Sida
Bill Gates donne l’exemple
(Photo : AFP)
Bill Gates pèse lourd dans la lutte contre le VIH et il le sait. Son intervention à la tribune de la 16ème conférence mondiale sur le sida, organisée cette année à Toronto par l’International Aids Society (IAS), en a donné une nouvelle preuve. Il est vrai que la Fondation Bill et Melinda Gates est le plus gros contributeur privé au Fonds global de lutte contre le sida, le paludisme et la tuberculose. Elle a annoncé, quelques jours seulement avant l’ouverture de la conférence, l’octroi d’un don de 500 millions de dollars à cette structure mise en place en 2002 pour lever des fonds et financer des programmes dans les pays pauvres. Cette somme sera versée en 5 ans, entre 2006 et 2010, à raison de 100 millions par an. Il ne s’agit pas de la première contribution de la fondation à la lutte contre le sida. Elle avait déjà alloué 150 millions de dollars au financement de programmes, au Botswana notamment. Et elle finance aussi des projets de recherche sur des microbicides (gels vaginaux susceptibles d’empêcher la transmission du virus), des médicaments oraux préventifs et des vaccins.
Cette nouvelle initiative manifeste néanmoins la volonté du couple Gates de renforcer son engagement dans la lutte contre le sida, un fléau dont il a vu les ravages auprès des populations les plus démunies lors de voyages en Afrique, le continent le plus touché par la maladie. A Toronto, Melinda Gates, qui travaille aux côté de son époux au sein de leur fondation, a d’ailleurs insisté sur la nécessité de lutter contre l’inégalité dont sont victimes les malades du sida dans les pays pauvres : «Aujourd’hui, pas même une personne sur cinq parmi les plus exposées à une infection par le virus du sida a accès à des moyens à l’efficacité prouvée, comme les préservatifs, des aiguilles propres, l’éducation et les tests». Et Bill de mettre en garde contre les conséquences de la propagation de l’épidémie qui, si elle se poursuit «au rythme actuel», rendra «impossible, à l’horizon de cinq ou dix ans, de faire ce que la morale impose : traiter toutes les personnes infectées par le VIH».
Pérenniser les financements
La donation de la Fondation Gates est importante car elle montre la voie aux autres contributeurs, privés mais aussi et surtout publics, en pérennisant les financements sur cinq ans. Et c’est bien là un des principaux enjeux de la lutte contre le sida : réussir à assurer la mobilisation financière à moyen et long terme. Ces dernières années, des progrès importants ont été réalisés : les contributions publiques sont passées de 1,6 milliard en 2001 à 8,3 en 2005. Cet effort considérable a notamment permis de donner accès aux traitements anti-rétroviraux à 1,5 million de personnes. Mais il n’est pas suffisant -l’Onusida estime qu’il faut 22 milliards de dollars annuels pour être efficace-, et surtout il n’est pas assuré de rester au même niveau malgré les engagements pris par les bailleurs de fonds. L’envoyé spécial des Nations unies pour le sida en Afrique, Stephen Lewis, a d’ailleurs récemment rappelé à l’ordre les pays membres du G8 dont les promesses faites l’année dernière lors de leur sommet en Ecosse -notamment en matière d’allègement de la dette- «s’effilochent» ou «ont été trahies». Dans ce contexte, la générosité des donateurs privés peut servir à inciter les contributeurs publics à ne pas oublier qu’ils ont leur part de travail à accomplir pour financer mais aussi organiser la lutte contre l’épidémie.
Car on ne peut pas jouer la seule carte de la privatisation de l’aide internationale même si elle parait désormais incontournable et indispensable. Avec un budget de 60 milliards de dollars -depuis que le milliardaire américain Warren Buffet lui a fait don de 30 milliards de dollars-, la Fondation Bill et Melinda Gates représente, en effet, une manne énorme pour l’action humanitaire. Mais elle doit être complémentaire de l’engagement des Etats, à la fois financier et politique.
par Valérie Gas
Article publié le 14/08/2006Dernière mise à jour le 14/08/2006 à TU