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Santé-Sida

La force d'inertie de l’épidémie

Peter Piot, directeur de l'Onusida présente le rapport annuel sur l'épidémie du sida. 

		(Photo : AFP)
Peter Piot, directeur de l'Onusida présente le rapport annuel sur l'épidémie du sida.
(Photo : AFP)
Il y a un quart de siècle, les tout premiers cas d’une maladie inconnue et effrayante étaient observés aux Etats-Unis, en République démocratique du Congo et sur les rives du lac Victoria, en Afrique de l’Est. 25 ans après l’apparition de l’épidémie, le virus du sida (syndrome de l’immunodéficience acquise) a infecté 65 millions de personnes dans le monde et en a tué 25 millions. Dans son rapport annuel, Onusida, créée il y a dix ans, rappelle que l’épidémie a continué de progresser en 2006 en même temps que sont apparus des signes encourageants, notamment en ce qui concerne le comportement sexuel des jeunes.

Pour la toute première fois, note Onusida, la communauté internationale a les moyens de commencer à inverser le cours de l’épidémie de sida dans le monde. «Mais la riposte au sida doit considérablement se renforcer et devenir plus stratégique et mieux coordonnée pour que le monde atteigne les engagements pris». C’est en 2001, lors d’une session extraordinaire de l’Assemblée générale de l’Onu, que les leaders des 189 pays membres se sont engagés solennellement à réaliser des objectifs dans la lutte contre le VIH (virus de l'immunodéfience humaine), engagements assortis d'échéances fin 2003, 2005 et 2010. Le but étant de coller à l’objectif du Millénaire, à savoir stopper l’épidémie et commencer à en inverser le cours d’ici 2015. Au vu du bilan actuel et malgré quelques avancées, l’Onusida relève que de nombreux pays n’ont pas tenu leurs engagements. «Le fait de ne pas réaliser les objectifs auxquels tous les Etats membres ont souscrit est grave et aura des conséquences à l’échelle mondiale» avertit l’Organisation.

L’argent arrive

Le rapport 2006 présente l’ensemble des données le plus complet jamais rassemblé. Cette année, ce sont en effet 126 pays et, pour la première fois, plusieurs représentants de la société civile qui ont fourni à l’Organisation des Nations unies, un état des lieux de leur combat contre le sida. Parmi les progrès constatés, l’accroissement important des moyens financiers a été décisif. En 2005, les fonds disponibles ont atteint 8,3 milliards de dollars, ce qui demeure encore loin des montants nécessaires estimés à 14,9 milliards pour 2006. Les dépenses publiques des gouvernements ont aussi considérablement augmenté, notamment dans les pays à faible revenu d’Afrique sub-saharienne, mais moins dans les pays à revenu intermédiaire. En 2005, ces ressources intérieures ont atteint 2,5 milliards de dollars.

Cette augmentation de l’argent disponible a notamment joué sur la disponibilité des traitements pour les plus pauvres. De 240 000 en 2001, le nombre de personnes sous thérapie antirétrovirale dans les pays à faible ou moyen revenu, est passé à 1,3 million fin 2005. Même si la progression est remarquable, il n’en reste pas moins que 80 % des malades ayant besoin d’un traitement, ne parviennent toujours pas à se faire soigner.

Autre signe encourageant pour la prévention, dans huit des onze pays d’Afrique sub-saharienne, le pourcentage de jeunes ayant des rapports sexuels avant l’âge de 15 ans a baissé et le recours au préservatif est en hausse. Le rapport souligne aussi, que dans six pays africains sur les onze les plus touchés par le sida, la prévalence du VIH a diminué de 25 % parmi les 15-25 ans dans les populations urbaines. Si plusieurs pays sont parvenus à traiter 60 % des femmes enceintes séropositives pour éviter la transmission mère-enfant, au niveau mondial, seules 9 % des femmes bénéficient de cette prophylaxie.

De graves lacunes

Aujourd’hui, Onusida estime que 39,5 millions de personnes vivent avec le virus du sida, soit 2,6 millions de plus qu’en 2004. La maladie a tué 2,9 millions de personnes cette année, contre 2,7 en 2004. C’est dire si le moment de baisser la garde est encore loin surtout quand on sait que les jeunes représentent encore actuellement 40 % des nouvelles infections.

Dans ce domaine, Onusida ne manque pas de pointer les graves lacunes qui entravent les programmes de prévention. Ceux-ci ne touchent pas ceux qui sont le plus exposés au risque. Alors que les Etats membres de l’Onu s’étaient «engagés à ce que 90 % des jeunes soient bien informés sur le sida fin 2005, les enquêtes montrent que moins de 50 % d’entre eux ont atteint des niveaux de connaissance suffisants» s’inquiète Onusida.

Dans le monde, l’épidémie aurait atteint son pic à la fin des années 1990, mais elle reste en croissance en de nombreux points du globe. C’est le cas notamment de l’ancien bloc soviétique où l’épidémie se propage via l’injection de drogue et de l’Asie du Sud et du Sud-Est où la prostitution est le principal vecteur. Les contaminations ont encore progressé de 12 % en Afrique du Nord et au Moyen-Orient et de 7 % en Afrique sub-saharienne, pendant qu’elles restaient relativement stables dans le reste du monde.



par Claire  Arsenault

Article publié le 21/11/2006 Dernière mise à jour le 21/11/2006 à 16:36 TU