Tchad
Etat d’urgence
(Photo: AFP)
Le gouvernement tchadien a tenu un conseil extraordinaire, le 13 novembre, pour évoquer les violences interethniques qui ont déjà fait plus de 300 morts dans l’est du pays. Les affrontements qui ont débuté le 31 octobre dernier, sont une conséquence de la guerre dans le Darfour, selon les autorités tchadiennes qui tiennent le Soudan pour responsable de la situation.
Le gouvernement tchadien a décrété l’état d’urgence dans les régions, Ouaddaï, Wadi Fira et Salamat à l’extrême est du pays. Ces régions sont en proie à des affrontements interethniques depuis la fin du mois d’octobre. Les autorités tchadiennes ont aussi étendu les mesures «par prévention» aux régions de l’ouest, du nord et du sud et à la capitale Ndjaména. L’état d’urgence est donc en vigueur sur la quasi-totalité du pays. Pour accompagner ses mesures d’urgence, le gouvernement a aussi nommé des ministres résidents. Le communiqué gouvernemental précise qu’ils seront dotés «de tous les moyens et de tous les pouvoirs».
Pascal Yaodimnadji, le Premier ministre, lors d’une déclaration a précisé les attributions de ces nouveaux ministres résidents qui auront sous leurs ordres l’armée et la police et qui pourront «user de tous les moyens à leur disposition pour mettre fin aux affrontements et protéger toutes les populations». Au-delà des mesures de sécurité, le gouvernement a aussi décidé de rétablir «la censure préalable» pour les journaux privés et interdit «le traitement par les radios des questions pouvant porter atteinte à l ‘ordre public, à l’unité nationale, à l’intégrité du territoire et au respect des institutions républicaines».
«La main du Soudan»
L’Etat tchadien justifie ces mesures par le souci «d’enrayer les violences entre tribus arabes et non-arabes» et de situer les responsabilités. Les autorités tchadiennes ont annoncé la mise en place d’une commission d’enquête mais en même temps désignent le Soudan comme le principal acteur des troubles dans une région à cheval sur le Darfour, l’Est du Tchad et le Nord-Est de la Centrafrique. Ces violences font partie «d’une stratégie globale élaborée et mise en œuvre par le gouvernement soudanais pour la déstabilisation du Tchad», soutient le gouvernement tchadien. Les violences dans l’est du Tchad seraient de même nature que celles du Darfour dont sont victimes les populations négro-africaines. Selon des témoignages recueillis par le Haut commissariat des Nations unies pour les réfugiés (HCR), les raids contre les populations civiles sont ciblés et sont menés contre «les tribus non-arabes».
Mais, quelque soit la gravité de la situation, les mesures prises par le gouvernement sont «disproportionnées», affirme Ibn Oumar Mahamat Saleh, le porte-parole de la Coordination pour la défense de la constitution (CPDC), la principale coalition de l’opposition. «Nous sommes dans une situation de dictature» qui entraînera « la mort de la liberté de la presse », déplore Nadjikimo Benoudjita, le président de l’Association des éditeurs de la presse privée du Tchad (AEPT). La Ligue tchadienne des droits de l’Homme (LTDH) s’inquiète aussi des mesures prises par le gouvernement et «l’état d’urgence ne doit pas être un prétexte pour ouvrir la voie à des mesures liberticides», prévient son président Massalbaye Tenebaye.
par Didier Samson
Article publié le 14/11/2006 Dernière mise à jour le 14/11/2006 à 17:59 TU