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Climat

Mauvaises nouvelles de l’Arctique

De nombreuses études confirment que l’emprise de la glace diminue au pôle Nord et que ce phénomène s’est accéléré ces dernières années. 

		(Photo : <a href="http://www.noaa.gov" target="_blank">National Oceanic and Atmospheric Administration</a>)
De nombreuses études confirment que l’emprise de la glace diminue au pôle Nord et que ce phénomène s’est accéléré ces dernières années.
(Photo : National Oceanic and Atmospheric Administration)
Alors que les négociations sur l’après Protocole de Kyoto commencent, les scientifiques sont alarmistes sur les changements climatiques. Une étude indique que le réchauffement de la planète n’est plus discutable et que les activités humaines en sont la cause. Une autre étude estime que les hommes ont dix ans devant eux, pas plus, pour inverser la tendance car le réchauffement se produit plus vite que prévu, notamment au pôle Nord.

Ces deux dernières années, pendant l’hiver, l’emprise de la glace en Arctique, a baissé de 6%. Par le passé, le phénomène avait été beaucoup moins marqué. La diminution de la masse de glace atteignait en moyenne 1,5%, du total. Et le recul de la banquise se voyait de décennie en décennie et non pas d’année en année. Cette nouvelle étude concernant l’océan Arctique confirme ce que l’on savait déjà : l’emprise de la glace diminue au pôle Nord. La nouveauté, c’est l’accélération du phénomène, une accélération beaucoup plus rapide que prévu. 

L’étude est basée sur l’analyse d’images satellites par les scientifiques. Comme la NASA (Agence spatiale américaine) engrange des images de la terre en général et du pôle Nord en particulier depuis 1978, les scientifiques peuvent constater de visu l’ampleur du recul des glaces de l’Arctique et son rythme. 

Ce phénomène «résulte probablement du réchauffement atmosphérique dû aux gaz à effet de serre», a estimé Joey Comiso, un climatologue du centre Goddard, le laboratoire scientifique de la Nasa. Les travaux de Joey Comiso sont publiés dans le numéro de septembre de la revue Letters of Geophysical Research.

Autre changement remarqué par le chercheur concernant les glaces de l’Arctique : «Dans le passé, la réduction des glaces arctiques en hiver était nettement moins importante que durant l’été». De précédentes études ont déjà montré une tendance au réchauffement de cette région polaire. Depuis plusieurs années déjà, la période de fonte des glaces s’est allongée d’environ deux semaines.

Si elle a été présentée dans un magazine spécialisé, l’étude américaine a également été détaillée à l’occasion d’un colloque en Californie par le directeur en personne du centre Goddart. Dans son compte-rendu, James Hansen a été plus radical que le chercheur de son équipe dont les propos ont été relayés par Letters of Geophysical Research. James Hansen a averti que si le monde ne changeait pas ses habitudes, la température de la planète allait augmenter de 2 à 3° et alors «nous créerons une planète différente». Pour bien se faire comprendre, James Hansen a indiqué qu’il fallait réussir à limiter à un degré le réchauffement de la planète dans les décennies à venir. La recette qu’il propose, on la connaît déjà : il faut que les gouvernements prennent des mesures pour contrôler et limiter les rejets de gaz carbonique dans l’atmosphère.

Quand la science rejoint la politique

Comme d’autres l’ont fait avant lui pour donner l’alerte, le directeur de l’Institut pour les études spatiales de la Nasa a parlé du danger d’un réchauffement trop accentué des climats qui entourent la terre. Le scénario est déjà prêt : la fonte des glaces fera monter le niveau des mers au point que par exemple, l’île de Manhattan, à New York, sera en grande partie recouverte d’eau. Les sécheresses et les canicules se multiplieront, des ouragans se formeront dans des régions du monde qui n’étaient pas soumises à ces évènements climatiques. Et il est probable que 50% des espèces végétales et animales disparaîtront.

James Hansen a également critiqué l’administration Bush. Le scientifique l’a accusée d’avoir cherché à le faire taire et d’avoir atténué les conclusions des études réalisées par son équipe de scientifiques. L’engagement politique du directeur de l’Institut Goddard ne s’arrête pas là. Il a déclaré que les Etats-Unis avaient «laissé passer l’occasion» d’exercer leur influence dans la lutte contre le réchauffement climatique. On se souvient qu’en 2001, le président Bush avait décidé de retirer les Etats-Unis du processus de réduction des émissions de gaz à effet de serre en refusant le Protocole de Kyoto. Il allait handicaper l’économie américaine et les pays en développement n’étaient pas impliqués dans les efforts réclamés par la communauté internationale.

Enfin, Hansen a profité de cette réunion pour rendre hommage à la Californie. Le mois dernier, elle a pris la décision «courageuse» d’adopter une loi pour «copier» le système de réduction des émissions inventé par le Protocole de Kyoto. Si la Californie, Etat américain le plus riche et le plus peuplé des Etats-Unis, a la réputation d’avoir la fibre verte, son gouverneur, Arnold Schwarzenegger sait également que les élections législatives de novembre prochain approchent à grand pas.

«Nous ne pouvons pas brûler, souligne-t-il, tous les combustibles fossiles disponibles sans causer un changement climatique radical. Il ne s’agit pas d’une simple théorie. Nous connaissons suffisamment le cycle du carbone pour le dire». Les Européens seront sans doute satisfaits d’entendre un discours aussi clair sur le risque des changements climatiques.

Autre étude, mêmes résultats

Peu avant la publication de l’étude de la Nasa, une autre, réalisée par des instituts de recherche suisse, allemand et américain dégageait le soleil de toute responsabilité dans le réchauffement de la planète. «Dans l’ensemble, nous ne pouvons trouver aucune preuve de variations de la luminosité du soleil d’une amplitude suffisante pour provoquer des variations du climat significatives à une échelle de cent, mille ou même un million d’années», estiment les auteurs de l’étude. «Nos résultats impliquent que, au cours du dernier siècle, l’action de l’homme a de loin surpassé les changements de la luminosité du soleil pour ce qui est du changement climatique», a expliqué l’un des chercheurs, Tom Wigley, du Centre national pour la recherche atmosphérique. Ces scientifiques, eux aussi, font des prévisions alarmistes sur les phénomènes climatiques extrêmes qui pourraient toucher l’Europe notamment.

Si le doute était encore permis devant des informations dérangeantes annoncées depuis bien longtemps, ces nouvelles études confirment le réchauffement de la planète et le rôle des activités humaines dans ce phénomène. Ces études sont publiées au moment où des pourparlers s’engagent sur l’après Kyoto. Une quarantaine de ministres de l’Environnement sont en conclave pendant deux jours en Suisse pour des «consultations informelles» visant à préparer la réunion annuelle de la Convention sur les changements climatiques. Elle se tiendra en novembre à Nairobi. Les pays industrialisés veulent que les pays en développement s’engagent à réduire leurs émissions dans la deuxième phase du Protocole de Kyoto qui couvre la période 2012-2017. L’argument des pays riches, c’est la progression spectaculaire des rejets de gaz à effet de serre de la Chine et de l’Inde entre 1990 et 2003 : 65% d’augmentation pour la première, 75% pour la seconde. Un nouvel accord n’aurait donc pas de sens en laissant les pays émergents à l’extérieur. Les pays en développement ont fait savoir que, pour leur part, ils attendaient avant tout un engagement chiffré des futures réductions d’émissions des pays riches. Comme d’habitude, les prochaines négociations promettent d’être rudes.    



par Colette  Thomas

Article publié le 14/09/2006 Dernière mise à jour le 14/09/2006 à 17:35 TU