’INCa et d’autres organismes comme les instituts anticancer, l’Inserm, le CNRS et les établissements de soins, il note également la nécessité «d’une gouvernance renouvelée».

Des recrutements par liens de parenté

Egalement pointée du doigt, la gestion de l’Institut. Les critiques portent notamment sur certains recrutements et des rémunérations, le barème des frais de mission, les locations et aménagements immobiliers. Le rapport déplore la croissance considérable des effectifs (près de 200 personnes). Les enquêteurs de Bercy soulèvent également la question du népotisme, plusieurs personnes ayant été recrutées grâce à leur lien de parenté avec des dirigeants de l’Institut. L’audit évoque aussi des rémunérations de dirigeants hors des pratiques usuelles des organismes publics, mais rappelle que le président David Khayat n’est pas rémunéré. «L'adjointe d'un directeur a touché 9 439 euros en heures supplémentaires sur trois mois, une situation irrégulière pour un cadre», note le rapport. Les multiples déménagements de l’Institut sont aussi vivement critiqués.  Dernier constat et non des moindres, les enquêteurs de Bercy affirment que «l’INCa n’assume pas son rôle de proximité avec les patients ».

Pour les ministères de tutelle de l’INCa, ces nombreux dysfonctionnements doivent être appréciés au regard de «la montée en régime très rapide de cette structure» qui n’a qu’une année d’existence. Mais c'est sans nul doute la question des accusations calomnieuses qui retient l’essentiel de leurs réactions. Dans un communiqué commun, Xavier Bertrand, ministre de la Santé, et François Goulard, ministre de la Recherche, se sont félicités que le rapport d’audit «réfute de manière claire et sans ambiguïté les accusations de dépenses somptuaires et les diverses assertions calomnieuses dont a fait l’objet l’INCa et ses dirigeants». Tout le monde a encore à l’esprit, l’Association pour la recherche sur le cancer (ARC), dont l’ancien président Jacques Crozemarie a été condamné en juin 2000 à quatre ans de prison ferme pour avoir puisé dans les caisses de l’association. Même réaction du professeur David Khayat qui a toujours affirmé qu’il n’avait rien à se reprocher. «Ma gestion est impeccable. En ce qui me concerne, mon honneur est restauré», a affirmé devant la presse le cancérologue, en marge d'une conférence de presse sur les risques liés au mélanome. Il a rappelé qu'il partirait «tranquillement avant la fin de l'année», comme il l'a annoncé à plusieurs reprises.

Le rapport de Bercy se veut également pragmatique. Les enquêteurs formulent également une série de propositions pour «structurer davantage la gouvernance de l’Institut, son fonctionnement interne et son positionnement par rapport aux autres acteurs de la cancérologie. Ces propositions seront examinées par les ministères de tutelle et soumises au prochain conseil d’administration de l’INCa.  



par Myriam  Berber

Article publié le 21/06/2006Dernière mise à jour le 21/06/2006 à TU