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Afrique

L’homosexualité est toujours un tabou

En 2001, au Caire, des dizaines de gays avaient été arrêtés pour «appartenance à une secte blasphémant l’islam».  

		(Photo : AFP)
En 2001, au Caire, des dizaines de gays avaient été arrêtés pour «appartenance à une secte blasphémant l’islam».
(Photo : AFP)
Malgré l’approbation, mardi, par le Parlement sud-africain, d’une loi autorisant l'union civile de gays, l'homosexualité reste très largement taboue dans la plupart des pays d'Afrique subsaharienne comme dans le Maghreb. Les églises chrétiennes, ainsi que les dirigeants musulmans et les chefs traditionnels se déclarent toujours opposés aux relations sexuelles entre personnes du même genre. Les organisations humanitaires dénoncent les persécutions dont sont victimes les gays dans plusieurs pays du continent où les pratiques homosexuelles, même entre adultes consentants, sont jugées illégales.

Selon les groupes d’information homosexuels, il est difficile voire dangereux d’être gay en Afrique. C’est ce qu’affirme notamment l’association sud-africaine Behind the Mask (Derrière le masque) qui a créé une base de données sur la situation des gays en Afrique et sur les sanctions pénales qui les menacent dans 53 Etats du continent. Ainsi, au Soudan, où les lois islamiques les plus strictes sont actuellement en vigueur, les personnes du même sexe ayant des rapports intimes peuvent être condamnées à la peine capitale. Dans les Etats du nord du Nigeria, où la loi islamique, la charia, est également en vigueur, mais aussi, par exemple, en Gambie, en Tanzanie, au Kenya ou en Zambie, les homosexuels risquent 14 ans de prison.

Dans le reste du continent, selon la même organisation sud-africaine, les peines de prison pour les homosexuels sont plus légères : 7 ans au Botswana, 7 ans en Ouganda et 3 ans dans plusieurs autres Etats, particulièrement dans des pays francophones comme le Cameroun, l’île Maurice, le Niger, la Guinée, le Sénégal et la Mauritanie. Pourtant, peu de procès, concernant les pratiques homosexuelles, ont été ouverts dans ces pays, tandis que, au Cameroun c’est la presse populaire qui a lancé des accusations contre des personnalités.

Les gays victimes de la démagogie politique

Dans la plupart des cas, ces questions sont plutôt du ressort du droit coutumier dans les pays subsahariens, où certains dirigeants politiques n'hésitent pas à proférer des menaces contre les gays. C’est le cas notamment du président du Zimbabwe, Robert Mugabe, qui a déclaré que «l’homosexualité est une tare blanche qui ne s’applique pas aux Africains», même si la loi du pays n’interdit pas formellement ces pratiques entre adultes consentants. 

En Ouganda, le président Yoweri Museweni, a également fait campagne contre les homos, coupables de «crimes contre nature» et au Nigeria le président Obasanjo a considéré que cette forme de relation est une «perversion du droit divin». La condamnation des pratiques homosexuelles par l’Eglise catholique est une constante qui date de la période coloniale. Plusieurs Eglises protestantes africaines, notamment nigérianes et rwandaises, ont pour leur part marqué leurs distances vis-à-vis des Eglises épiscopales américaines après l’ordination d’un évêque gay aux Etats-Unis en 2004.

Pour Alex Siewe, de l’hebdomadaire Jeune Afrique, «l’Eglise a condamné sans réserve l’homosexualité pendant la guerre coloniale ; les régimes marxistes ou de parti unique ont présenté plus tard ces pratiques comme une déviance propre à la bourgeoisie, conséquence du capitalisme décadent ; aujourd’hui, c’est paradoxalement au nom d’un retour à des valeurs ancestrales africaines que le sujet est combattu avec véhémence comme une maladie occidentale».

Situation difficile dans le Mghreb

La situation des homosexuels est sûrement plus délicate dans les Etats du Maghreb où l’influence de l’islam est plus importante que dans les pays sub-sahariens. Ainsi en Algérie, en Tunisie et au Maroc, les homosexuels peuvent être condamnés à des peines allant jusqu’à trois ans de détention. En Libye, ils encourent cinq ans en prison. 

En Egypte, les autorités se montrent très sévères vis-à-vis des gays. Ainsi le 11 mai 2001, 55 suspects ont été arrêtés dans un bateau-discothèque du Caire. Il ont été ensuite poursuivis pour «appartenance à une secte blasphémant l’islam». 23 d'entre eux ont finalement été jetés en prison. Le  tollé international qui avait suivi avait incité le président Moubarak à casser le verdict de la Haute cour. Selon des observateurs, cités par Jeune Afrique, l’Etat égyptien «en réprimant les homosexuels, a cherché à faire des concessions aux islamistes, devenus première force d’opposition».

Dans la plupart des pays africains, surtout au sud du Sahara, l’homosexualité féminine est beaucoup mieux  tolérée même si des lesbiennes sont régulièrement victimes d'agressions,  même en Afrique du Sud. Le tabou homosexuel est encore loi d’être levé en Afrique. La pandémie du sida n’a fait qu’aggraver la situation.



par Antonio  Garcia

Article publié le 15/11/2006 Dernière mise à jour le 17/05/2008 à 12:00 TU