Irak
Au moins 40 000 morts en trois ans
(Photo: AFP)
Malgré la proclamation officielle de la fin de la guerre, le 1er mai 2003, le conflit en Irak se poursuit sous la forme d’une guerre civile faite de luttes pour le pouvoir entre sunnites, chiites et Kurdes mêlées d’un terrorisme et d’une résistance visant l’occupation américaine. Les principales villes irakiennes connaissent quotidiennement leur lot d’attentats et d’enlèvement. Kirkouk (nord), Bassorah, Najaf (sud) et Bagdad, la capitale, sont devenues des villes symboles où massacres riment avec résistance et crimes de guerre.
Plus de mille morts chaque mois
A Najaf, la ville sainte chiite à quelque 160 kilomètres au sud de Bagdad, le dernier attentat commis par un kamikaze, le 10 août, a fait au moins 35 morts et plus de 120 blessés. Le mois dernier c’est la ville voisine de Koufa qui était le théâtre d’un attentat dans lequel 59 personnes ont été tuées. Dans ce Sud à majorité chiite, ce sont des groupuscules sunnites qui s’opposent au Premier ministre, Nouri al Maliki, un chiite modéré dont le gouvernement est soutenu par les Etats-Unis. Alors qu’à Najaf, les lieux saints sont visés en raison de l’affluence des pèlerins qu’ils connaissent régulièrement, à Bagdad ce sont surtout les lieux publics et les restaurants qui servent de cibles aux attaques terroristes. Entre le 10 et le 11 août plus d’une dizaine de personnes y ont trouvé la mort.
Par ailleurs, c’est dans le Nord, à Kirkouk et à Kout que l’opposition au président de la République, Jalal Talabani, un Kurde, se manifeste. Le 10 août, le président avait convoqué les représentants des différentes confessions religieuses pour tenter d’apaiser les passions ravivées par des articles parus dans des journaux kurdes hostiles à un imam chiite. Appelant ses interlocuteurs à se rassembler autour du programme de «pacification» de la capitale, Talabani leur a rappelé que les hôpitaux de Bagdad enregistrent en moyenne tous les mois plus de 1 000 morts.
Pour ramener l’ordre, en particulier dans la capitale, le gouvernement a lancé un nouveau programme sécuritaire baptisé «En avant ensemble». Un rapport des Nations unies fait en effet état d’une moyenne de 100 Irakiens tués chaque jour dans le pays. Et, de son côté, le ministère irakien de la Santé a publié des statistiques qui indiquent que le mois de juillet a été le plus meurtrier avec 1 850 morts contre 1 350 au mois de juin. Le programme gouvernemental lancé à la mi-juin n’a pas donné de résultats probants malgré la mobilisation de 50 000 membres des forces de sécurité irakiennes et des soldats américains. Il a donc été revu et corrigé pour une « deuxième phase des opérations».
Bagdad «nettoyée» par les Américains
5 000 soldats américains viennent renforcer les effectifs et seront principalement actifs dans Bagdad où des opérations de nettoyage seront conduites, quartier par quartier. L’armée américaine qui a pris les choses en main vient de dévoiler «sa stratégie pour la bataille de Bagdad». Il s’agira d’établir «des zones sûres au sein d’un quartier, pour ensuite les étendre jusqu’à contrôler la capitale» tout entière. Le quartier Doura à Bagdad, réputé le plus dangereux de la capitale où sévissent toutes les milices, a servi de champ d’expérimentation.
Doura a été investi par les escadrons irakiens et américains qui l’ont d’abord «bouclé» avant de procéder à une fouille systématique, maison par maison, ce qui représente quelque 1 500 familles. De nombreuses arrestations ont été opérées et des armes confisquées. Les armes autorisées sont régulièrement répertoriées : une par famille et cinq par mosquée. «Depuis le début de l’opération, il y a eu zéro meurtre à Doura, alors qu’il en avait plus de vingt par jour lors des pires journées», se félicite le colonel Michael Beech, commandant la 4ème brigade de la 4ème division d’infanterie américaine qui dispose d’un budget de 500 000 dollars pour «nettoyer le marché et les rues du quartier», au sens propre comme au sens figuré.
par Didier Samson
Article publié le 11/08/2006Dernière mise à jour le 11/08/2006 à TU