Rechercher

/ languages

Choisir langue
 

Pays-Bas

Les responsabilités néerlandaises de la pollution ivoirienne

Les responsabilités s'avèrent pour le moins partagées dans le scandale du Probo Koala. L’enquête judiciaire ouverte aux Pays-Bas sur le scandale des déchets toxiques déversés à Abidjan a déjà établi que la mairie et le port d’Amsterdam savaient dès la première semaine de juillet que les eaux usées du Probo Koala étaient anormalement polluées.

De notre correspondante aux Pays-Bas

Dans le port d'Amsterdam. La mairie et les autorités portuaires de la ville néerlandaise savaient que les eaux usées du <i>Probo Koala</i> étaient polluées. &#13;&#10;&#13;&#10;&#9;&#9;(Photo: AFP)
Dans le port d'Amsterdam. La mairie et les autorités portuaires de la ville néerlandaise savaient que les eaux usées du Probo Koala étaient polluées.
(Photo: AFP)

Les déchets vidangés le 19 août à Abidjan par le cargo Probo Koala n’étaient pas des slops (eaux sales de nettoyage des cuves du tanker), mais bien des produits chimiques. Telle est la première conclusion, troublante, de l’enquête judiciaire ouverte par le parquet de La Haye sur l’affaire Trafigura, du nom de la société néerlandaise de négoce international qui a affrété le Probo Koala. D’autre part, le quotidien De Volkskrant a révélé le 20 septembre que c’est un fonctionnaire véreux de la mairie d’Amsterdam qui aurait permis, en toute illégalité, le repompage de déchets déjà suspects à bord du Probo Koala, début juillet, au port d’Amsterdam. «De ce fait, le navire a pu quitter le port alors qu’une enquête pénale sur son chargement était déjà en cours, affirme De Volkskrant. La police, surprise par cette action, a essayé le lendemain de retrouver le Probo Koala, mais il était déjà en haute mer».

Tout a commencé à l’arrivée du Probo Koala au port d’Amsterdam, le 2 juillet. Ses 581 tonnes de slops ont vite été repérées par le personnel du port et la police de l’environnement, à cause de leur terrible odeur. Ce mélange d’eau, de soude caustique et de résidus pétroliers a été trouvé anormalement pollué, lors des analyses effectuées par Amsterdam Port Services (APS), une société aujourd’hui mise en cause. Ce groupe privé, qui retraite les déchets maritimes au port d’Amsterdam, avait tenté – en vain – de renégocier son contrat à la hausse avec Trafigura, après avoir détecté la présence «anormale» de soude caustique et de produits soufrés dans ces eaux sales.

«Si les autorités avaient bien fait leur travail…»

Du côté de Trafigura, rien n’a changé dans la version des faits présentée depuis le 11 septembre, malgré l’arrestation, le 17 septembre, de deux de ses responsables à Abidjan. «Nous avons renoncé à traiter ces déchets aux Pays-Bas, explique Jan Maat, le porte-parole de Trafigura, pour ne pas retarder le cargo dans son itinéraire ni payer quelque 250 000 dollars de pénalités portuaires en cas de retard». Inquiet d’avoir à retraiter à ses frais cette cargaison de déchets indésirables, APS, de son côté, aurait demandé au chef des services de la ville d’Amsterdam chargés de la surveillance de l’environnement d’autoriser le repompage des slops à bord du Probo Koala. Ce fonctionnaire, soupçonné par la police d’avoir eu «des liens étroits» avec APS, aurait délivré ce document en toute illégalité. Les lois néerlandaises et une convention européenne interdisent en effet l’exportation de déchets maritimes autres que les slops ordinaires.

«Si les autorités avaient bien fait leur travail, ces déchets toxiques n’auraient jamais dû quitter Amsterdam et n’auraient pas fait de victimes à Abdijan», regrette Diederik Samsom, un député travailliste membre de l’opposition. L'affaire, qui a fait chuter le 6 septembre le gouvernement de transition en Côte d’Ivoire, menace de prendre un tour politique aux Pays-Bas. La ville d’Amsterdam nie avoir manqué à ses devoirs, dans la mesure où bien d’autres administrations, telles que le port d’Amsterdam, l’inspection environnementale et la police judiciaire, qui avait déjà ouvert une enquête, disposaient des mêmes informations.

«Nous savions que les déchets étaient plus fortement pollués que ce que le capitaine du navire avait bien voulu dire, mais nous n’avions aucune possibilité légale d’empêcher le Probo Koala de reprendre la mer», se défend Marijke Vos, la maire-adjointe d’Amsterdam responsable de l’environnement. De son côté, la justice a déjà réfuté cet argument : «Si on nous avait demandé notre avis, nous aurions dit qu’une licence d’exportation était nécessaire», a affirmé le 19 septembre un porte-parole du procureur dans les colonnes du Volkskrant. De son côté, le Parlement demande des comptes précis au gouvernement. Pieter van Geel, le ministre de l’Environnement, est d’ores et déjà accusé par l’opposition d’avoir «mal informé» le Parlement en évoquant, début septembre, sans vérifier ses informations, la présence de «déchets maritimes inoffensifs» à bord du Probo Koala.



par Sabine  Cessou

Article publié le 21/09/2006 Dernière mise à jour le 21/09/2006 à 15:39 TU

Articles

émissions


[16/09/2006]